Thèse en cours

Les prérogatives du Chef de l'Etat à l'aune de la séparation des pouvoirs. Etude comparée France, Italie, Pologne

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Auteur / Autrice : Mathilde Chavatte
Direction : Jean-Philippe Derosier
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Droit public
Date : Inscription en doctorat le 01/10/2023
Etablissement(s) : Université de Lille (2022-....)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale des Sciences Juridiques, Politiques et de Gestion (Lille)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de Recherche Droits et Perspectives du Droit
Equipe de recherche : LERDP - L'Equipe de recherches en droit public

Résumé

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Traditionnellement, la doctrine constitutionnelle assimile le principe de séparation des pouvoirs à la théorie développée par Montesquieu qui opère une séparation organique et non fonctionnelle entre trois pouvoirs que sont le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire, afin de prévenir l'arbitraire au sein de l'État. Si « le pouvoir arrête le pouvoir », on constate cependant une atteinte à l'État de droit notamment en Pologne. Pour autant, certains auteurs ont démontré que la théorie de la séparation des pouvoirs relevait davantage d'un fantasme juridique que d'une réalité. Montesquieu lui-même, dans son ouvrage De L'Esprit des lois, évoque d'ailleurs davantage une collaboration des pouvoirs ou encore une balance des pouvoirs ; de plus, Montesquieu ne parle pas du judiciaire comme un pouvoir à part entière comme le sont les pouvoirs exécutif et législatif. Ainsi, la doctrine française, sous l'influence de la Cour européenne des Droits de l'Homme, a interprété à sa manière la théorie émise par Montesquieu pour en détourner une théorie séparatiste des pouvoirs. Une théorie détournée que le Conseil constitutionnel français va constitutionnellement consacrer au travers de l'article 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen et dont il va en délimiter la portée à de nombreuses reprises comme lorsqu'il a protégé le caractère spécifique des fonctions juridictionnelles, sur lesquelles ne peuvent empiéter ni le législateur ou le Gouvernement ni aucune autorité administrative. Le projet a choisi de mener une analyse qui s'intéresse tant à la distribution, au contrôle qu'à la collaboration entre les pouvoirs c'est-à-dire d'analyser l'ensemble des pouvoirs accordés au chef de l'État dans la Constitution qui s'immisce a priori dans les fonctions exécutive, législative et judiciaire . Il s'agit ensuite d'appréhender le contrôle exercé sur cette détention et l'usage qui en est fait afin de comprendre les enjeux d'une telle immixtion du chef de l'Etat au sein des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. En effet, dans les trois systèmes de la comparaison, le chef de l'Etat représente, traditionnellement, un pouvoir « neutre » au sein du régime politique comme en Italie où le Président de la République n'appartient à aucun des pouvoirs exécutif, législatif ou judiciaire. Il est le gardien de la Constitution et contribue, en ce sens, à l'équilibre du régime. En pratique, toutefois, cette neutralité et cette contribution à l'équilibre du régime sont parfois bafouées, notamment lorsque le chef de l'Etat use, voire abuse de ses prérogatives législatives ou judiciaires. Toutefois et curieusement, la Constitution a doté le Président de la République de prérogatives importantes qui méconnaissent, a priori, le principe de séparation des pouvoirs et d'indépendance de la justice. En ce sens, la faculté de gracier ou de nommer des juges constitutionnels du Président de la République peut être considérée comme une ingérence dans le pouvoir judiciaire ; la promulgation des lois peut être assimilée à une intervention dans le pouvoir législatif. En temps d'exception, on observe même, non plus seulement une immixtion dans les pouvoirs exécutif, législatif ou judicaire mais une véritable concentration des pouvoirs que l'on retrouve, dans le régime français, à l'article 16 de la Constitution. L'exercice des pouvoirs de régime d'exception remet également en question le principe même de l'indépendance de la justice et donc, de facto, le principe de séparation des pouvoirs en ce que le chef d'Etat puisse détenir tous les pouvoirs en même temps comme en dispose l'article 16 de la Constitution française de 1958 ; dès lors, il sera intéressant d'étudier comment en période exceptionnel s'effectuent la concentration des pouvoirs tout en préservant le principe de séparation des pouvoirs.