Histoire de l'architecture domestique à Québec sous le Régime français (1655-1755)

par Frédérik Guerin

Projet de thèse en Histoire de l'art

Sous la direction de Émilie D'orgeix et de Pierre-Édouard Latouche.

Thèses en préparation à l'Université Paris sciences et lettres en cotutelle avec l'Université du Québec à Montréal , dans le cadre de École doctorale de l'École pratique des hautes études (Paris) , en partenariat avec Histoire de l'art, des représentations et de l'administration dans l'Europe moderne et contemporaine (laboratoire) et de École pratique des hautes études (Paris ; 1868-....) (établissement opérateur d'inscription) depuis le 31-08-2018 .


  • Résumé

    L'architecture domestique à Québec sous le Régime français, depuis sa fondation (1608) jusqu'à la Conquête britannique (1759), possède une histoire somme toute brève, mais néanmoins relativement intense et complexe, sise dans une agglomération qui passe rapidement d'un village à une ville stratégique à la hauteur de son statut de capitale coloniale, par ses institutions, son enceinte et son envergure, en à peine quelques années. De la même manière, il apparaît possible que la maison urbaine se transformerait elle aussi au niveau formel, dans son apparence extérieure comme dans sa structure et son aménagement, reflet sans doute des changements de mentalités et des bouleversements socioéconomiques qui marquent le XVIIe siècle et la première moitié du XVIIIe siècle. Si un ou deux facteurs explicatifs pour en expliquer l'origine ont déjà été avancés, on a souvent conclut trop rapidement de et façon unidimensionnelle, sans regarder la ville et les probables transformations dans leur totalité, faute de données suffisantes. Notre projet de doctorat porte sur la période située entre 1655 et 1755. Cette dernière voit d'importantes transformations s'opérer, particulièrement après le tournant du début du XVIIIe siècle. En effet, avant cette époque, la maison urbaine type de cette ville est généralement en bois, sur un niveau ou un niveau et demi (étage de combles aménagé), les portes et fenêtres sont décorées de généreuses moulures et la toiture, souvent mansardée, c'est-à-dire « brisée » en deux pentes, est supportée par une lourde structure, la charpente. En quelques dizaines d'années, cette maison va laisser sa place à un modèle légèrement plus standardisé, soit celui d'une maison en pierre généralement à deux niveaux, sans boiseries extérieures, dont les murs pignons sont saillants (et de ce fait coupe-feu) et la charpente de toit assez simplifiée. Selon l'historiographie de l'architecture québécoise, il fait à peu près consensus que ces changements se sont opérés suite à la mise en place d'une série de règlements d'urbanisme « anti-incendies », dont la quasi-totalité découle des ordonnances promulguées par les intendants (et parfois les gouverneurs) en poste, et qui agissent, surtout au XVIIIe siècle, sous le conseil des ingénieurs militaires. Il est sans doute fort probable que les ordonnances portant sur l'urbanisme et la construction, dont surtout celle de 1721 de l'intendant Bégon et celle de 1727 de l'intendant Dupuy, ont pu avoir a minima une certaine influence sur l'aspect des résidences. Mais à notre avis, regarder les transformations de l'habitat à Québec uniquement à travers le filtre du cadre réglementaire est une façon de se limiter à une seule dimension d'un objet d'étude fort complexe dont la forme dépend vraisemblablement d'une multitude de facteurs, grands comme petits, et peut-être parfois contradictoires. C'est pour cette raison que nous voulons ajouter surtout deux grandes variables à l'analyse : d'une part, celle du « goût » architectural (entre classicisme et vernaculaire) et des « nouvelles sensibilités » (confort, relations interpersonnelles), de l'autre celles des considérations « pratiques » et « socioéconomiques ». Notons que l'urbanisme qu'appliquent les ingénieurs militaires à la ville est également considéré à travers ses deux aspects. Dans l'architecture domestique ordinaire, ces notions s'entremêlent parfois très étroitement et subtilement, mais ils ne restent pas moins, selon nous, les clés de lecture essentielles à dégager pour avoir une compréhension plus globale et complète.

  • Titre traduit

    History ou domestic architecture in Quebec city during the French Regime (1655-1755)


  • Résumé

    Domestic architecture in Quebec under the French Regime, from its founding (1608) until the British Conquest (1759), has a short history, but nevertheless relatively intense and complex, located in an agglomeration which quickly passes from a village to a strategic city up to its status of colonial capital, by its institutions, its enclosure and its scale, in just a few years. In the same way, it appears possible that the urban house would also transform at the formal level, in its external appearance as well as in its structure and its layout, undoubtedly reflecting the changes in mentalities and the socioeconomic upheavals that marked the 17th century and the first half of the 18th century. If one or two explanatory factors to explain the origin have already been put forward, we have often concluded too quickly in a one-dimensional way, without looking at the city and the probable transformations in their entirety, for lack of sufficient data. Our doctoral project covers the period between 1655 and 1755. This period saw important transformations take place, particularly after the turn of the early 18th century. Indeed, before this time, the typical urban house of this city was generally made of wood, on one level or one and a half levels (livable attic floor), the doors and windows were decorated with generous moldings and the roof, often with sloping ceilings, that is to say 'broken' into two slopes, is supported by a heavy wooden structure, the roof frame or 'charpente'. In a few decades, this house will give way to a slightly more standardized model, that of a stone house generally on two levels, without exterior woodwork, whose gable walls are protruding (and therefore cut). fire) and the fairly simplified roof frame. According to the historiography of Quebec architecture, there is almost a consensus that these changes took place following the establishment of a series of “fire-fighting” urban planning regulations, almost all of which stem from the ordinances promulgated by the intendants (and sometimes the governors) in office, and which act, especially in the 18th century, under the advice of military engineers. It is undoubtedly very probable that the ordinances relating to town planning and construction, especially the one of 1721 by Intendant Bégon and the one of 1727 by Intendant Dupuy, may have had at least a certain influence on the appearance of residences. But in our opinion, looking at the transformations of the habitat in Quebec only through the filter of the regulatory framework is a way of limiting oneself to a single dimension of a very complex object of study whose shape probably depends on a multitude. factors, large and small, and perhaps sometimes contradictory. It is for this reason that we especially want to add two major variables to the analysis: on the one hand, that of architectural “taste” (between classicism and vernacular) and of “new sensibilities” (comfort, interpersonal relationships), on the other those of 'practical' and 'socio-economic' considerations. Note that the town planning applied by military engineers to the city is also considered through its two aspects. In ordinary domestic architecture, these notions are sometimes very closely and subtly intertwined, but they are nonetheless, in our opinion, the essential reading keys to be identified in order to have a more global and complete understanding.