Etude des liens entre les troubles psychopathologiques et le fonctionnement cognitif d’adultes placés sous main de justice.

par Romain Deperrois

Projet de thèse en Psychologie

Sous la direction de Nicolas Combalbert.

Thèses en préparation à Tours , dans le cadre de Sciences de l'Homme et de la Société depuis le 07-11-2017 .


  • Résumé

    Très peu de recherches se sont intéressées à la santé physique et mentale des détenus alors que l’on compte à ce jour près de 70 000 personnes incarcérées dans les établissements pénitentiaires français (Direction de l’administration pénitentiaire, 2017). La littérature scientifique internationale montre pourtant que l’état de santé des personnes écrouées est bien plus altéré que celui des personnes de même âge et de même condition issues de la population générale (Fazel, 2011 ; Hayes et al., 2012 ; Thomas, Fovet, & Amad, 2015). Il semblerait également qu’une majorité des délinquants qui sont condamnés à des peines d’emprisonnement souffrent de trouble mental et/ou de déficit neurocognitif (Verdun-Jones & Butler, 2013). Plusieurs études récentes menées en France sur des détenus âgés de 50 ans et plus mettent en évidence, chez cette frange de la population pénale, une prévalence élevée de troubles psychiatriques et un risque important de développer des démences neurodégénératives (Combalbert, Pennequin & Ferrand, 2016). Ces constats soulignent la nécessité d’étudier les liens entre le fonctionnement cognitif des adultes détenus et les troubles psychopathologiques, notamment les troubles émotionnels. En effet, sur le plan théorico-clinique, il est établi que les émotions ont un lien avec l’activité cognitive tant chez le sujet pathologique que non pathologique (Lau, Pettit & Creswell, 2013). Selon les théories de l’évaluation cognitive (Lazarus, 1991) et la théorie cognitive de Beck (1976), les émotions d’un individu sont liées à son fonctionnement cognitif et notamment aux distorsions cognitives qu’il peut produire. Les distorsions cognitives sont des erreurs d’interprétation des données qui proviennent de l’individu lui-même (sensations physiologiques) ou de l’environnement et qui correspondent à des erreurs de raisonnement. Dans les modèles cognitifs de psychopathologie (Beck, 1976 ; 1995 ; Ellis, 1958, 1962), les troubles émotionnels (comme l’anxiété et la dépression, etc.) seraient liés à une façon de penser erronée, c’est-à-dire à des cognitions, distorsions cognitives et schémas inadaptés. Ils correspondent à des attitudes, pensées et croyances, fausses ou erronées, qui entraînent le sujet à percevoir les événements de façon inappropriée et à attribuer des significations négatives à leurs expériences (Kendall, 1991). Toutefois, les liens entre les distorsions cognitives et les troubles psychopathologiques en général sont rarement bien identifiés dans les études empiriques disponibles. De même, peu d’études se sont intéressées au lien existant entre les distorsions cognitives et à la régulation émotionnelle (Joorman & Stanton, 2016). Il est pourtant probable que, chez les personnes détenues, le processus de régulation émotionnelle, à savoir les stratégies cognitives mises en œuvre afin de réduire, maintenir ou augmenter les réponses émotionnelles, soit fortement perturbé par certains types de distorsions cognitives. Cette recherche vise trois objectifs : 1) Etudier le profil des distorsions cognitives (type, fréquence et degré de certitude) en population carcérale et en population générale. 2) Evaluer l’effet des distorsions cognitives sur les troubles psychopathologiques en population carcérale et en population générale. 3) Etudier les liens entre les profils de distorsions cognitives et le type de régulation émotionnelle en population carcérale et en population générale. Cette recherche revêt également un caractère applicatif dans la mesure où elle doit permettre d’améliorer les dispositifs de dépistage des troubles psychiatriques et neurocognitifs en milieu carcéral et d’ajuster les protocoles de soins et de traitement médicopsychologique des détenus.


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