Projet de thèse en Lettres Classiques
Sous la direction de Elisabeth Gavoille.
Thèses en préparation à Tours , dans le cadre de Sciences de l'Homme et de la Société depuis le 29-11-2017 .
La littérature ancienne se plaît à montrer l’activité que déploient certains êtres à vivre aux dépens d’autrui : pique-assiette, flatteur et plaisantin, médecin ou philosophe qui ne songent qu’à être admis à la table d’un riche. Ce type humain du parasite occupe une place de choix dans le théâtre comique latin, dont le corpus comprend non seulement les pièces de Plaute et de Térence, mais aussi les fragments de togatae (Titinius, Afranius) et d’atellane. Pourquoi une telle récurrence ? Quelle fonction ce rôle assure-t-il dans ces œuvres, et quel plaisir procure-t-il au spectateur ou au lecteur ? Un premier axe consistera à étudier la figure du parasite en tant que rôle codifié dans la comédie latine. On s’intéressera d’abord à ses origines et fondements : tradition littéraire (Comédie moyenne et nouvelle, Caractères de Théophraste, satire) et réalités sociales comme celles du “client” romain. On s’attachera à sa caractérisation visuelle et verbale (costume et accessoires, code gestuel et chorégraphique, motifs de discours et “sentences”) et on examinera ses déclinaisons singulières à travers les personnages des différentes pièces, en se penchant notamment sur le couple qu’il forme volontiers avec le soldat fanfaron. Cela amènera à déterminer la fonction dramatique et spectaculaire du parasite : en charge de scènes hautes en couleur et animées (monologues d’entrée et danses de la faim qui mettent en œuvre la convention comique, avec parfois une dimension métathéâtrale), il peut aussi assumer la fonction d’adjuvant voire de meneur de jeu, à la place de l’esclave rusé. On voit là une figure accueillante aux autres rôles, qui frappe par sa plasticité, l’étendue de ses capacités de métamorphose, ses aptitudes au jeu sur le code théâtral : incarnant les vices de la bouche (gourmandise et bavardage), il est plaintif et nostalgique, bouffon à l’ancienne mode ou théoricien de l’art parasitique, toujours ingénieux et fécond en paroles gnomiques. Le parasite est adaptable pour l’auteur comique comme il l’est dans la définition même du personnage, et s’avère particulièrement productif, une sorte de Protée de la scène comique. Il s’agira enfin d’explorer la fonction éthique, au sens large, de cette figure volubile, dont les tirades constituent autant de morceaux de bravoure. Le parasite prétend dire la vérité des rapports sociaux (la nécessité de la dépendance, la pertinence de l’adulation), et de ce point de vue son rôle est comparable à celui de l’esclave (en face duquel il incarne la servitude volontaire) mais aussi de la courtisane effrontée et cynique (proximité avec la richesse et exploitation de la bêtise d’autrui). On précisera à quelles sources philosophiques il puise son discours – par exemple propos sur l’origine des savoirs (le manque stimule l’inventivité et l’indigence est “mère des arts”), ou théorie de la flatterie qui fait peut-être écho au Gorgias de Platon. Et l’on mesurera en quoi il a pu à son tour donner lieu à des analyses philosophiques – ainsi chez Cicéron, pour la distinction entre amitié véritable et complaisance obséquieuse.
Pas de résumé disponible.