Thèse soutenue

Essais sur les inégalités et la migration : une perspective post-coloniale et globale

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Auteur / Autrice : Yajna Govind
Direction : Thomas PikettyMarion Leturcq
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences économiques
Date : Soutenance le 01/10/2021
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale d'Économie (Paris)
Jury : Président / Présidente : Hillel Rapoport
Examinateurs / Examinatrices : Hillel Rapoport, Johan Fourie, Ioana Marinescu, Janet C. Gornick
Rapporteurs / Rapporteuses : Johan Fourie, Ioana Marinescu

Résumé

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Cette thèse s'intéresse aux liens complexes entre les inégalités, la migration et la colonisation.Le premier chapitre s'intéresse à l'effet causal de la naturalisation sur l'intégration des étrangers sur le marché du travail. Il est connu qu'une meilleure intégration est bénéfique tant pour les migrants que pour le pays d'accueil. À cet égard, l'octroi de la citoyenneté pourrait être une politique importante pour stimuler l'intégration des migrants. Dans ce chapitre, j'analyse l'impact causal de l'obtention de la citoyenneté sur l'intégration des migrants sur le marché du travail. J'exploite un changement dans la loi de naturalisation par mariage en France en 2006. Cette réforme a modifié les critères d'éligibilité des candidats en augmentant le nombre d'années de vie conjugale requis de 2 à 4 ans. En utilisant des données administratives de panel et une approche de différence-de-différences, j'estime le rendement de la naturalisation sur le marché du travail. Je constate que, parmi les personnes qui travaillent, la citoyenneté entraîne une augmentation des revenus annuels. Je montre aussi que la naturalisation contribue à réduire l'emploi informel et la discrimination.Le deuxième chapitre étudie l'évolution post-coloniales de l'inégalité des revenus. Les recherches récentes sur l'héritage colonial en termes d'inégalité se sont principalement concentrées sur des anciennes colonies actuellement indépendantes, négligeant les quelques territoires qui ont été assimilés par leurs anciens colonisateurs. Ce chapitre analyse l'inégalité post-coloniale dans quatre de ces territoires : La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane. En m'appuyant sur un nouvel ensemble de données sur l'impôt sur le revenu constitué dans ce chapitre, j'étudie l'évolution de l'inégalité des revenus depuis leur décolonisation en 1946 jusqu’à présent. Les résultats de la part des revenus des 1% supérieurs reflètent un déclin rapide de l'inégalité depuis la décolonisation et une stabilisation au cours de la dernière décennie. Malgré le rattrapage général des départements d'outre-mer, la part des 10 % de revenus les plus élevés est restée constamment supérieure à celle de la métropole. En allant plus loin, j'étudie le clivage sous-jacent : le clivage métropole-natifs. En utilisant des données administratives, je montre que les métropolitains sont surreprésentés dans le haut de la distribution et qu'il existe une "prime de revenu métropolitaine" dans les départements d'outre-mer, même après avoir pris les caractéristiques observables en compte.Le troisième chapitre est un travail en collaboration avec Luis Bauluz, Filip Novokmet, et Daniel Sanchez Ordonez et vise à mesurer l'inégalité des terres dans plusieurs pays à travers différentes régions. Les estimations existantes de l'inégalité des terres, basées sur les données du recensement agricole, mesurent la distribution des exploitations agricoles. Elles ne reflètent ni les inégalités de la possession des terres, ni les inégalités de la valeur des terres et, souvent, elles ne tiennent pas compte de la population sans terre. Dans ce chapitre, nous abordons ces questions et fournissons des estimations nouvelles et cohérentes de l'inégalité des terres entre les pays, basées sur des enquêtes auprès des ménages. Nous montrons que i) l'inégalité de la valeur peut différer considérablement de l'inégalité de la superficie des terres, ii) les différences dans la proportion de sans-terre entre les pays varient considérablement, ce qui affecte fortement les estimations de l'inégalité et, iii) les niveaux d'inégalité régionaux selon notre métrique de référence contredisent les estimations existantes des recensements agricoles. Dans l'ensemble, l'Asie du Sud et l'Amérique latine présentent les inégalités les plus fortes, les 10 % de propriétaires fonciers les plus importants s'appropriant jusqu'à 75 % des terres agricoles, suivies de l'Afrique et de l'Asie "communiste", avec des niveaux d'environ 55-60 %.