Thèse soutenue

Recettes arabes, pratiques juives et patrimoine culinaire de la péninsule Ibérique depuis le XIIe siècle

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Auteur / Autrice : Hélène Piñer
Direction : Bruno Laurioux
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance le 23/11/2019
Etablissement(s) : Tours
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Humanités et Langues (Centre-Val de Loire ; 2018-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'études supérieures de la Renaissance (Tours ; 1956-....)
Jury : Président / Présidente : François-Olivier Touati
Examinateurs / Examinatrices : Emmanuelle Tixier du Mesnil, Nathalie Peyrebonne
Rapporteurs / Rapporteuses : Daniel Newman, Claude Denjean

Résumé

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Ma thèse intitulée « Recettes arabes, pratiques juives et patrimoine culinaire de la péninsule Ibérique depuis le XIIᵉ siècle », s’inscrit dans un fort courant de renouvellement des études sur l’alimentation des pays de l’Islam entre le XIIᵉ et XVᵉ siècle, notamment à partir des livres de cuisine. Après les études pionnières de M. Rodinson, A. Huici Miranda, L. Bolens et R. Arié, puis les premières synthèses de B. Rosenberger, M. Marín ou E. García Sánchez, les problématiques des Food Studies appliquées aux différentes sources anciennes écrites en arabe suscitent un réel intérêt. Aucune thèse en cours n’est cependant centrée sur le problème spécifique des multiculturalités alimentaires, notamment entre les trois religions du Livre ayant coexisté en péninsule Ibérique, tant dans l’Islam médiéval qu’ensuite sous domination chrétienne. C’est précisément une étude sur la longue durée qui a permis de mettre en évidence la notion de patrimoine culinaire. Le point de départ a été l’analyse des deux seuls réceptaires connus pour l’Islam médiéval occidental, le Kitāb al-ṭabīẖ et le Fuḍālat al-ẖiwān, qui comptabilisent plus d’un millier de recettes écrites en arabe. Les études menées sur onze livres de cuisine rédigés sous domination chrétienne du XIVᵉ au XVIIIᵉ siècle, ont été complétées grâce aux procès de l’Inquisition, qui regorgent d’indices relevant des pratiques culinaires des juifs, des pratiques qui apparaissent systématiquement en relation avec les préceptes religieux du judaïsme. Les six sources littéraires choisies pour la même période recèlent également de précieuses informations sur les usages, les pratiques alimentaires et les plats consommés par les juifs. Leur analyse a révélé l’utilisation de procédés littéraires -ironie, accumulation, etc.- en lien avec l’alimentation afin d’identifier et de caractériser une communauté. L’étude des dictionnaires anciens a également permis de mesurer l’évolution (ou non) sur la longue durée de la définition donnée à un plat. Par conséquent, le croisement de ces sources hétérogènes a permis, au final, de confirmer l’existence d’une cuisine juive qui, jusque-là, n’avait été que simplement évoquée par la présence de six recettes explicitement juives dans le Kitāb al-ṭabīẖ. Elles ont également mis en évidence la place primordiale qu’a occupée la religion dans la construction du patrimoine culinaire de l’Espagne actuelle. Une religion qui apparaît de ce fait comme la pierre de touche de la transmission et de la permanence des recettes et des pratiques alimentaires. Cette réalité se vérifie aussi par la permanence dans le patrimoine culinaire du Maroc actuel d’un nombre important de recettes arabes qui, globalement, restent inchangées. On peut faire la même constatation pour le patrimoine culinaire des séfarades dont la diaspora s’est établie dans les pays du bassin méditerranéen. Le premier résultat de la thèse est de montrer comment les inter et multiculturalités ont contribué à construire le patrimoine culinaire de l’Espagne actuelle. L’autre résultat a été de mettre en évidence l’existence d’un patrimoine culinaire juif qui se manifeste dans la permanence de recettes et de préparations qui sont toujours consommées, mais se dévoile encore davantage au travers des pratiques culinaires qui lui sont propres.