Influence des médicaments immunosuppresseurs (6-mercaptopurine, acide mycophénolique et rapamycine) sur la reprogrammation métabolique des lymphocytes T

par Ana Fernandez ramos

Thèse de doctorat en Pharmacologie

Sous la direction de Marie-anne Loriot-landau.

Thèses en préparation à Sorbonne Paris Cité , dans le cadre de École doctorale Médicament, toxicologie, chimie, imageries .


  • Résumé

    En cas d¿activation, les lymphocytes T opèrent un processus de reprogrammation métabolique qui favorise la prolifération, la polarisation et la différenciation cellulaire. Cette conversion métabolique est coordonnée par des « checkpoints » métaboliques, principalement Myc, HIF-1¿, PI3K/Akt, AMPK et mTOR. La 6-mercaptopurine (6-MP), l¿acide mycophénolique (MPA) et la rapamycine (Rapa) sont des médicaments immunosuppresseurs et antiprolifératifs prescrits dans les maladies auto-immunes, inflammatoires, en prévention du rejet de transplant et dans la leucémie aiguë lymphoblastique de l¿enfant (6-MP). Alors que l¿¿inhibition de mTOR par la rapamycine est bien connue, l¿impact de ces molécules sur la reprogrammation métabolique lymphocytaire reste à établir. L¿objectif de ce travail de thèse est de caractériser les modifications du métabolisme énergétique dans des lymphocytes T humains en prolifération (lignée Jurkat) sous l¿influence de la 6-MP, le MPA et la Rapa. Nous avons identifié une signature transcriptomique spécifique de chacune de ces molécules ciblant les enzymes et transporteurs impliqués dans la glycolyse, la glutaminolyse, et la synthèse des nucléotides, suggérant que ces médicaments ont des effets différentiels sur le métabolisme cellulaire. La 6-MP induit une diminution des concentrations intracellulaires en ATP, suivie d¿une activation du senseur énergétique AMPK. La cible d¿AMPK, mTOR, est inhibée par la 6-MP, et l¿expression de HIF1¿ et Myc est également réduite. La conséquence fonctionnelle de cette inhibition est une réduction significative des flux glycolytique et glutaminolytique, en l¿absence d¿effet sur le transport intracellulaire du glucose. Le MPA est responsable d¿une diminution transitoire des concentrations intracellulaires en ATP, en lien avec une inhibition de la synthèse des bases puriques, entraînant l¿activation d¿AMPK. On observe une réduction des flux glycolytique et glutaminolytique sous MPA, associée avec une diminution du transport intracellulaire du glucose. Le MPA et la Rapa réduisent le flux de la glycolyse aérobie et la production de lactate. Enfin, l¿expression de HIF1-¿ et Myc, est également réduite par ces deux molécules. En conclusion, la 6-MP, le MPA et la Rapa modifient profondément le métabolisme énergétique des lymphocytes T en prolifération, en provoquant un stress énergétique, en réduisant les flux glycolytique et glutaminolytique, et en inhibant les « checkpoints » métaboliques HIF-1¿ et Myc. Ces résultats originaux pourraient constituer le rationnel pour la mise au point de stratégies thérapeutiques innovantes, notamment avec des combinaisons de molécules ciblant spécifiquement le métabolisme énergétique cellulaire à des fins antiprolifératives et immunosuppressives.

  • Titre traduit

    Effects of immunosuppressive drugs (6-mercaptopurine, mycophenolic acid and rapamycin) on T lymphocytes metabolic reprogramming


  • Résumé

    T cells undergo rapid metabolic reprogramming to support proliferation and to shape polarization and function. This metabolic switch is mainly regulated by the metabolic checkpoints Myc, HIF-1¿, PI3K/Akt, AMPK and mTOR. The antiproliferative and immunosuppressive molecules 6-mercaptopurine (6-MP), mycophenolic acid (MPA) and rapamycin (Rapa) are prescribed in autoimmune diseases, inflammatory bowel diseases, to avoid organ rejection after transplantation and in acute lymphoblastic leukemia. Whether these molecules impact proliferating T cell metabolic reprogramming is unknown. The objective of this thesis is to provide a comprehensive characterization of the changes in energetic metabolism that occurs in proliferating T cells (Jurkat cell line) after treatment with 6-MP, MPA and Rapa. We identified a drug-specific transcriptome signature consisting of the key enzymes and transporters involved in glycolysis, glutaminolysis or nucleotide synthesis, resulting from significantly different effects on metabolic reprogramming. 6-MP rapidly reduces intracellular ATP concentration, leading to the activation of AMPK. In turn, mTOR, an AMPK target, was inhibited, and the expression of HIF-1¿ and Myc was reduced upon 6-MP incubation. As a consequence of these inhibitions, glucose and glutamine fluxes were strongly reduced. No difference was observed on glucose uptake upon exposition to 6-MP. MPA produced an early and transient drop in the intracellular ATP content related to the inhibition of de novo synthesis of purines, leading to the activation of the energy sensor AMPK. The analysis of the glycolytic or glutaminolytic fluxes indicated that MPA decreases glycolytic flux, consistent with a reduction in glucose uptake, but also in the oxidation of glutamine. In addition, MPA and Rapa reduce aerobic glycolysis and lactate production. Consistent with this global shutdown in glycolysis and glutaminolysis, the expression of HIF-1¿ and Myc, promoting the activation of glycolysis and glutaminolysis, was inhibited by MPA and Rapa. In conclusion, 6-MP, MPA and Rapa profoundly impacts the cellular metabolism of proliferating T cells by generating an energetic distress, decreasing the glycolytic and glutaminolytic fluxes and by targeting the metabolic checkpoints HIF-1¿ and Myc. These findings open interesting perspectives for novel combinatorial therapeutic strategies targeting metabolic checkpoints to block the proliferation of T cells.