Thèse de doctorat en Littératures et civilisations comparées
Sous la direction de Carole Ksiazenicer-Matheron et de Luba Jurgenson.
Thèses en préparation à Paris 3 , dans le cadre de École doctorale Littérature française et comparée (Paris) , en partenariat avec Centre d'études et de recherches comparatistes (Paris) (laboratoire) depuis le 14-11-2014 .
Cette thèse s’attache à réfléchir à quelques-unes des stratégies mises en place par le roman yiddish et russe face aux mutations profondes des sociétés représentées entre 1920 et 1945 : l’élaboration d’une politique du féminin, à même de rendre la complexité de la représentation de l’histoire et de la modernité. Elle étudie ce phénomène dans onze romans de sept auteurs et autrices (Evgenij Zamâtin, Moyshe Kulbak, Andrej Platonov, Israël Joshua Singer, Bashevis Singer, Esther Kreitman et Lidiâ Čukovskaâ), répondant au dispositif littéraire choisi, à savoir la fiction narrative romanesque à la troisième personne. Il s’agit d’étudier les différents modes d’apparition des figures féminines et les rôles diégétiques, narratifs, esthétiques et symboliques qu’elles tiennent dans les œuvres, afin de déterminer la place qu’elles occupent dans l’élaboration d’un discours sur les crises historiques, et sur la crise de la modernité, par le truchement de constructions culturelles qu’elles participent à nourrir. Si leur existence dans la diégèse favorise déjà une représentation complexe du réel, leurs voix encouragent des formes de contrepoint narratif à même de renverser les hiérarchies discursives établies. Mais c’est véritablement parce qu’elles incarnent des discours qu’elles permettent l’établissement d’une politique des corps féminins. Traversés par la rupture, l’horreur, l’Apocalypse ou le sacrifice, ces corps sont aussi ceux de l’avènement d’un autre sens, fondamentalement incertain. Le féminin n’est pas tant subversif qu’espace tiers de la contestation, autre mode d’appréhension de la modernité entre 1920 et 1945 en Europe centrale et orientale.
Voices in crisis, bodies of the crisis. Female characters in the Russian and Yiddish novel between 1920 and 1945. Yevgeny Zamyatin, Moyshe Kulbak, Andrei Platonov, Israel Joshua Singer, Isaac Bashevis Singer, Esther Kreitman, Lydia Chukovskaya
This dissertation aims at analyzing some of the strategies used by the Yiddish and Russian novels between 1920 and 1945, in a time when the societies they depicted were facing profound changes: one of these strategies resides in using the feminine as a political trope, expressing the complexity of the representation of history and modernity. The present work will focus on eleven novels by seven authors (Evgenij Zamâtin, Moyshe Kulbak, Andrej Platonov, Israel Joshua Singer, Bashevis Singer, Esther Kreitman and Lidiâ Čukovskaâ). All these novels are third-person narrations. Our main purpose is to study different ways in which female figures appear and play diegetic, narrative, aesthetic and symbolic roles. This will help us to understand how these female characters contribute to the building of a discourse on historical crises and on the crisis of modernity; how they are shaped by cultural constructions that they shape and enrich in return. The presence of female characters in the plot favors a complex representation of reality. More than that, their voices work as narrative counterpoints, subverting the established discursive hierarchies. If they are able to establish a politics of female bodies, it is because they, firstly, embody discourses. As places where horror, rupture, sacrifice or apocalyptic events are frequently staged, these bodies allow for the advent of a new frame of meaning, governed by uncertainty. More than a subvertive device, the feminine appears as an alternative space for contestation, allowing for another stance on modernity between 1920 and 1945 in Central and Eastern Europe.