Thèse en cours

L'ACADÉMIE ROYALE D'ARCHITECTURE, L'INNOVATION STÉRÉOTOMIQUE ET LES CORPORATIONS DE LA CONSTRUCTION, DE PHILIBERT DELORME À FREZIER

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Auteur / Autrice : Luc Tamborero
Direction : Maurizio Brocato
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Architecture
Date : Inscription en doctorat le 01/10/2008
Etablissement(s) : Paris Est
Ecole(s) doctorale(s) : VTT - Ville, Transports et Territoires

Résumé

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L'Académie royale d'architecture, l'innovation stéréotomique et les corporations de la construction, de Philibert Delorme à Frezier Le sujet de thèse présenté ici s'inscrit dans la double continuité de mon parcours professionnel de compagnon tailleur de pierre et de mon mémoire de Master à l'EHESS. Dans le mémoire présenté pour l’obtention du Master de l’EHESS, j’ai analysé les traités de coupe des pierres de Delorme à de La Hire. Cette étude m'a permis de mettre en évidence les transferts de méthode géométrique entre les tracés de gnomonique et ceux de stéréotomie. Problématique J'ai alors formulé un certain nombre de questions qui portent sur l'importance de la stéréotomie dans la formation des architectes et des ingénieurs du roi et les conséquences de cette formation sur la production du bâti. On peut en effet noter une situation paradoxale : au moment où architectes et maçons ont à leur disposition, essentiellement par l'intermédiaire de Philippe de La Hire, un outil géométrique performant qui leur permettrait d’élargir l’éventail de leurs possibilités dans le champ de l’architecture clavée, ils ne s’en servent pas directement. L’Académie crée un outil conceptuel sans utiliser tout son potentiel architectural. On retrouverait donc, de ce point de vue, avec la création de l'Académie une situation assez similaire à celle que l'on connaîtra avec la création de la géométrie descriptive de Monge à la fin du XVIIIème siècle. Si l’importance des travaux de De La Hire sur la statique des voûtes a déjà fait l’objet de nombreuses études (Benvenuto [1981], Heymann [1995], Becchi |2002]), la relation entre ces analyses statiques et la stéréotomie n’a pas fait l’objet d’études circonstanciées. C’est à notre avis dans une analyse fine de ces relations que l’on pourra trouver l'explication du paradoxe qui vient d’être évoqué. De plus, si le manuscrit de stéréotomie de Philippe de La Hire, professeur puis directeur de l’Académie d’Architecture, est naturellement bien connu (Pérouse [2000] ; Becchi [2002]), son cours à l'Académie, professé dès 1688, n’a fait l’objet d’aucune étude bien qu'il soit conservé dans le fonds ancien de l'École Nationale des Ponts et Chaussées. Son analyse permettra sans doute de répondre à un certain nombre de questions clés de cette histoire. De La Hire met-il en place une nouvelle stéréotomie, un nouveau catalogue des possibles par rapport aux formes proposées par la corporation des tailleurs de pierre, grâce aux nouveaux outils géométriques qu’il a à sa disposition ? Il y aurait-il une contradiction entre son approche géométrique et ses études portant sur la statique des voûtes? Ses premières modélisations du comportement structurel des voûtes, qui marquent la naissance des sciences de la construction, n'auraient-elle pas dans un certain sens paralysé l'invention créative des architectes, qui ne s'autoriseraient plus, ou qui ne seraient plus autorisés par l'Académie à mettre en œuvre des voûtes dont ils ne maîtrisent plus la statique et donc qui sortent des formes géométriques régulières? Si la réponse à cette question est positive, l'Académie d’Architecture serait à la fois vecteur de modernité au niveau du trait, et vecteur de conservatisme au niveau de la forme construite, mais pour des raisons constructives et non pour des raisons esthétiques comme cela a toujours été affirmé. De plus, l’Académie aurait ainsi trouvé un outil conceptuel qui lui permet d’assurer la suprématie des architectes sur la corporation des maçons. Elle crée son langage, sa géométrie, une coupe des pierres scientifique et elle la transmet, préfiguration de la stéréotomie scientifique qui va se développer à l'école du génie de Mézières durant la seconde moitié du XVIIIème siècle. Par ailleurs, si les formes des voûtes restent régulières, les tailleurs de pierre possèdent déjà le patrimoine géométrique nécessaire à leur réalisation et ils ne cherchent pas à maîtriser un outil géométrique plus complexe dont ils n’ont pas besoin, outil géométrique qui sera au contraire repris et développé par les charpentiers.