Thèse soutenue

Aux interstices de l'État et du marché : sociologie politique de la régulation publicitaire en France

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Auteur / Autrice : Keyvan Ghorbanzadeh
Direction : Nicolas Hubé
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Science politique
Date : Soutenance le 10/10/2023
Etablissement(s) : Paris 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de science politique (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre européen de sociologie et de science politique (Paris ; 2010-....)
Jury : Président / Présidente : Érik Neveu
Examinateurs / Examinatrices : Nicolas Hubé, Antoine Vauchez, Caroline Ollivier-Yaniv
Rapporteurs / Rapporteuses : Vincent Dubois, Ève Fouilleux

Mots clés

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Résumé

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Cette thèse propose de questionner les transformations de l’action publique à partir de l’analyse d’une agence de régulation qui, bien qu’entièrement privée, monopolise pourtant le contrôle des publicités en France. L’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) existe, sous différents noms, depuis 1935. Depuis 1991, date de la délégation du dernier dispositif public de régulation, c’est elle qui détermine les normes puis contrôle la grande majorité des publicités diffusées en France. Pour une diversité d’acteurs (ONG, associations, parlementaires, fonctionnaires, chercheurs, etc.) le fait que l’ARPP soit administrée par les professionnels qu’elle revendique de réguler fait d’elle une institution « juge et partie », donc illégitime. Pour autant, si ces acteurs critiques se mobilisent régulièrement auprès de l’État pour demander la création d’une institution publique de régulation, cette piste est systématiquement rejetée et la légitimité de l’ARPP est réaffirmée par les pouvoirs publics. À rebours des approches postulant que la non-intervention publique ou une législation favorable aux acteurs économiques serait uniquement le produit du lobbying des acteurs privés ou de leurs conflits d’intérêts avec les acteurs publics, la thèse montre que l’autonomie de l’ARPP procède de son inscription aux interstices des espaces bureaucratique, économique, associatif et académique. Ce travail s’inscrit au croisement de la sociologie de l’action publique, de la littérature sur l’hybridation des intérêts publics et privés, et des travaux sur les transformations de la régulation politique. Dans leurs sillages, la thèse montre comment le jeu à la frontière de l’ARPP lui permet de construire un dispositif de contrôle isomorphique à celui d’une agence publique et ainsi d’assurer sa légitimité auprès de l’État. Cette dynamique est rendue possible par l’important volume de capital bureaucratique de l’institution et par sa capacité à construire des dispositifs de neutralisation des intérêts des professionnels par l’engagement d’acteurs extérieurs (publics, associatifs, académiques). S’appuyant sur une soixantaine d’entretiens, des observations et un travail prosopographique, la thèse propose d’analyser l’ARPP comme l’épicentre d’un champ de régulation publicitaire. Au sein de ce champ, la capacité de l’APPP à hybrider ses intérêts et ses capitaux avec ceux des autres acteurs engagés lui permet de monopoliser le contrôle des publicités et de s’imposer comme l’acteur dominant la définition des normes guidant le contrôle. Au-delà de cet objet hybride, cette thèse aspire donc à enrichir la réflexion sur l’action publique-privée et sur la reconfiguration de la frontière entre ces deux espaces.