Thèse soutenue

Les peintres de Salon et le succès : réputations, carrières et reconnaissance artistiques après 1848

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Auteur / Autrice : Claire Dupin de Beyssat
Direction : France NerlichSéverine Sofio
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire de l'Art
Date : Soutenance le 08/02/2022
Etablissement(s) : Tours
Ecole(s) doctorale(s) : Humanités et Langues - H&L
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Interactions, transferts, ruptures artistiques et culturels (Tours)
Jury : Président / Présidente : Stéphanie Sauget
Examinateurs / Examinatrices : Isolde Pludermacher
Rapporteurs / Rapporteuses : Alain Bonnet, Béatrice Joyeux-Prunel

Résumé

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Cette thèse interroge les diverses voies menant au succès artistique, en France, dans la seconde moitié du XIXe siècle, en s'appuyant sur la population des artistes médaillés au Salon entre 1848 et 1880 dans la section « Peinture ». Au vu de la diversité de leur parcours et de l'hétérogénéité esthétique de leurs envois, une question émerge : comment se fait-il que des œuvres - les carrières et la production - aussi différents dans leurs caractéristiques, et par extension dans les modalités d'appréciation qu'ils convoquent, aient pu accéder à la reconnaissance ? La première partie étudie la manière dont se fonde et s'articule l'autorité des deux principales instances de reconnaissance au Salon : le jury et la critique d'art. À l'aide des archives de l'administration des beaux-arts et d'une prosopographie des membres du jury de récompense, le chapitre 1 expose les ambitions, les prérogatives et la légitimité de la médaille, afin de comprendre le rôle qu'elle joue dans la carrière et la réputation des lauréats. Consacré à la critique d'art, le chapitre 2 s'appuie sur une analyse prosopographique des auteurs de comptes rendus de Salon et sur une anthologie critique afin d'examiner le statut et l'autorité des salonniers après 1848, permettant ainsi de saisir comment se construit leur expertise et leur influence dans le système artistique contemporain. La seconde partie, à partir d'une prosographie des 619 peintres médaillés au Salon entre 1848 et 1880, dessine des typologies de succès en fonction des genres qu'ils pratiquent. Le chapitre 3 est consacré aux peintres d'histoire, qui continuent de cumuler honneurs et positions d'autorité. La peinture d'histoire serait donc le genre par excellence qui donnerait accès aux carrières les plus prestigieuses, mais cette consécration est en réalité conditionnée à la capacité de ces peintres à s'adapter aux goûts des critiques, du public et des amateurs, et donc à diversifier et hybrider leur production. Le chapitre 4 s'intéresse aux peintres de genre médaillés : les importants succès critiques et commerciaux qu'ils rencontrent au Salon s'accompagnent d'une reconnaissance institutionnelle équivalente à celle des peintres d'histoire. La consécration à laquelle parvient, progressivement, la peinture de genre confirme à cet égard l'obsolescence définitive de la hiérarchie des genres et la montée en légitimité des nouvelles instances de reconnaissance, que sont les critiques et le marché. Enfin, le chapitre 5 examine les carrières et réputations des paysagistes médaillés après 1848, en soulevant en particulier un paradoxe : si les paysages jouissent d'une reconnaissance institutionnelle indéniable via la médaille, leurs praticiens n'accèdent pas à des carrières aussi consacrées que leurs confrères peintres de figures, qui apparaissent d'autant plus insuffisantes que l'école paysagiste est unanimement louée par les critiques d'art. Les carrières et réputations des paysagistes se construisent en effet sur un modèle alternatif, visible dans leur œuvre et dans leur parcours, obligeant la mise en place de nouveaux critères d'appréciation, qui leur survivront d'ailleurs. Dans la seconde moitié du XIXe siècle cohabitent donc plusieurs instances et logiques de reconnaissance qui entretiennent entre elles des relations de mimétisme et d'interdépendance, formant alors un système institutionnel hybride, inédit et temporaire. À rebours de l'historiographie sur l'art du XIXe siècle, le Salon se révèle être le lieu privilégié de cette coexistence, grâce à l'ouverture indéniable dont fait preuve le jury et grâce au caractère monopolistique de l'exposition, jusqu'à 1880 du moins. De fait, la disparition du Salon officiel entraîne un morcellement du paysage artistique en groupes aux intérêts et/ou aux positionnements esthétiques différents, incarnés par les multiples Salons et Sociétés naissant à la fin du siècle.