Thèse soutenue

Les rapports aux risques des animateurs volontaires d'Accueils Collectifs de Mineurs (ACM)

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Auteur / Autrice : Cyril Dheilly
Direction : Jean HoussayeLaurent Lescouarch
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de l'éducation
Date : Soutenance le 15/11/2019
Etablissement(s) : Normandie
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Homme, sociétés, risques, territoire (Rouen)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre interdisciplinaire de recherche normand en éducation et formation (Caen ; 2017-....)
Etablissement de préparation de la thèse : Université de Rouen Normandie (1966-....)
Jury : Président / Présidente : Véronique Bordes
Examinateurs / Examinatrices : Jean Houssaye, Laurent Lescouarch, Martine Janner-Raimondi, Jean-Pierre Pourtois
Rapporteurs / Rapporteuses : Martine Janner-Raimondi

Résumé

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Comment l’environnement influence-t-il les rapports aux risques des animateurs volontaires, exerçant dans le cadre des Accueils Collectifs de Mineurs (ACM) - organisations liées aux vacances collectives de la jeunesse ? Ambigu et saturé de sens, le risque désigne à la fois ce qui est pris et ce dont il faut se protéger. Il implique des enjeux pour l’obtention d’un gain, sous couvert d’incertitude (Goffman, 1974). Dans le cadre des ACM, ces enjeux apparaissent d’ordres divers (physique, moral, affectif, juridique, économique, symbolique…). Dans cette recherche, le modèle écologique de développement humain décrit par Bronfenbrenner (1986) est mobilisé afin d’organiser les données issues de l’entretien de 23 animateurs en 5 niveaux de systèmes en inter-relation, révélant alors des sous-systèmes. Les systèmes vont du plus global, le macrosystème (lois, société, institutions étatiques, cadre des formations), au microsystème, dans l’ACM. L'entrée par ces niveaux d'analyse passe par le mésosystème et l’exosystème, faisant respectivement référence aux interactions de l’ACM avec un système engageant l’animateur (famille, loisirs, études, amis, engagements, autres espaces) ou non (autres ACM, organismes de formation et organisateurs - certains participant aux mouvements d’éducation populaire -, parents, autres lieux d'accueil, médias et réseaux sociaux, entourage indirect, intervenants, cadres dédiés à la sécurité, environnement extérieur). Enfin, le chronosystème traduit les dynamiques interactives de ces systèmes. Une telle organisation des données permet de considérer l’humain dans ses interactions et non dans un système interne. Cela met ainsi en valeur une intersubjectivité du risque, dont l’acception se décale du risque objectif - associé à un animateur universel et un environnement abstrait -, et du risque subjectif, certes valorisé par des environnements variés. Les expériences rapportées par les animateurs témoignent d’une variété de rapports à l’incertitude : tantôt fuie, minimalisée ou recherchée, certains naviguant entre ces positions ou visant un juste milieu. Leurs actions sont guidées soit par la prédestination ou le fatalisme, soit par le déterminisme et le principe de causalité, ou encore par libre arbitre ou existentialisme, avec un être humain unique maître de ses actes et de leur sens. Dans une tension entre liberté et sécurité, la gestion des risques est sujette à une démesure, vers un risque zéro, laquelle s’accompagne d’effets contre-intuitifs ici recensés (enfants limités dans leurs expériences fondatrices, inadaptation à l’imprévu, fatigue latente, stress, surabondance de normes, critérisation, protocoles absorbeurs d’attention, pratiques de surveillance, défiance en l’humain et confiance en la sécurité passive, fermeture de structures), alléguant une balance bénéfices/risques. Si la réduction du risque s’accompagne de recherches de maîtrise de l’espace, du temps et de l’humain, celle-ci révèle, par ailleurs, le travail des frontières. Interpersonnelles, ces dernières marquent des statuts de protection, séparent les publics pour tendre alors à la simplification des complexités intersubjectives. Interterritoriales, elles tendent à créer des milieux voulus adaptés, se coupant de dangers de la nature mais pas de l’impact d’une telle sectorisation. Intertemporelles, elles marquent une planification et un séquençage de l’activité des enfants. Internes à l’animateur, celui-ci se voit tiraillé entre engagement, désir et assignation (voir Bajoit, 2003). Ainsi, les rapports aux risques sont non seulement influencés par l’environnement mais révèlent des interactions avec lui, ne se pensent pas sans lui. Alors, une réduction des risques sans considération éthique de l’intersubjectivité et de l’environnement apparaît insatisfaisante.