Thèse soutenue

La haine de la langue maternelle : une lecture de James Joyce, Jean Genet, Thomas Bernhard

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Auteur / Autrice : Mathias Verger
Direction : Tiphaine Samoyault
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littérature comparée
Date : Soutenance en 2013
Etablissement(s) : Paris 8

Résumé

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Le syntagme de « langue maternelle » ne dénomme pas un concept mais fonctionne comme une expression commune qui condense différents imaginaires linguistiques. Il s’agit de relier la déconstruction de cette expression à la lueur de poétiques romanesques du XXe siècle et de différentes modalités d’excès stylistiques. Les corpus romanesques de James Joyce, Jean Genet et Thomas Bernhard mettent en crise, à l’échelle du récit comme au niveau de l’écriture, l’idée d’une langue commune de communication, la qualité politique de la langue nationale, l’image de la langue de la mère et l’imaginaire natal de la langue maternelle. Les défigurations stylistiques accompagnent l’inquiétude politique portée par les œuvres quant aux figements de la langue ordinaire et face au modèle de l’Etat-nation comme à l’ordre généalogique. L’intervention doublement littéraire et politique détourne les monolinguismes institués afin d’ouvrir de nouveaux rapports possibles avec l’étranger et les langues étrangères. En réponse à l’idéologie de la grammaire normative, l’écriture devient idiome et s’engage dans des processus de traduction. Joyce, Genet et Bernhard brisent les logiques et les mécaniques de l’appartenance sociale et politique en inventant des écritures en « plus d’une langue ». Le sujet de la langue et le sujet politique se retrouvent dans une même situation de résistance face au pouvoir des normes. Le roman familial et le grand récit de la nation sont pris à revers dans des textes en mouvement où la bile se joint à la labilité des identités, des catégories et des noms. Ces écritures en dissidence appellent enfin une lecture « en traduction » attentive à la mémoire des langues.