Thèse soutenue

L’argent : sources, transfert et bioaccumulation : cas du système fluvio-estuarien girondin

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Auteur / Autrice : Laurent Lanceleur
Direction : Gérard BlancJörg Schäfer
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Géochimie et écotoxicologie
Date : Soutenance le 14/06/2011
Etablissement(s) : Bordeaux 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences et Environnements (Pessac, Gironde)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Environnements et Paléoenvironnements Océaniques et Continentaux (Talence, Gironde ; 1999-....)
Jury : Président / Présidente : Antoine Grémare
Examinateurs / Examinatrices : Cédric Garnier, Pierre Miramand, Jean-François Chiffoleau
Rapporteurs / Rapporteuses : Marc Benedetti, Frédérique Eyrolle

Résumé

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Les rejets d’argent (Ag) dans l’environnement liés à l’exploitation minière aux diverses applications industrielles (e.g. bijouterie, médecine, photographie, électronique et plus récemment les nanotechnologies) font de Ag un polluant historique et émergent, dont les transferts et les effets dans les milieux aquatiques sont largement sous-documentés. Ce travail présente un premier bilan des sources, du transfert et de la bioaccumulation de Ag dans le système fluvio-estuarien de la Gironde. Le continuum Lot-Garonne-Gironde, connu pour une pollution polymétallique (e.g. Cd, Zn) provenant du bassin de Decazeville, est un système modèle pour l’étude des transferts métalliques du continent à l’océan. Les enregistrements des signaux historiques (~50 ans) de Ag dans les sédiments du Lot en amont (Ag : 0,3 mg/kg) et en aval (Ag : jusqu’à 7 mg/kg) du bassin de Decazeville sont similaires à ceux de Cd, indiquant des sources et des processus de transport/dépôt communs liés à l’histoire minière et industrielle jusqu’en 1986. Le lessivage et l’érosion actuels des terrils provoquent localement des concentrations en Ag particulaire (AgP : 260 mg/kg) et dissous (AgD : 1260 ng/l) dans la rivière Riou-Mort qui sont 2 à 3 ordres de grandeur supérieures aux valeurs typiques. Malgré ces fortes concentrations, la contribution du Riou-Mort aux flux de Ag de la Garonne (AgD : 0,008 à 0,041 t/an ; AgP : 0,306 à 2,44 t/an ; 1999-2009) reste faible (AgP : <11% ; AgD : <6%). La Garonne transporte l’essentiel (63-83%) des apports en Ag à l’estuaire principalement sous forme particulaire (96±2%). La détermination du bruit de fond géochimique régional (AgP/ThP=0,026) a permis d’évaluer (i) la contribution naturelle (20% à 65%) aux flux totaux en AgP et (ii) les flux anthropiques spécifiques de AgP (15±10 g/km²/an et 0,24±0,16 g/hab/an) à l’échelle du bassin versant de la Garonne (La Réole). Dans l’estuaire salin, la désorption par les ions chlorures libère ~60% de AgP vers la colonne d’eau (addition), provoquant des concentrations maximales en AgD (6-8 ng/l) à salinité 15-25. La fraction en Ag désorbé correspond à la fraction potentiellement biodisponible ou réactive (i.e. extractible par HCl 1 M). Ainsi, les premières estimations des flux nets indiquent que l’export annuel de Ag vers le domaine côtier est à 50-80% lié à la phase dissoute (0,64 à 0,89 t/an en 2008 et 0,56 à 0,77 t/an en 2009). Bien que plus biodisponible sous forme ionique Ag+ (dominante en eau douce), l’accumulation de Ag dans les organismes estuariens (huîtres, crevettes et anguilles) reflète la pression d’exposition supérieure en eau saumâtre. L’exposition in situ d’anguilles européennes, espèce recommandée pour la biosurveillance du milieu dans le cadre de la Directive Cadre sur l’Eau, dans des cages à différents sites clé de l’estuaire pendant 3 mois, a mis en évidence les voies directes et trophiques de la contamination en Ag à des niveaux de contamination environnementaux. L’enregistrement historique de la contamination en Ag des huîtres de la Gironde (1979-2007, RNO, Ifremer) indique que le bassin de Decazeville a été la source majoritaire en Ag jusqu’en ~1988. Cependant, l’accumulation maximale de Ag dans ces bivalves après 1993 (de ~40 à plus de 100 mg/kg, poids sec) révèle une contribution croissante de sources additionnelles et contemporaines en Ag comme la photographie, l’ensemencement des nuages (30 à 63 kg/an) ou encore les rejets des eaux usées urbaines de Toulouse et de Bordeaux (42 et 57 kg/an). Ce travail constitue une base nécessaire à l’étude des rejets du cycle de Ag (y compris les nanoparticules) dans le milieu aquatique (quantification, transfert et toxicité) et des risques associés.