Thèse soutenue

L' esthétique de la suspension

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Auteur / Autrice : Patrick Gabin Goulou
Direction : Dominique Rabaté
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littérature française
Date : Soutenance en 2009
Etablissement(s) : Bordeaux 3

Résumé

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La suspension se veut comme un écart, une prise de distance de Samuel Beckettvis à vis des accents et procédés stylistiques hérités des romans réalistes. L’esthétique de la suspension retravaille et déplace les normes, les frontières génériques du langage. Plus, le Nobel de Littérature 1969 pointe de façon singulière et magistrale la question de l’échec des mots. Avec Beckett, le langage qui était pressenti comme vecteur de la communication devient soudainement inaudible, c’est-à-dire que sa fonction de signification se trouve suspendue,mettant en doute la valeur cognitive des mots, leur cohérence et leur cohésion. Tous ces éléments de signification se trouvent violemment écartés du discours. Parfois la phrase est longue, inachevée, faite de subordonnées sans principale. Le personnage n’est plus facilement repérable. Loquace, il atteint cependant une extraordinaire complexité au fur et à mesure qu’on tente de le cerner. S’il doit parler, il ne parle plus que d’une voix neutre, blanche. A travers ces éléments qui touchent à la nature de la narration, c’est le roman qui se délite et se clôt sur lui-même. La narration qui sourd dans les récits n’est plus que bourdonnement, murmure. La suspension se conçoit donc comme une césure épistémologique, une rupture syntaxique qui témoigne d’une révolution du langage, voire d’un basculement du sens. Le projet beckettien est à ce titre porteur d’émancipation du sujet. Son avènement passe par le dépassement et la mise à mort des sphères du savoir. L’écriture moderne de Beckett fait le constat de l’échec, du vacillement des grands récits de légitimation de la vérité et du sacré