Thèse soutenue

Aux origines de la limitation centrale du traitement de l'information : représentation et préparation des tâches

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Auteur / Autrice : Morgan Lyphout-Spitz
Direction : François Maquestiaux
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Psychologie
Date : Soutenance le 14/12/2023
Etablissement(s) : Bourgogne Franche-Comté
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sociétés, Espaces, Pratiques, Temps (Dijon ; Besançon ; 2017-....)
Partenaire(s) de recherche : Établissement de préparation : Université de Franche-Comté (1971-....)
Laboratoire : Laboratoire de Psychologie (Besançon)
Jury : Président / Présidente : Catherine Thevenot
Examinateurs / Examinatrices : Éric Laurent, Eric Ruthruff
Rapporteurs / Rapporteuses : Thérèse Collins, Gaën Plancher

Résumé

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Les individus rencontrent souvent des difficultés lorsqu’ils tentent de réaliser plusieurs tâches à la fois. Ces difficultés ont été attribuées à des limitations de la capacité de traitement de l’information. Plus spécifiquement, une contrainte bien établie a été identifiée au niveau central du traitement de l’information, soit le niveau des opérations permettant l’adaptation. La littérature rapporte l’omniprésence de cette limitation centrale. Il existe pourtant des exceptions : des tâches très faciles ou grandement pratiquées ont parfois permis de grandement diminuer les difficultés en double tâche. Dans cette thèse, nous questionnons le sens de ces exceptions : sont-elles seulement des exceptions à la règle générale d’une limitation centrale ou, au contraire, reflètent-elles un phénomène plus général ? La limitation centrale reflète-t-elle réellement la présence d’une contrainte inhérente à l’architecture cognitive ? Une nouvelle hypothèse que la thèse vise à développer et tester est celle d’une limitation centrale envisagée sous l’angle de la préparation des tâches. Cette hypothèse accorde une place essentielle au rôle de la préparation qui permettrait aux représentations des tâches d'être plus facilement chargées en mémoire de travail et être ainsi traitées plus automatiquement. Pour ce faire, nous examinons dans une première étude le rôle modérateur de la compatibilité idéomotrice sur l’ampleur de l’interférence en double tâche. Nous avons développé différents indicateurs comportementaux et des simulations cognitives dont les résultats convergent en faveur de l’automaticité des tâches idéomotrices. Dans une seconde étude, nous avons interrogé si l’automaticité tient à la spécificité de l’association stimulus-réponse (S-R) ou à la facilité de chargement des associations S-R en mémoire de travail. Pour cela, nous avons conçu des tâches très faciles mais non idéomotrices (des tâches sémantiques) et testé leur automaticité. Les résultats convergent en faveur de l’automaticité des tâches sémantiques. Si l’automaticité tient à la facilité de chargement des associations S-R, comme le suggèrent les deux premières études de la thèse, alors des tâches aux associations S-R véritablement arbitraires peuvent être traitées automatiquement dans des conditions facilitant leur chargement en mémoire de travail ; des conditions boostant leur préparation. Cette proposition nous a amené à formuler une nouvelle hypothèse de l’interférence en double tâche: l’hypothèse du manque de préparation. Selon cette hypothèse, un manque de préparation est la cause de l’interférence en double tâche. Pour la tester, nous avons mené une troisième série de quatre expériences dans laquelle nous avons utilisé les mêmes deux tâches arbitraires non pratiquées dans quatre conditions. La première condition consistait à ne réaliser que des essais classiques de double tâche. La deuxième condition visait à optimiser la préparation de la tâche la plus ralentie en condition classique de double tâche (i.e., la tâche 2), en insérant des essais de simple tâche de la tâche 2 mélangés aléatoirement avec des essais de double tâche. Deux conditions supplémentaires visaient à confirmer le rôle clé de la préparation. En accord avec les théories dominantes, une limitation centrale était présente dans des conditions classiques de double tâche. Mais dans des conditions boostant la préparation de la tâche 2, la limitation centrale a disparu chez près de la moitié des participants. Ce résultat va à l’encontre des prédictions des théories dominantes, mais est en accord avec notre hypothèse du manque de préparation. Les travaux de cette thèse nous ont progressivement permis d’entrevoir et de valider l’hypothèse du manque de préparation. Cette nouvelle hypothèse de l’interférence en double tâche offre de nouvelles perspectives sur l’attention dont le fonctionnement est régi avant tout par les manières dont les individus se représentent et se préparent aux tâches et actions à venir.