Action des drogues sur les sous-réseaux dopaminergiques de la VTA dans les processus d'addiction
Auteur / Autrice : | Tinaïg Le Borgne |
Direction : | Fabio Marti |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Neurosciences |
Date : | Soutenance le 24/11/2023 |
Etablissement(s) : | Sorbonne université |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Cerveau, cognition, comportement (Paris) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire Plasticité du cerveau (Paris ; 2014-....) |
Jury : | Président / Présidente : Laurent Venance |
Examinateurs / Examinatrices : Camilla Bellone, Anna Beyeler | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Pierre Trifilieff, François Georges |
Mots clés
Résumé
Le tabagisme, qu’il soit actif ou passif, ainsi que la consommation d’alcool souvent associée, sont deux des facteurs qui contribuent le plus au développement du cancer. Comprendre les mécanismes cellulaires et la séquence des évènements neuronaux qui conduisent à l’addiction est un enjeu majeur de santé publique. La recherche préclinique a permis de mettre en évidence que la mise en place d’une dépendance est liée à l’action initiale des drogues sur les neurones libérant la dopamine, un neurotransmetteur du système de la récompense. Les neurones produisant cette dopamine, situés dans la région de l’aire tegmentale ventrale (VTA), sont notamment impliqués dans les processus de renforcement, de motivation et de prise de décision. La nicotine, en se liant aux récepteurs nicotiniques des neurones de la VTA, produit une augmentation de l’activité des neurones dopaminergiques, entraînant une forte libération de dopamine dans les structures cibles. La répétition des expositions va entraîner un renforcement positif à la drogue. Outre ses propriétés gratifiantes, la nicotine a également des effets négatifs. Les mécanismes sous-tendant ces effets sont, par contre, mal connus. La première partie de mes travaux de thèse a montré l'hétérogénéité des réponses induites par la nicotine. Par le biais d’enregistrements juxtacellulaires in vivo chez la souris anesthésiée, couplés à des injections de traceurs rétrogrades, nous avons découvert que les neurones dopaminergiques projetant vers le noyau accumbens sont activés par une injection de nicotine (comme traditionnellement décrit auparavant) alors que ceux projetant vers l’amygdale sont inhibés par la nicotine. Ces réponses électrophysiologiques opposées révèlent deux circuits qui médient des effets comportementaux fonctionnellement distincts. L’activation de la voie dopaminergique projetant vers le noyau accumbens produit un renforcement alors que l’inhibition de la voie dopaminergique projetant vers l’amygdale induit de l’anxiété. La seconde partie de mes travaux a cherché à déterminer quels mécanismes pourraient expliquer l’inhibition des neurones dopaminergiques induite par la nicotine ; et si cette hétérogénéité des réponses pourrait s’étendre à une autre drogue comme l’alcool. Nous avons démontré que, comme la nicotine, l'alcool induit deux réponses opposées sur les mêmes sous-populations de neurones dopaminergiques. Connaissant la cible moléculaire de la nicotine, nous avons étudié le mécanisme de l'inhibition induite par cette dernière. Les récepteurs nicotiniques étant des canaux cationiques, dépolarisants, il ne peut s'agir d'un effet direct de la nicotine sur les neurones dopaminergiques. Nous avons constaté que l’inhibition observée en réponse à la nicotine dépendait de l’activation de la population dopaminergique projetant vers le noyau accumbens. Ce mécanisme d’inhibition repose donc sur un fonctionnement de réseau mettant en jeu une boucle de rétroaction inhibitrice. Ce mode d’action serait ainsi partagé par la nicotine et l’alcool. Ces résultats soulèvent la question du rôle de l’inhibition dans l'équilibre entre les effets positifs et négatifs des drogues, un point essentiel qui détermine le début de leur consommation et la transition vers une dépendance.