Thèse soutenue

Influence de la conversion de spin nucléaire des molécules H2 sur la chimie froide du milieu interstellaire : expérience et modélisation

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Auteur / Autrice : Japhar Michoud
Direction : Xavier MichautFranck Le Petit
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Physique
Date : Soutenance le 06/12/2023
Etablissement(s) : Sorbonne université
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Physique en Île-de-France (Paris ; 2014-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire d’étude du rayonnement et de la matière en astrophysique et atmosphères (Paris ; 2002-....)
Jury : Président / Présidente : Lahouari Krim
Examinateurs / Examinatrices : Astrid Bergeat, Alexandre Faure
Rapporteurs / Rapporteuses : Emmanuel Dartois, Robert Georges

Résumé

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Cette thèse porte sur l’influence de la chimie ortho/para dans le milieu interstellaire (MIS) et sur la conversion de spin nucléaire de H2 sur des analogues de film de glace interstellaire. Un travail d'implémentation d'un réseau chimique ortho/para dans le modèle astrochimique développé à Meudon (code PDR de Meudon) et des expériences d'astrophysique de laboratoire au LERMA ont été menés. Dans une première partie, l'analyse de l'impact des propriétés ortho/para de H2 sur la chimie de H2O dans différentes régions du MIS ont été discutées à partir des émissions rovibrationnelles de H2O. L'étude dans deux régions dominées par les photons (PDR), la barre d'Orion et S140, a permis de conclure sur l'influence de la chimie ortho/para. Dans les PDR denses et chaudes comme la barre d'Orion, l'excitation collisionnelle domine les processus de formation et destruction chimiques état à état. Dans ce cas, les réactions chimiques ortho/para n'ont qu'un très faible impact sur les émissions des molécules de H2O produites. En revanche, dans les PDR moins denses et plus froides comme S140, il faut tenir compte de la chimie ortho/para pour interpréter les données observationnelles. Enfin, une étude sur une grille de modèles a été réalisée en faisant varier le couple de paramètres (champ de rayonnement UV incident sur le nuage - densité du milieu). Ces grilles nous ont permis d'analyser l'impact de la chimie sélective ortho/para sur les abondances ortho/para de H2O. Nous avons pu déterminer les conditions physico-chimiques nécessaires à la détection de H2O par des télescopes. Pour de faibles champs de rayonnement UV incidents et une densité modérée, l'intensité des transitions rovibrationnelles de H2O peut varier jusqu'à un facteur 5 du fait des processus impliquant le caractère ortho ou para de H2. Il est donc important d'implémenter ces processus micro-physiques dans les modèles pour l'interprétation des données observationnelles. La deuxième partie présente la mise en place d'un nouveau dispositif expérimental développé au LERMA depuis 2017 pour étudier in situ par spectroscopie d'absorption IR le comportement de la molécule de H2 collée sur des films de glace à basse température. Le but est de quantifier les mécanismes de conversion de spin nucléaire de H2 et ses isotopes sur des surfaces glacées en suivant l'évolution temporelle de l'absorption de 2 transitions rovibrationnelles Q(0) et Q(1) exaltées par l'interaction de la molécule avec le champ électrique intense qui existe à la surface de la glace. Un protocole expérimental a été affiné afin de pouvoir contrôler d'une expérience à l'autre les épaisseurs de glace déposées ainsi que le taux de leur couverture en H2. A partir d'une certaine épaisseur de glace de 5 microns, il a été observé que le nombre de molécules pouvant s'adsorber sur la surface atteint une valeur seuil. Ce phénomène, combiné à des effets d'interférences de la lumière IR dans les films de glace de H2O limite l'absorption infrarouge sur les raies rovibrationnelles de H2. Les premiers résultats de conversion de spin nucléaire à une température de 6 K montrent que la constante de temps caractéristiques, typiquement 2500 min, raccourcit lorsque le taux de couverture en H2 de la surface de glace est grand. Des phénomènes de désorption ont également été observés à 6 K sur les surfaces saturées en H2 mettant en lumière la compétition entre les mécanismes de conversion et de désorption durant l'expérience qui dure plusieurs jours. A 10 K, il semble que les phénomènes de désorption ont des conséquences plus importantes sur la mesure in situ à cause des fluctuations de température du substrat (typiquement 0.8 K). Une douzaine d'expériences de conversion de spin nucléaire effectuées à 10 K révèlent une constante de temps caractéristique moyenne de 592±324 minutes bien supérieure aux valeurs trouvées dans la littérature ; ce qui change sensiblement notre vision du rôle des grains sur H2 dans le milieu interstellaire et sa chimie.