Thèse soutenue

Exploration du potentiel santé des souches de Lactococcus lactis productrices de GABA : vers de nouvelles stratégies thérapeutiques dans la gestion de l'hypersensibilité viscérale

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Auteur / Autrice : Pedro Gomes
Direction : Hélène EutamèneMuriel Cocaign-Bousquet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Infectiologie, Physiopathologie, Toxicologie, Génétique et Nutrition
Date : Soutenance le 18/12/2023
Etablissement(s) : Toulouse, INPT
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences écologiques, vétérinaires, agronomiques et bioingénieries (Toulouse)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Toxalim (Toulouse ; 2011-....)
Jury : Président / Présidente : Muriel Bonin
Examinateurs / Examinatrices : Hélène Eutamène, Muriel Cocaign-Bousquet, Muriel Bonin, Philippe Langella
Rapporteurs / Rapporteuses : Moïse Coëffier, Vincent Juillard

Résumé

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Le syndrome de l’intestin irritable (SII) est une maladie chronique invalidante, récemment classée dans le nouvel intitulé des désordres des interactions de l’axe cerveau-intestin », anciennement appelés troubles fonctionnels intestinaux . Sur le plan clinique selon les critères de ROME IV, le SII se caractérise par une sensibilité accrue et une perception renforcée de la douleur dans l'intestin, phénomène appelé hypersensibilité viscérale, associée à des troubles du transit sans cause organique identifiable. Les symptômes du SII ont de fortes répercussions en termes de coûts et de qualité de vie des patients et entraînent et/ou aggravent le stress et l’anxiété. La physiopathologie du SII reste aujourd’hui mal comprise et les traitements prescrits se font en fonction des symptômes prédominants et de la gravité des plaintes. Dans ce cadre, certaines souches probiotiques sont capables d’influencer la communication entre le microbiote intestinal, l'intestin et le cerveau et de ce fait de moduler la sensibilité viscérale à travers la libération de neuromédiateurs spécifiques issus de ces bactéries. Parmi ces médiateurs, l’acide - aminobutyrique (GABA) est un neurotransmetteur inhibiteur du système nerveux central qui joue un rôle clé dans la perception et allègement de la douleur chez les mammifères. Chez plusieurs bactéries, un système de résistance au stress acide, les permet de produire du GABA après la décarboxylation de l'acide L-glutamique par l'enzyme glutamate décarboxylase (GAD). Ce système est notamment observé chez les bactéries lactiques (LAB) comme Lactococcus lactis (L. lactis), largement utilisé dans l’industrie agro-alimentaire pour son profil reconnue comme sûre pour la santé humaine (du therme « generally recognized as safe » en anglais). Bien qu'il ait été observé que la bactérie commensale Bifidobacterium dentium soit capable de réduire la HV induite par stress chez le rat via la production de GABA, la capacité des LAB à moduler la sensibilité viscérale via leur capacité à produire du GABA reste à définir. En conditions identiques de culture en bioréacteur, nous avons caractérisé trois souches de Lactococcus lactis productrices de GABA à des niveaux différents (de faiblement à fortement productrices) en relation avec leur activité GAD, et nous avons évalué leurs capacités à réduire la HV en réponse à un stress aigu chez le rat, dans un modèle mimant la symptomatologie du SII. Nous avons ainsi qualifié la souche CNCM I-5388 comme hyper-productrice de GABA vis-à-vis de la souche de référence NCDO2118 et montré que ses propriétés antinociceptives apparaissent dès le 1er jour de traitement par voie orale pour être significative après 5 jours de traitements contre 10 jours pour NCDO2118. Nous avons également établi que ces propriétés, pour les deux souches, sont GAD/GABA-dépendantes, agissant sur les récepteurs GABAB de l'hôte indépendamment des modifications de l'alpha et de la bêta-diversité du microbiote fécal. De plus, nous montrons que cet effet ne dépend pas de la viabilité cellulaire de L. lactis pour la souche CNCM I-5388. En effet, sous sa forme postbiotique (non viable, mais pour laquelle l’enzyme GAD est toujours active) nous observons un effet similaire à celui de la souche sous sa forme probiotique après 5 et 10 jours de traitement. Finalement, via des analyses des contenus gastrointestinaux des rats et des modèles statique ou dynamique qui miment le compartiment gastrique humain, Nos résultats suggèrent qu'un pH similaire à celui de l'estomac pourrait jouer un rôle majeur dans l'activation de la GAD bactérienne et la production de GABA pour exercer des propriétés antinociceptives in vivo. Nos conclusions indiquent que les souches de L. lactis productrices de GABA pourraient être utilisées à des fins thérapeutiques dans le traitement symptomatologique de la douleur viscérale invalidante dans la pathologie du SII et d’autres pathologies.