Thèse de doctorat en Histoire (option : Histoire des sciences)
Sous la direction de Jean-Paul Gaudillière.
Soutenue le 28-06-2023
à Paris, EHESS , dans le cadre de École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales .
Le président du jury était Jérôme Dokic.
Le jury était composé de Jérôme Dokic, Angela N. H. Creager, Carol Gluck, Nathalie Jas.
Les rapporteurs étaient Angela N. H. Creager, Carol Gluck.
Science, histoire, fiction : vers une histoire des métaphores en histoire des sciences
Cette thèse va se servir des 114 volumes de la revue Isis , publiée par la History of Science Society états-unienne, comme une archive des pratiques métaphoriques utilisées par les historien|ne|s des sciences pour représenter leurs objets. De ce point de vue, les métaphores sont les témoins des choix pratiques des historien|ne|s, métaphores qui ont une histoire changeante elles-mêmes. Les recherches pour cette thèse s'appuient sur une méthodologie de la philosophie, de l'esthétique et de la critique littéraire pour déconstruire l'histoire des sciences par ses métaphores et de reconstruire une métahistoire des pratiques métaphoriques. Pour cadrer cet objet philosophique assez large et l’enchaîner dans une histoire des sciences, cette thèse va se servir de trois cas particuliers qui retrouvent leurs utilisations métaphoriques dans Isis. Chaque cas commence avec un néologisme actuel associé à un objet historique qui dévoile un aspect de la sociologie des connaissances. D’abord, le design intelligent est lié à la téléologie, au livre de Genèse, et aux métaphores darwiniennes de l’Origine des espèces qui offrent des aperçus aux sujets de la géologie, de la stratigraphie, et des usages scientifiques et culturels sur la chronologie. Ensuite, la neurohistoire est associée à un autre néologisme de la fin du 19e siècle, l’eugénisme, qui discutent ensemble une histoire scientifique et culturelle au sujet des métaphores naturalistes sur l’intelligence humaine. Puis la croissance rapide du néologisme infodémique est liée aux histoires médicales des controverses, des charlatans, et des complots qui élaborent une histoire changeante de la professionnalisation. Enfin, ces trois cas ouvrent une discussion sur une histoire alternative des sciences par sa métaphorisation, la création d’un contexte historique par l’usage ou le déni des métaphores. Cet intérêt méta-historique se génère par des tensions : entre l’histoire comme un récit engageant et l’histoire comme une adaptation fidèle ; entre les métaphores comme confusion créative et les métaphores comme rhétorique utile ; et entre la scientificité des catégories et la beauté de la poésie. Ces tensions produisent des métaphores ordinaires, nobles, et/ou troublants. Ainsi, entre et à travers ces cas on peut faire des généralisations sur l’usage des métaphores par les historien|ne|s qui peuvent établir des périodisations et des aires de famille qui les regroupent ensemble. Cette thèse pose qu’une solution à ces périodisations, ces généralisations, et ces intérêts méta-historiques peut être répondue par une histoire d’usage métaphorique, une métaphorologie.
This dissertation uses the 114 volumes of the History of Science Society's journal Isis as an archive of metaphors employed by historians of the sciences to represent their objects. Here, metaphors are witnesses to practical choices made by historians; choices that have a history of changing use. This dissertation relies upon an experimental methodology that crosses philosophy, aesthetics, and literary criticism in order to deconstruct the practice of the history of the sciences based on its metaphors, and to reconstruct a meta-history based on the work those metaphors perform. In order to frame such a large philosophical object, and to retell it as a history of the sciences, three specific cases in Isis involving metaphoric use are examined. Each case begins with a neologism in the present which is associated with an historical object that helps to reveal an aspect of the sociology of knowledge. First, intelligent design is linked to teleology, the Book of Genesis, and Darwinian metaphors from the Origin of Species to provide insights about geology, stratigraphy, and scientific and cultural uses for chronology. Next, neurohistory is linked to another neologism from a century ago, eugenics, to discuss a scientific and cultural history of naturalizing metaphors about intelligence. Then, the rapid growth of the neologism infodemic is linked to histories of medical controversy, quackery, and conspiracy to elaborate a changing history of professionalization. These three cases are then used to open a discussion about an alternative history of the sciences by its practice of metaphorization, the creation of an historical context by the use (or denial) of metaphors. This meta-historical interest is generated by tensions between history as an engaging narrative and history as a faithful account; between metaphors as creative confusion and metaphors as rhetorically useful; and between the scientificity of categories and the beauty of poetry. Such tensions produce metaphors that can be ordinary, noble, or troubling. Thus, finally, across and between these cases can be made generalizations about how historians' use of metaphor can fit into established periodizations, and what kinds of family resemblances can be used to group them. This study hypothesizes that one answer to these types of periodizations, generalizations, and meta-historical interest can be answered by a history of metaphoric use, a metaphorology.
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