Thèse soutenue

Principes physiques de la régulation de la taille et de la densité dans la cellule et le noyau cellulaire
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Auteur / Autrice : Romain Rollin
Direction : Pierre SensJean-François Joanny
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Physique
Date : Soutenance le 08/12/2022
Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
Ecole(s) doctorale(s) : Physique en Ile de France
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Physico-chimie Curie (Paris ; 1996-....) - Laboratoire Physico-Chimie Curie [Institut Curie]
établissement opérateur d'inscription : Institut Curie (Paris ; 1978-....)
Jury : Président / Présidente : Guillaume Salbreux
Examinateurs / Examinatrices : Pierre Sens, Jean-François Joanny, Helmut Schiessel, Ariel Amir, Angela Taddei, Lydia Robert
Rapporteurs / Rapporteuses : Helmut Schiessel, Ariel Amir

Résumé

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Tout système vivant se développe grâce à la croissance et la division de ses cellules. Il est donc essentiel que ces cellules puissent réguler activement leur taille et leur densité. Ce contrôle précis s’incarne dans des lois d’échelle universelles qui relient linéairement la taille de la cellule à son contenu en protéines et à la taille de son noyau. Malgré l'accumulation de preuves expérimentales, l'origine de la régulation de ces quantités biologiques fondamentales est mal comprise. Dans cette thèse, nous étudions donc comment l'interaction entre les contraintes physiques et les processus biologiques conduisent à l'émergence de ces lois mais aussi à leurs dérèglements.Dans un premier temps, nous montrons que ces lois et leurs ruptures peuvent être expliquées quantitativement par trois contraintes physiques relativement simples, mais génériques, définissant ensemble le modèle "Pump and Leak" (PLM). Sur la base d'estimations numériques, nous associons les paramètres mésoscopiques du PLM aux processus biologiques dont ils découlent. Nous proposons que l'homéostasie de la masse sèche cellulaire provienne de la proportionnalité entre protéines et petits osmolytes. Notre théorie prédit la perte spontanée de cette proportionnalité, pendant la senescence lorsque l'ADN et les ARNs sont saturés par les ARNs polymérases et les ribosomes, et en entrée de mitose à cause de la décondensation des contre-ions de la chromatine. A partir des mêmes équations, nous montrons que l’homéostasie du volume du noyau nécessite un équilibre osmotique au niveau de l'enveloppe nucléaire et une quantité importante de métabolites qui permettent de diluer les contre-ions de la chromatine. Dans son ensemble, notre étude met en évidence le rôle primordial des petits osmolytes tels que les ions et les métabolites dans la régulation de la taille et de la densité cellulaire.Nous appliquons ensuite notre théorie à l’étude du confinement uniaxial des noyaux. L'accord entre la théorie et l'expérience est satisfaisant. Le modèle suppose néanmoins une équation constitutive ad-hoc pour décrire le comportement élastique non-linéaire de l’enveloppe nucléaire. Nous justifions ce comportement par la présence de rides et de plis. Nous proposons que ces rides proviennent de la frustration mécanique induite par la compétition entre la formation de la membrane nucléaire en sortie de mitose et de la décondensation des chromosomes. Nous confirmons cet argument par l’utilisation d’un modèle élastique Hookéen non-linéaire qui prédit une instabilité mécanique et l’apparition de rides. Dans son ensemble, notre étude fournit un cadre auto-cohérent pour expliquer le lissage de l’enveloppe nucléaire suivi d’une perte de volume nucléaire à la suite d'une compression uniaxiale à l'échelle de quelques minutes. À l'échelle de quelques secondes, nous estimons que la perte de volume lors de la compression est due à la perméation du nucléoplasme à travers le réseau dense de chromatine. Nous établissons donc une théorie linéaire poro-élastique à partir de la production d'entropie et des relations réciproques d'Onsager. Cette théorie fait deux prédictions importantes. Elle montre d'abord que la relaxation du volume suit une équation de diffusion, empêchant ainsi les variations de volume sur des échelles de temps plus rapides que l'échelle de temps de diffusion. Ensuite, elle prédit une rétractation du réseau. Ces prédictions sont alors vérifiées expérimentalement.Une conséquence importante du confinement uniaxial des noyaux est l'étirement de l’enveloppe nucléaire. Dans le cas de confinements "forts", la tension devient suffisamment élevée pour rompre l’enveloppe et conduit alors à l'apparition de “blebs” nucléaires. Les blebs nucléaires sont très instables : ils grossissent, éclatent et se réparent de manière répétée. Ceci a des conséquences biologiques néfastes. Nous concluons donc cette thèse en explorant et en discutant les origines physiques de cette instabilité.