Thèse soutenue

Rôles des contraintes génomiques et des traits d'histoire de vie dans la spéciation : une approche de génomique comparative

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Auteur / Autrice : Pierre Barry
Direction : Pierre-Alexandre GagnaireThomas Broquet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Génétique et génomique
Date : Soutenance le 29/04/2022
Etablissement(s) : Université de Montpellier (2022-....)
Ecole(s) doctorale(s) : GAIA (Montpellier ; École Doctorale ; 2015-...)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des sciences de l'évolution (Montpellier)
Jury : Président / Présidente : Guillaume Evanno
Examinateurs / Examinatrices : Pierre-Alexandre Gagnaire, Thomas Broquet, Guillaume Evanno, Kerstin Johannesson, Christelle Fraïsse, Oscar Puebla, Bert Van Bocxlaer
Rapporteurs / Rapporteuses : Guillaume Evanno, Kerstin Johannesson

Résumé

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La spéciation est le processus évolutif au cours duquel une espèce se scinde en deux lignées qui divergent en accumulant des barrières reproductives, jusqu'à l’acquisition d’un isolement reproductif total. Durant ce processus, les lignées divergentes peuvent toujours s’échanger des gènes par hybridation, mais le flux génique est progressivement limité par l’accumulation des barrières. Il en résulte une semi-perméabilité des génomes, où certains locus s’échangent librement entre lignées et restent indifférenciés tandis que d’autres n’introgressent pas, contribuant ainsi à l’établissement de régions génomiques divergentes, appelées îlots génomiques de spéciation. L'étude de l’établissement, l’accumulation, l’érosion et la maintenance de ces barrières et de leurs effets sur la semiperméabilité des génomes de lignées en cours de spéciation permet de comprendre comment de nouvelles espèces se forment. L'avènement des techniques de séquençage à haut débit a permis de caractériser le paysage génomique de divergence chez de multiples lignées en cours de spéciation à travers l’arbre du vivant. Ces études ont permis de mesurer l’influence de l’histoire démographique et de l’architecture génomique comme déterminants majeurs du paysage génomique de divergence. Toutefois, d'autres facteurs pourraient intervenir et expliquer la diversité des trajectoires évolutives pouvant conduire ou non à la spéciation. Le principal objectif de cette thèse est d'évaluer l'impact des traits d'histoire de vie des espèces sur la spéciation. Nous avons choisi d’étudier 20 espèces de poissons marins subdivisées en deux lignées (Atlantique et Méditerranéenne), et présentant une large diversité de niveaux de divergence et de traits d’histoire de vie. Dans le premier chapitre, nous avons étudié les déterminants de la diversité génétique, substrat sur lequel s’établit la divergence lors de la séparation initiale des lignées. Nous avons observé que la longévité adulte des po issons marins est corrélée négativement à la diversité génétique, et nous avons démontré que cette relation pouvait s’expliquer par une plus grande variance du succès reproducteur chez les espèces longévives à cause de stratégies reproductives particulières aux poissons marins (forte mortalité juvénile, faible mortalité adulte et augmentation de la fécondité avec l’âge). Puis, dans un second chapitre, nous avons détecté une grande diversité d’histoires évolutives entre espèces, caractérisée par un fort gradient de divergence génétique entre lignées atlantiques et méditerranéennes. Ce gradient reflète en partie le niveau de semi-perméabilité des génomes. Les espèces à faible différentiation présentent un isolement reproductif faible, alors que les espèces les plus fortement différenciées montrent un isolement reproductif quasi-complet. Les traits d’histoire de vie des espèces expliquent en partie cette diversité de niveaux d’isolement via différents mécanismes. La durée de vie larvai re influence négativement la différenciation génétique en modulant les capacités de dispersion, l’effet de la taille du corps indique un effet négatif de l’abondance long-terme sur la divergence, et la longévité semble impacter le nombre de générations écoulées depuis la séparation ancestrale. En conclusion, les 20 espèces étudiées présentent une variabilité surprenante d’histoires évolutives au regard des similitudes de leur histoire biogéographique et leur architecture génomique. Les relations entre traits d’histoire de vie et histoire évolutive des espèces sont complexes, mais nous avons pu éclairer certaines d’entre elles en décomposant l’implication des traits dans les différentes étapes de la spéciation. L’application de l’approche de génomique comparative développée au cours de cette thèse dans d’autres zones de suture permettra d’étendre nos connaissances des déterminants du tempo et du mode de la spéciation.