Le rôle des artefacts dans la dynamique de la routine organisationnelle : le cas de la routine de relève soignante à l'hôpital

The Role of Artifacts in the Dynamics of Organizational Routine : The Case of the Caregiver Handoff Routine in the Hospital

• Auteur / Autrice : Savéria Cecchi
• Direction : Evelyne Rouby
• Type : Thèse de doctorat
• Discipline(s) : Sciences de gestion
• Date : Soutenance le 21/06/2022
• Etablissement(s) : Université Côte d'Azur
• Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Droit et sciences politiques, économiques et de gestion (Nice)
• Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Groupe de recherche en droit, économie et gestion (Valbonne, Alpes-Maritimes) - Groupe de Recherche en Droit- Economie et Gestion / GREDEG
• Jury : Président / Présidente : Corinne Grenier
• Jury : Examinateurs / Examinatrices : Evelyne Rouby, Corinne Grenier, Benoît Grasser, Pascal Lièvre, Catherine Thomas, Nathalie Lazaric
• Jury : Rapporteurs / Rapporteuses : Benoît Grasser, Pascal Lièvre

Mots clés

Mots clés contrôlés

Travail

Équipes de soins de santé

Efficacité de l'organisation

Comportement organisationnel

Apprentissage organisationnel

Mots clés libres

Routines organisationnelles

Artefacts

Socio-Matérialité

La dynamique des routines

Relève soignante

Organisations de santé

Organizational routines

Artifacts

Socio-Materiality

Routines dynamics

Caregiver handoff

Healthcare organizations

Résumé

Cette thèse explore le rôle des artefacts dans la relation entre la stabilité et la flexibilité qui sous-tend la dynamique des routines organisationnelles. Elle met en avant le rôle des artefacts dans l'évolution de la routine ainsi que dans la gestion des deux types de pressions contradictoires qui s'exercent simultanément sur l'organisation. La routine est en effet amenée à évoluer pour s'adapter aux contraintes environnementales changeantes qui sont à l'origine de deux types de pressions : une pression à la standardisation et une pression à la flexibilité. La première appelle une reproduction le plus à l'identique possible d'un ensemble de pratiques données pour améliorer la coordination d'un collectif de travail. La seconde appelle une variabilité dans les pratiques pour en améliorer l'adaptabilité aux variations des circonstances et éviter l'inertie. Pour éclairer le rôle joué par les artefacts dans la dynamique des routines, la thèse s'inscrit dans une perspective théorique qui conçoit les routines organisationnelles comme étant composée de deux dimensions mutuellement constitutives : une dimension performative (la routine en pratique) et une dimension ostensive (la forme schématique de la routine). Dans une perspective structurationnniste, ce travail propose un modèle conceptuel qui caractérise les artefacts comme des modalités (ou médiateurs) jouant un rôle clé dans la relation entre la dimension ostensive et la dimension performative de la routine, notamment par le biais de leurs propriétés matérielles. Ce modèle caractérise, plus finement que ne l'a fait la littérature jusqu'alors, deux mécanismes sous-jacents au rôle des artefacts - le mécanisme d'inscription et le mécanisme d'affordance, ainsi que leurs conditions d'activation dans différents contextes. Ce faisant, il enrichit les contributions existantes, sur le rôle des artefacts dans la dynamique des routines organisationnelles, et en permet une lecture intégrative. Plus particulièrement, ce modèle distingue deux situations idéales-typiques, durant lesquelles la dynamique de la routine médiée par les artefacts diffère. La première situation résulte d'une pression à la standardisation exercée par le contexte, tandis que la seconde résulte d'une pression à la flexibilité. Dans chacune de ces situations, les attributs des mécanismes d'inscription et d'affordance, ainsi que les structures facilitant leurs activations, sont spécifiques. Enfin, le modèle permet de discerner deux façons distinctes d'appréhender la dynamique d'évolution de la routine : une évolution radicale qui renvoie à une évolution de la dimension ostensive de la routine et une évolution que nous avons qualifiée de plastique qui renvoie à un renouvellement incrémental d'un faible degré, sans faire évoluer la dimension ostensive de la routine. La construction de ce modèle s'appuie sur une étude empirique portant sur une routine de relève soignante, réalisée au sein du service de néonatologie d'un centre hospitalier universitaire (CHU) français. La démarche de recherche s'inscrit dans le paradigme épistémologique réaliste critique, qui permet de prendre une position originale au sein de la théorie des routines dynamiques. Le choix d'une étude de cas unique sur une longue période de temps, et de type réaliste critique, nous a permis de développer une analyse en profondeur de la routine de relève dans sa triple dimension performative, ostensive et matérielle, mais aussi du contexte et des structures au sein desquels cette routine prend corps.

This dissertation explores the role of artifacts in the relationship between the stability and flexibility that underlies the dynamics of organizational routines. It highlights the role of artifacts in the evolution of the routine as well as in the management of the two types of contradictory pressures that are simultaneously exerted on organizations. Routines must evolve in order to adapt to changing environmental constraints, which are the source of two types of pressure: a pressure for standardization and a pressure for flexibility. The former calls for the reproduction of a given set of practices to improve the coordination of a work group. The second calls for variability in the practices to improve their adaptability to changing circumstances and avoid inertia. In order to shed light on the role played by artifacts in the dynamics of routines, the dissertation follows a theoretical perspective that conceives organizational routines as being composed of two mutually constitutive dimensions: a performative dimension (the routine in practice) and an ostensive dimension (the schematic form of the routine). From a structurationist perspective, this work proposes a conceptual model that characterizes artifacts as modalities (or mediators) that play a key role in the relationship between the ostensive and performative dimensions of the routine, notably through their material properties. This model characterizes, more finely than the literature has done so far, two mechanisms underlying the role of artifacts - the inscription mechanism and the affordance mechanism - as well as their conditions of activation in different contexts. In doing so, it enriches existing contributions on the role of artifacts in the dynamics of organizational routines, and allows for an integrative reading. In particular, this model distinguishes two ideal-typical situations, during which the dynamics of the artifact-mediated routine differs. The first situation results from a pressure for standardization exerted by the context, while the second results from a pressure for flexibility. In each of these situations, the attributes of the inscription and affordance mechanisms, as well as the structures facilitating their activation, are specific. Finally, the model allows us to discern two distinct ways of apprehending the evolutionary dynamics of the routine: a radical evolution that refers to an evolution of the ostensive dimension of the routine and an evolution that we have qualified as plastic that refers to an incremental renewal of a low degree, that does not make the ostensive dimension of the routine evolve. The construction of this model is based on an empirical study of a nurse handoff routine, carried out in the neonatology department of a French public hospital. The research approach is based on a critical realist epistemology, which allows us to take an original position within the theory of dynamic routines. The choice of a single case study over a long period of time, and of a critical realist type, allowed us to develop an in-depth analysis of the handoff routine in its triple performative, ostensive and material dimension, but also of the context and structures within which this routine takes shape.