Thèse de doctorat en Littérature comparée
Sous la direction de Véronique Gély.
Soutenue le 19-11-2021
à Sorbonne université , dans le cadre de École doctorale Littératures françaises et comparée (Paris ; 1992-....) , en partenariat avec Centre de recherche en littérature comparée (Paris) (équipe de recherche) .
Le président du jury était Romuald Fonkoua.
Le jury était composé de Yolaine Parisot, Kerry-Jane Wallart.
Les rapporteurs étaient Delphine Rumeau, Yves Clavaron.
Les œuvres d’Édouard Glissant (1928-2011) et de Derek Walcott (1930-2017), deux auteurs majeurs de la littérature caribéenne francophone et anglophone, construisent des rapports de réécriture et de dialogue avec d’autres œuvres littéraires. Les deux auteurs, qui se citent et se répondent l’un à l’autre, affichent ainsi ce que nous appelons des poétiques intertextuelles, créant une écriture en réseau qui intègre et confronte des traditions littéraires antérieures, notamment européennes. Loin d’être une réplique ou une réaction, cette pratique d’une écriture qui se tisse d’autres textes et se nourrit d’eux tend vers le dépassement d’un rapport binaire qui la figerait dans un face à face entre colonisateur et colonisé. Notre thèse, qui porte sur un corpus composé de la poésie, des romans, et des écrits théoriques des deux auteurs, s’appuie sur une approche double. L’intertextualité explicite, entre les deux auteurs et entre chaque auteur et d’autres œuvres, ouvre sur la comparaison des rapports que chaque auteur entretient avec des corpus similaires de textes. En partant d’une analyse des archives des deux auteurs et des bibliothèques de références qui apparaissent dans leurs œuvres, nous étudions le rapport dialectique de Walcott et Glissant à l’Antiquité grecque et latine, lourde d’associations à l’autorité symbolique de la culture européenne et outil historique de justification d’une hiérarchie entre les cultures. Cette pratique dialectique de l’intertextualité mène les deux auteurs à représenter le monde comme réseau et relation, où les transferts culturels et les interactions entre les langues prennent la place d’une cartographie statique.
“Our myths are ignorance” : intertextual poetics in the works of Édouard Glissant and Derek Walcott
The works of Édouard Glissant (1928-2011) and Derek Walcott (1930-2017), two major representatives of contemporary Caribbean literature in French and English, build relationships of rewriting and dialogue with other literary works. Both authors, who cite and respond to each other, thus display what we call intertextual poetics, creating a networked writing that integrates and confronts previous literary traditions, especially European ones. Far from being a retort or a reaction, this practice of writing that weaves itself through other texts goes beyond a binary relationship between colonizer and colonized. Our thesis, which focuses on the poetry, novels, and theoretical writings of the two authors, relies on a dual approach. The study of explicit intertextuality, between the two authors and between each author and other works, gives way to a comparison of the relationships that each author entertains with similar bodies of texts. Beginning with an analysis of the archives of the two authors and of the libraries of references that appear in their works, we then study Walcott and Glissant’s dialectical relationship to Greek and Latin Antiquity, heavily associated with the symbolic authority of European culture, and a historical tool for justifying a hierarchy between cultures. This dialectic practice of intertextuality leads the two authors to represent the world as a network of relations, where cultural transfers and interactions between languages take the place of static cartography.