Thèse soutenue

Acquisition de la prosodie en L2 : une étude acoustique de l'accentuation en français par des adultes turcophones

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Auteur / Autrice : Aline Marchand
Direction : Mehmet-Ali AkıncıDavid Le Gac
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences du langage - linguistique
Date : Soutenance le 15/12/2020
Etablissement(s) : Normandie
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Normandie Humanités (Mont-Saint-Aignan, Seine-Maritime)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Laboratoire dynamique du langage in situ (Mont Saint Aignan, Seine-Maritime ; 2017-.....)
Etablissement de préparation de la thèse : Université de Rouen Normandie (1966-....)
Jury : Président / Présidente : Damien Chabanal
Examinateurs / Examinatrices : Mehmet-Ali Akıncı, David Le Gac, Véronique Miguel Addisu, Fabián Santiago Vargas
Rapporteurs / Rapporteuses : Tomáš Duběda

Résumé

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Cette étude transversale et expérimentale, menée dans une perspective acquisitionniste, porte sur l’appropriation des accents final (AF) et initial (AI) en français L2 par 19 adultes plurilingues turcophones (13 femmes et 6 hommes). Ils sont âgés de 18 à 47 ans, vivent plusieurs mois ou années en France (Normandie) et sont de niveau A1 à C1-­‐C2 en français (CECRL). Étant donné les convergences et divergences entre ces accents AF et AI en français et les accents primaire (A1) et secondaire (A2) en turc concernant leurs places, fonctions et paramètres acoustiques, l’objectif est de voir comment sont réalisés ces accents en français L2 par les locuteurs turcs. L’analyse contrastive des deux systèmes accentuels suggère que, par rapport au français L1, les locuteurs turcs réalisent plus d’écarts phonétiques que d’écarts phonologiques. L’analyse acoustique avec le logiciel Praat des énoncés produits lors de la lecture oralisée d’un corpus contrôlé confirme cette principale hypothèse. Sur le plan phonologique, l’AI et l’AF en français L2 sont bien placés, respectivement en début et fin de mot lexical et de Syntagme Prosodique/Phonologique (SP), avec leur fonction surtout démarcative et les paramètres acoustiques pertinents (surtout F0 et durée). L’AI n’est pas non plus réinterprété comme un A1 turc non final. Mais les locuteurs sont confrontés à deux problèmes importants. D’une part, au niveau phonologique, ils ont des difficultés à réaliser les deux accents du français comme des accents de groupe (le SP vs le Mot Prosodique ou Phonologique/MP en turc). C’est pourquoi ils produisent plusieurs SP courts au lieu de quelques SP longs. Les débutants réalisent aussi des AF sur les mots grammaticaux, inexistants en turc. Enfin, plusieurs locuteurs produisent des pauses après les mots, dues en partie à la tâche choisie : les SP sont en fait souvent des Unités Intonatives (Intonational Phrases/IP). D’autre part, sur le plan phonétique, les locuteurs ont des difficultés à gérer en français les proportions des allongements et des variations de F0, ainsi parfois que l’alignement temporel des pics accentuels par rapport aux syllabes accentuées. Leur sur-­‐ utilisation des accents et des allongements confirme d’autres études, mais ces résultats ne confirment pas entièrement les prédictions de l’Hypothèse de la surdité accentuelle (Dupoux et al. 1997/2010). En effet, les turcophones sont « sourds » aux accents de groupe du français, mais pas à l’allongement des syllabes accentuées. Ces résultats confirment en partie les prédictions de la version modérée de l’Hypothèse de l’Analyse Contrastive (Brown 1987, Flege 1992) : c’est la ressemblance entre l’emplacement final de l’AF français au niveau du SP et de l’A1 turc au niveau du MP qui pose des difficultés. Les résultats confirment surtout les prédictions de l’Hypothèse de la Différence de Marque (Eckman 1977/2008) : l’A1 turc est plus complexe au niveau du mot lexical que l’AF français, c’est pourquoi les locuteurs turcs perçoivent les différences de l’AF français à ce niveau. En revanche, l’AI et l’AF français sont plus marqués car leur domaine de réalisation est le groupe de mots (SP), d’où les difficultés des locuteurs à acquérir ce domaine prosodique.