Thèse soutenue

Pourquoi pas les abysses ? : L’ADN environnemental pour l’étude de la biodiversité des grands fonds marins

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Auteur / Autrice : Miriam Isabelle Brandt
Direction : Sophie Arnaud-Haond
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de l'évolution et de la biodiversité
Date : Soutenance le 10/07/2020
Etablissement(s) : Montpellier
Ecole(s) doctorale(s) : GAIA (Montpellier ; École Doctorale ; 2015-...)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Unité Mixte de Recherche CNRS-IFREMER-IRD-UM 9190 MARBEC Marine Biodiversity, Exploitation and Conservation Université de Montpellier
Jury : Président / Présidente : Anne Chenuil
Examinateurs / Examinatrices : Sophie Arnaud-Haond, Anne Chenuil, Naiara Rodriguez-Ezpeleta, Sofie Derycke, Jan Pawłowski, Frédérique Viard
Rapporteurs / Rapporteuses : Naiara Rodriguez-Ezpeleta, Sofie Derycke

Résumé

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Les fonds abyssaux couvrent plus de la moitié de la planète Terre. Ils peuvent héberger un grand nombre d'organismes(~ 50000 à 5 millions d'individus/m2), pour la plupart petits et encore non décrits, contribuant à des fonctions écosystémiques clés telles que le recyclage du carbone ou la productivité secondaire.Les développements technologiques ont permis des avancées remarquables, mais l'immensité et l'éloignement des habitats profonds ont restreints les études de biodiversité aux niveaux local et régional. Nous avons exploré moins de 1% des fonds marins, alors que ces-derniers forment l'un des plus grands biomes sur Terre et sont de plus en plus sous pression anthropique.Cette thèse vise à apporter de nouvelles perspectives pour l'étude de la biodiversité et de la biogéographie en environnements profonds, pour combler ce grand écart de connaissances et permettre le développement de protocoles de biosurveillance efficaces.Nous avons étudié le potentiel du métabarcoding d’ADN environnemental (ADNe) pour évaluer l'étendue et la distribution de la biodiversité en environnements profonds. À l'aide de gènes marqueurs mitochondriaux et nucléaires, cette thèse vise à produire un protocole de métabarcoding d’ADNe pour les sédiments des grands fonds, optimisé à un niveau de traitement bioinformatique, moléculaire et d'échantillonnage, et applicable à plusieurs compartiments du vivant.L'évaluation de la biodiversité avec l'ADNe est confrontée à la difficulté de définir des Unités Taxonomiques Opérationnelles moléculaires (OTU) au niveau de «l'espèce», car de nombreuses sources d'erreur induisent de fréquentes surestimations. Le premier chapitre de cette thèse décrit comment des outils bioinformatiques nouvellement développés peuvent être combinés afin d'obtenir des inventaires plus conservateurs et fiables, approchant une correspondance 1:1 espèce-OTU, et soulignent les avantages du clustering et de l’outil LULU pour produire des inventaires de biodiversité métazoaire plus fiable.De plus, la précision des protocoles basés sur l'ADNe dans les sédiments profonds reste à évaluer, car les résultats pourraient être biaisés par de l'ADN ancien archivé dans le sédiment, ce qui conduirait à des estimations de biodiversité passée plutôt que présente. Dans un second temps, nous avons donc estimé le biais de l'ADN ancien en 1) évaluant l'effet de l'élimination de courts fragments d'ADN, et 2) en comparant les communautés révélées par l'ADN et l'ARN co-extraits. Les résultats indiquent que les fragments d'ADN courts n'affectent pas la diversité alpha et bêta, et que l'ADN obtenu à partir de 10 g de sédiments est plus approprié que l'ARN pour des études logistiquement réalistes, et que les réplicas biologiques plutôt que techniques sont importants pour inférer des patrons écologiques fiables.Le tamisage des sédiments pour séparer les organismes benthiques par classe de taille a augmenté le nombre d'OTU métazoaires détectées, mais n'était pas essentiel pour obtenir des estimations précises de la biodiversité, et devrait être évité si les compartiments taxonomiques unicellulaires sont également ciblés.Enfin, les protocoles optimisés de métabarcoding d'ADNe ont été appliqué pour étudier l'influence de facteurs biotiques et abiotiques sur la biodiversité métazoaire des grands fonds, allant de la Méditerranée centrale à la dorsale médio-atlantique. Les résultats confirment que des facteurs agissant à très petite échelle (cm) conduisent à des changements verticaux significatifs de la richesse et de la structure des communautés dans les sédiments, et soulignent que les tendances régionales de diversité bêta résultent d'une influence combinée de la biogéographie passée et de phénomènes actuels.Cette thèse ouvre la voie à des études de biodiversité globale dans les environnements profonds, contribuant ainsi à une meilleure compréhension de la biogéographie et des fonctionnement des écosystémiques dans ce vaste biome encore mal connu.