Thèse de doctorat en Sciences de l'évolution et de la biodiversité
Sous la direction de Patrice David et de Philippe Jarne.
Soutenue le 27-11-2019
à Montpellier , dans le cadre de GAIA (Montpellier ; École Doctorale ; 2015-...) , en partenariat avec Centre d'écologie fonctionnelle et évolutive (Montpellier) (laboratoire) .
Le président du jury était Sylvie Hurtrez-Boussès.
Le jury était composé de Patrice David, Philippe Jarne, Sylvie Hurtrez-Boussès, Sandrine Pavoine, Emmanuelle Cam, Olivier Hardy.
Les rapporteurs étaient Sandrine Pavoine, Emmanuelle Cam.
Les variations de composition et d'abondances relatives dans les communautés biologiques résultent de nombreux processus : filtres environnementaux, interactions inter-spécifiques, dispersion et stochasticité. Le plus souvent, les empiristes essaient d'évaluer leur importance relative sur la base des traces qu'ils laissent sur la structure spatiale des communautés. Cependant, ces traces sont souvent ambiguës. Les données temporelles (lorsque les échantillonnages sont répétés dans le temps) contiennent des informations sur l'histoire des communautés qui pourraient permettre de résoudre, du moins en partie, ces ambiguïtés. Dans ma thèse, je développe et explore des méthodes pour analyser les données spatio-temporelles afin de comprendre la dynamique d'un ensemble de communautés liées par la migration (métacommunauté). Ces méthodes ont été appliquées a trois jeux de données long-terme de métacommunautés d'organismes d'eau douce (escargots en Guadeloupe et Martinique, et Daphnia spp. en Finlande). J'analyse dans un premier temps la métacommunauté d'escargots en Guadeloupe à l'aide d'approches fondées sur les processus (en utilisant les différentes dates d’échantillonnage comme des réplicats) et de modèles d'estimation conjointe de distributions d'espèces considérant explicitement la dépendance d'un échantillon au précédent. Cette approche montre comment les interactions inter-spécifiques, les filtres environnementaux et les dynamiques stochastiques de colonisation/extinction forment les variations spatio-temporelles de richesses spécifiques et de composition des communautés. Dans un second temps, je développe des modèles de métapopulation multi-espèces pour analyser des systèmes à deux ou trois espèces (Guadeloupe et Finlande). Les paramètres estimés sont ensuite utilisés dans des simulations pour analyser comment la compétition et les différences de niches contribuent à la coexistence. Dans les deux cas, bien que la compétition réduit de manière significative les co-occurrences au niveau local, cette dernière est loin d'être suffisante pour menacer la coexistence à l'échelle du paysage. L'exclusion régionale semble en effet nécessiter des niveaux de compétition particulièrement forts, notamment lorsque les dynamiques stochastiques de colonisation/extinction sont importantes. De telles conditions (interactions fortes et faible stochasticité) sont retrouvées dans le jeu de données Martinique (un ensemble de onze taxa fortement apparentés et à reproduction clonale habitant des rivières permanentes). Dans ce dernier cas, je développe une approche inspirée de la génétique des populations, pour inférer les hiérarchies compétitives le long d'une ou de deux dimensions, et comment ces hiérarchies varient dans l'espace et le temps pour expliquer les patrons d'exclusion et de coexistence. Pour conclure, ce travail montre que la dimension temporelle permet d'extraire de nombreuses informations sur les processus agissant aux échelles locale et régionale. A l'avenir, une perspective plus intégrative pourrait émerger de modèles de métacommunautés couplant de manière explicite les dynamiques locale et régionale.
"Coquillages et crustacés" : spatiotemporal dynamic of freshwater metacommunities
Species communities vary as a result of many processes: filtering of species by environments, interspecific interactions, dispersal, and stochastic processes. Empiricists often try to evaluate their respective roles based on the traces they leave on the spatial structure of communities. Unfortunately these traces are often ambiguous. Temporal data (surveys repeated through time) convey historical information that may help resolve ambiguities. In this thesis, I explore and develop different methods to analyze spatio-temporal data in order to understand the dynamics of sets of communities linked by dispersal within fragmented landscapes (metacommunities). These methods are applied to three long-term datasets from freshwater metacommunities (snails in the Guadeloupe and Martinique islands and Daphnia spp. in Finland). I first analyze the metacommunity of Guadeloupe snails using both pattern-based approaches (using successive years as replicates) and joint species distribution models explicitly relating time t to time t-1. This approach documents how species interactions, filtering by local environmental conditions, and stochastic colonizations and extinctions shape spatio-temporal variation in community richness and composition. Second, I develop explicit multi-species metapopulation models to analyze two- or three-species systems (taken in Guadeloupe and Finland). The fitted parameters are used in simulations to analyze how competition and niche differences contribute to species coexistence. Remarkably, in both cases, although competition significantly limits species co-occurrence at a local scale, it is far for being strong enough to threaten coexistence at the landscape level. Regional exclusion seems to require uncommonly strong competition, in the presence of highly stochastic colonization-extinction dynamics. Such conditions (strong interactions and weak stochasticity) may characterize the Martinique dataset (a set of 11 clonal, related invasive taxa inhabiting permanent rivers). In this case, I develop an approach inspired by population genetics, inferring one- or two-dimensional competitive hierarchies among taxa and how they vary in space and time to explain exclusion and/or coexistence patterns. Overall, this work shows that the temporal dimension carries a lot of information on community processes acting both at the local and regional scales. An even more integrative view may, in the future, arise from metacommunity models explicitly coupling the dynamics of local and regional species abundances.
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