Apports de l’analyse de l’ADN environnemental et de la génomique du paysage pour la conservation des requins de récif
Auteur / Autrice : | Germain Boussarie |
Direction : | David Mouillot, Laurent Vigliola |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Ecologie des communautés |
Date : | Soutenance le 12/04/2019 |
Etablissement(s) : | Montpellier |
Ecole(s) doctorale(s) : | GAIA (Montpellier ; École Doctorale ; 2015-...) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Unité Mixte de Recherche CNRS-IFREMER-IRD-UM 9190 MARBEC Marine Biodiversity, Exploitation and Conservation Université de Montpellier |
Jury : | Président / Présidente : Claude Miaud |
Examinateurs / Examinatrices : David Mouillot, Laurent Vigliola, Claude Miaud, Frédérique Viard, Philippe Lenfant, Michel Kulbicki | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Frédérique Viard, Philippe Lenfant |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Les requins forment un des groupes de prédateurs les plus diversifiés, jouant des rôles importants au sein des écosystèmes marins. Ils forment également l’un des groupes les plus menacés car vulnérables aux pressions anthropiques du fait de leurs traits de vie particuliers. Malgré l’importance des ressources déployées pour le suivi des populations de requins, 41 % des 482 espèces recensées dans la Liste Rouge de l’UICN n’ont pas de statut de conservation par manque de données. Il devient donc primordial d’améliorer les connaissances sur ces espèces afin de les protéger et enrayer leur déclin. Il s’agit notamment de mieux caractériser la présence, la structure et la connectivité des populations de requins pour mieux définir leur statut UICN, les zones prioritaires de gestion et optimiser les efforts de conservation mis en place. Cette thèse s’appuie sur l’émergence de nouvelles technologies pour combler les lacunes de connaissances sur les requins des récifs coralliens tropicaux et proposer des actions de gestion. D’une part, une méthode d’analyse des communautés de requins par collecte et séquençage d’ADN présent dans l’environnement (métabarcoding d’ADN environnemental ; ADNe) a été développée au cours de cette thèse, puis mise en parallèle avec des suivis exhaustifs par des méthodes traditionnelles d’étude des populations de requins. Cette approche rapide et non-invasive a permis d’identifier 21 espèces de requins dans les eaux de deux domaines biogéographiques distincts (Caraïbes et Nouvelle-Calédonie). De plus, les patrons de diversité et d’abondance des fragments d’ADNe détectés coïncident avec les gradients de pression anthropique et les niveaux de protection des zones échantillonnées. L’analyse de 22 échantillons d’ADNe dans l’archipel de la Nouvelle-Calédonie a permis de déceler la présence de plus d’espèces que par 2 758 plongées scientifiques réparties sur presque 30 ans et 385 caméras appâtées déployées pendant deux ans, et ce, à la fois proche de l’homme et dans les récifs éloignés. D’autre part, la structure et connectivité des populations d’une espèce plus commune, Carcharhinus amblyrhynchos, ont été caractérisées par une approche de génomique du paysage. Cette thèse s’appuie sur un échantillonnage génétique conséquent en Nouvelle-Calédonie et dans plusieurs autres sites de l’Indo-Pacifique (515 requins). Une approche d’isolement par la résistance via la théorie des circuits a été développée afin de caractériser les paramètres influençant la dispersion de cette espèce. Ainsi, il a été montré que les zones de forte bathymétrie constituent une forte barrière à la dispersion tandis que la proximité à l’habitat récifal en est un facilitateur. La modélisation de la différenciation génétique à haute résolution et à l’échelle de l’aire de répartition de cette espèce (Indo-Pacifique) a permis de définir des unités de conservation hiérarchiques et un nombre important de sites isolés. Enfin, une approche intégrant le déclin des abondances dans les zones anthropisées a montré une fragmentation des populations de C. amblyrhynchos et a permis d’identifier certains récifs éloignés de l’homme comme refuges mais aussi sources pour un repeuplement éventuel des récifs où les populations sont menacées. Cette thèse démontre ainsi le potentiel de l’analyse de l’ADNe pour dévoiler la présence d’espèces rares et furtives telles que les requins, donnant espoir pour combler les lacunes dans leurs statuts de conservation UICN. Elle révèle également la persistance des populations résiduelles en milieu anthropisé, qui pourraient éventuellement montrer des altérations comportementales comme l’utilisation d’habitats plus profonds ou une nocturnalité plus importante. Elle décrit enfin non seulement la structure fine à grande échelle des populations d’une espèce quasi-menacée, mais identifie également des unités de conservation et des zones prioritaires à protéger pour une spatialisation des mesures de gestion à différentes échelles.