Thèse soutenue

L’apport des écoles italiennes dans les premières cartes de l’Océanie

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Richard Cagnasso
Direction : Serge TcherkézoffBernard Rigo
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Anthropologie sociale et historique
Date : Soutenance le 06/06/2019
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales
Jury : Président / Présidente : Renaud Meltz
Examinateurs / Examinatrices : Renaud Meltz, Vladimiro Valerio, Jean Boutier, Adriano Favole, Alexander Dale Mawyer, Sarah Mohamed-Gaillard
Rapporteurs / Rapporteuses : Renaud Meltz, Vladimiro Valerio

Résumé

FR  |  
EN  |  
IT

Notre recherche porte sur la cartographie italienne de l’Océanie entre 1790 et 1850, mais en suivant son développement au travers des dialogues (et des conflits) entretenus avec les autres pays européens, et en particulier la France, et en liant intimement les discussions sur les premiers toponymes posés sur les cartes (les inventions de Oceania, Micronesia, Meganesia, Mondo Marittimo, etc.) avec les premières classifications des peuples énoncées par ces mêmes géographes qui voulaient ajouter aux noms géographiques des classifications permettant de distinguer les peuples, les variétés humaines, les « races » : Pinkerton, Malte-Brun, Walckenaer, Dumont d’Urville, Galanti, Balbi, Borghi, de Luca et Marmocchi. Trois parties se succèdent. Dans la première, nous observons le travail des géographes de cabinet en Angleterre et en France avant d’observer en détail les écoles italiennes. En contrepoint, nous observons les géographes qui furent navigateurs-explorateurs, en commençant avec l’Italie du 16e siècle, puis une revue rapide des tentatives qui furent faites pour nommer l’Océanie entière (la « cinquième partie du monde ») et ses régions. L’étude des écoles italiennes nous conduit dans les villes : Milan, Venise, Rome, Florence et Naples, leurs lieux d’échanges (académie, cabinet littéraires), en regardant aussi qui furent les grands éditeurs ou géographes-éditeurs. Nous terminerons cette première partie par une comparaison des théories proposées en France, Angleterre et Italie pour la classification des peuples, en général et en Océanie en particulier, selon que le type de discrimination choisi était les langues, les « nations » ou encore les « races ». La deuxième partie est consacrée aux relations entre géographes au niveau européen : les relations entretenues par les Italiens avec leurs voisins, surtout français et anglais, et parfois allemands, et nous observons la manière dont les savoirs se diffusent et sont discutés, avec Adriano Balbi comme fil d’Ariane : chronologie des publications, des dénominations, les cas particuliers des inventions d’Ulimaroa, Terres Océaniques, Notasie, puis les échanges sur les termes Océanique-Océanie, Mondo Marittimo et les choix de Balbi, la création italienne de Meganesia et de Micronesia, les discussions sur la classification des peuples, de Balbi à Dumont d’Urville, et la manière dont la plupart des écoles italiennes restent à l’écart du modèle de Dumont d’Urville pendant une vingtaine d’années. La troisième partie revient en détail sur les inventions et les appropriations des géographes italiens : la Meganesia, la Micronesia, le Mondo Marittimo. Cette observation montre l’imbrication extrême des dialogues, ou des conflits, entre nos géographes italiens et avec leurs voisins français et anglais. Elle nous conduit aussi, à propos de l’appropriation du terme « Micronésie », à regarder de bien plus près le rôle de Dumont d’Urville à cette époque, sa manière bien particulière d’imposer ses points de vue et d’écarter ceux des autres géographes, et l’on pourra mesurer, sans aucun doute quant aux motivations, à quel point sa fameuse carte de l’Océanie fut entièrement le produit d’une théorie sur les « races » et non une simple proposition cartographique. Cette clarification sera singulièrement renforcée par l’étude que nous ajoutons d’un long texte de Dumont d’Urville, un manuscrit qu’il avait rédigé en 1825-1826, resté inachevé et inédit, et que nous avons analysé et transcrit. Notre conclusion nous fait rester dans l’univers cartographique italien, et dans la manière dont une carte peut imposer un point de vue, mais en passant de l’Océanie à l’Italie. En effet, trois des principaux géographes italiens qui nous auront accompagnés durant l’examen des cartes de l’Océanie furent aussi des acteurs de premier plan dans une cartographie au service de la construction politique d’une Italie unitaire (le Risorgimento) et l’on commentera cette autorité que la carte peut imposer à l’occasion.