Thèse soutenue

Ecouter et regarder lire : la réception des lectures publiques à haute voix

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Auteur / Autrice : Colette Danieau-Kleman
Direction : Dominique Rabaté
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire, histoire de l’art et archéologie. Histoire et sémiologie du texte et de l'image
Date : Soutenance le 06/04/2018
Etablissement(s) : Sorbonne Paris Cité
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Langue, littérature, image, civilisations et sciences humaines (domaines francophone et anglophone) (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : établissement de préparation : Université Paris Diderot - Paris 7 (1970-2019)
Laboratoire : Centre d'étude et de recherche interdisciplinaire de l'UFR LAC (Paris ; 2009-....)
Jury : Président / Présidente : Nathalie Piégay
Examinateurs / Examinatrices : Dominique Rabaté, Nathalie Piégay, Chantal Lapeyre-Desmaison, Olivier Bessard-Banquy
Rapporteurs / Rapporteuses : Chantal Lapeyre-Desmaison, Olivier Bessard-Banquy

Résumé

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Cette thèse rend compte des usages et des pratiques à l’œuvre dans les lectures publiques actuelles. Et plus précisément de leur réception par les auditeurs-spectateurs, pendant et après les lectures. Les sources et matériaux utilisés sont divers : ce sont en partie des récits de réception empruntés à la littérature classique ou contemporaine, et aux publications de chercheurs en sciences humaines et sociales. J’ai d’autre part utilisé mes propres récits, des narrations rédigées après avoir assisté à des lectures publiques à voix haute. J’ai donc construit mes matériaux à partir de ce que j’ai éprouvé au milieu d’une assemblée, au milieu des autres, au milieu d’autres corps. Je me suis autorisée et inspirée de la « pensée par cas » (ou « singularités »), une méthode qui suppose une pratique d’auto-observation inspirée de l’approche clinique. Elle écarte donc toute prétention au réalisme ou à l’objectivisme. Les lectures publiques sollicitent simultanément l’œil et l’oreille. La réception des auditeurs-spectateurs, qu’elle soit recueillie ou éprouvée en personne, apparaît souvent très individuée, peu normée.Un prologue fait retour sur trois périodes de la grande histoire de la lecture : récits de lectures à voix haute partant de l’Antiquité grecque et romaine jusqu’à une période récente. Les deux autres parties s’attachent ensuite à éclairer les rapports qui se nouent entre les acteurs présents à des lectures données en public, de nos jours. Rapports d’échange ou d’altérité, ou bien rapports de pouvoir, ils révèlent la manière dont se forment les réceptions individuelles - à partir des récits ou cas et de leur rapprochement avec d’autres corpus disciplinaires. Mais le matériau est hétérogène, labile, instable, parfois étrange. Aussi ce parcours ne va pas en ligne droite : il est sillonné d’allers et retours et de bifurcations ; emporté par des processus associatifs, arrêté ou suspendu par des détails sonores ou visuels, parfois infimes ; ou par la qualité du silence. Son tracé apparaît donc a posteriori.L’acte d’écouter-regarder lire au milieu d’une assemblée, et ses retentissements dans le for intérieur, incitent constamment à se déplacer mentalement, à sortir de soi ou à passer du « je » au « nous ». Le « nous » signifie que j’intègre en silence la présence du Lecteur sonore et des autres auditeurs-spectateurs, que je les associe à ma réception : l’individu dit « nous » (dans son intimité comme en société) en s’adressant ou en s’incluant aux autres. Les lectures publiques touchent à la fois l’individuel et le collectif ; voire questionnent le concept de communauté.Elles nous reconduisent naturellement à des relectures et s’offrent elles-mêmes comme forme singulière de relecture. Elles nous conduisent aussi à d’autres pratiques du partage grâce à l’usage de la voix haute ; à d’autres modes d’exister de la littérature, d’autres formes d’oralité (les groupes de lecture, la récitation, le témoignage, le cinéma). In fine, ce travail met au jour une expérience, et les « savoirs » singuliers qu’elle engrange et diffuse. Cette expérience peut être transmise, reprise, re-questionnée et discutée. Car les lectures publiques, censées nous immobiliser ou nous sidérer sur un fauteuil, nous engagent personnellement dans le rapport à autrui. Ce n’est pas le moindre enseignement de cette aventure.