Thèse soutenue

Rôle de la réponse immunitaire de type 2 dans la réparation tissulaire : du concept au modèle pratique de la sclérodermie systémique

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Auteur / Autrice : Paôline Laurent
Direction : Thomas Pradeu
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Microbiologie-immunologie
Date : Soutenance le 12/11/2018
Etablissement(s) : Bordeaux
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la vie et de la santé (Bordeaux)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : ImmunoConcEpT Immunologie Conceptuelle, Expérimentale et Translationnelle (Bordeaux ; 2003-....)
Jury : Président / Présidente : Julie Dechanet-Merville
Examinateurs / Examinatrices : Thomas Pradeu, Julie Dechanet-Merville, Gérard Eberl, Jérôme Avouac, Lucie Laplane, Marie-Élise Truchetet
Rapporteurs / Rapporteuses : Gérard Eberl, Jérôme Avouac

Résumé

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Pour beaucoup d’entre nous, y compris pour de nombreux immunologistes, le rôle du système immunitaire est restreint à un rôle de défense contre différents pathogènes, tels que les bactéries et les virus. Pourtant, il devient de plus en plus incontestable que le système immunitaire est impliqué dans de nombreux autres phénomènes que peuvent être le cancer, l’obésité et la réparation tissulaire. Au cours de cette thèse, nous nous sommes intéressés à l’implication des cellules immunitaires, et plus particulièrement des cellules immunitaires innées, dans le mécanisme de réparation tissulaire. Par la suite, nous avons approfondi ce travail en nous focalisant sur les dérégulations de la réparation tissulaire. Ces dérégulations peuvent donner lieu notamment à des phénomènes de « sur-réparation » telle que la fibrose. La fibrose est définie comme un dépôt excessif de matrice extracellulaire par les fibroblastes en réponse à des molécules profibrotiques tels que le TGFβ ou l’IL-13. Nous nous sommes donc intéressés au rôle de la réponse immunitaire innée dans la fibrose en nous concentrant sur deux types de cellules immunitaires innées : les macrophages et les cellules lymphoïdes innées de type 2 (type 2 innate lymphoïde cells, ou « ILC2 »). Nous avons choisi comme modèle d’étude la sclérodermie systémique, maladie auto-immune caractérisée principalement par la fibrose pouvant toucher la peau et/ou les organes internes. Outre la fibrose, cette pathologie est également associée à des anomalies vasculaires et immunitaires. Les mécanismes liant ces trois caractéristiques sont encore mal définis et mal connus. Il est donc nécessaire de comprendre la physiopathologie de cette maladie et d’établir précisément l’implication de la réponse immunitaire dans la fibrose afin d’offrir un traitement thérapeutique pour les patients sclérodermiques et plus généralement pour toutes les maladies fibrotiques. Dans un premier temps, nous montrons, en cytométrie de flux, une diminution des ILC2 dans le sang des patients sclérodermiques par rapport aux témoins (0,007 ± 0,007% vs. 0,01 ± 0,01%, p=0,001). Chez les sujets sclérodermiques, cette baisse de la fréquence des ILC2 circulantes est inversement corrélée à l’atteinte de la fibrose cutanée définie par le score de Rodnan (R=-0,35, p=0,0062). Nous observons une augmentation de ces cellules dans la peau sclérodermique comparé à celle des contrôles (5,015 ± 2,8% vs. 2,816 ± 1,8%). Ce résultat est positivement corrélé au score de Rodnan (r=0,58, p=0,01). Nous obtenons des résultats similaires en immunofluorescence. Un phénotypage des ILC2 dermales nous a permis d’observer une diminution de l’expression de KLRG1 dans la peau des malades. En collaboration avec l’équipe du Pr. Batteux, nous avons étudié le rôle des ILC2 dans un modèle murin de sclérodermie. Nous observons une augmentation cutanée des ILC2 et cela même avant l’établissement de la fibrose au niveau de la peau des souris sclérodermiques (16677 ± 3068 vs. 9091 ± 474). Puis, nous montrons, in vitro, que les ILC2 stimulées par le TGFb perdent l’expression de KLRG1. Au contact des ILC2 stimulées par le TGFb, les fibroblastes deviennent pro-fibrotique en comparaison à l’incubation avec des ILC2 non stimulées. Ces résultats apportent de nouvelles connaissances dans la physiopathologie de la sclérodermie systémique et plus particulièrement dans la fibrose caractérisant cette maladie, ce qui offre des perspectives thérapeutiques potentielles. L’approche conceptuelle du rôle du système immunitaire dans la réparation tissulaire proposée dans cette thèse renouvelle notre vision de l’immunité et ouvre potentiellement un nouveau champ, encore sous-estimé, de thérapies ciblant le système immunitaire.