Thèse soutenue

Lucrezia Gonzaga et Ortensio Lando. Enjeux et contraintes d'un camouflage épistolaire (1552)

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Auteur / Autrice : Elisabetta Simonetta
Direction : Corinne Lucas-Fiorato
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Études italiennes
Date : Soutenance le 11/12/2017
Etablissement(s) : Sorbonne Paris Cité
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Europe latine et Amérique latine (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : établissement de préparation : Université de la Sorbonne Nouvelle (Paris ; 1970-....)
Laboratoire : Les Cultures de l'Europe méditerranéenne occidentale (Paris)
Jury : Président / Présidente : Jean-Luc Nardone
Examinateurs / Examinatrices : Corinne Lucas-Fiorato, Jean-Luc Nardone, Marie-Françoise Piéjus, Carlo Alberto Girotto

Résumé

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Les lettres de Lucrezia Gonzaga da Gazzuolo (1524-1576), imprimées pour la première fois à Venise en 1552 et republiées en 2009 seulement, constituent un riche corpus épistolaire en partie inexploré qui n’a pas encore fait l’objet d’une étude systématique. Les quelques travaux critiques qui nous ont introduit à une lecture du recueil montraient la pertinence d’une vaste analyse intertextuelle de ce livre de lettres. Notre étude a révélé la présence constante et multiforme de la figure intellectuelle de son éditeur non déclaré : le polygraphe Ortensio Lando. Son choix éditorial consistant à miser sur l’exemplarité que Lucrezia incarnait dans son vécu à la fois actif et tragique découle de l’importance croissante que l’industrie culturelle accordait aux femmes-auteurs et, par conséquent, au public féminin.Sur le recueil pèse le doute d’une paternité problématique qui nous a conduit à placer au centre de notre réflexion le rapport d’interdépendance qui liait étroitement Lucrezia à Ortensio Lando. La thèse révèle la dépendance formelle et thématique des lettres par rapport à l’écriture ‘irrégulière’ du polygraphe irrévérencieux. Cela permet de dévoiler toute l’ampleur d’une tortueuse initiative éditoriale conçue et orchestrée par Lando dont la visée principale s’est avérée être la diffusion d’une nouvelle forme de dissidence spirituelle inspirée par la Philosophia Christi d’Érasme. Face à une crise religieuse croissante, cette diffusion, qui passe à travers l’usage de l’imprimerie, repose sur le succès retentissant du ‘livre de lettres’ et se manifeste, entre autres, par un prosélytisme réformiste complexe. Les lettres s’insèrent ainsi dans un univers littéraire enchevêtré qui concerne d’un côté les écrits de Lando publiés entre 1550 et 1554 et de l’autre, le vilipendé Enchiridion militis christiani d’Érasme, et elles deviennent, dans un moment d’intensification des contrôles inquisitoriaux, une forme discrète de diffusion de positions religieuses hétérodoxes. Le recueil représente aussi un terrain d’enquête fertile pour réfléchir sur le statut de la lettre en tant qu’instrument de diffusion de la modernité et d’affirmation socioculturelle de la femme cultivée, mais aussi pour évoquer des questions méta-littéraires telles que les notions d’autorité, d’authenticité et d’auctorialité, et pour s’interroger sur les possibilités et les limites éditoriales d’une consécration littéraire des femmes.