Thèse soutenue

Age, genre, fuck et Twitter : une analyse sociolinguistique des jurons dans un corpus de tweets britanniques

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Auteur / Autrice : Michaël Gauthier
Direction : Jim WalkerKristy Beers Fägersten
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Etudes anglophones Sociolinguistique
Date : Soutenance le 30/09/2017
Etablissement(s) : Lyon
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Lettres, langues, linguistique, arts (Lyon)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherches en terminologie et traduction (Bron, Rhône) - Centre de recherche en terminologie et traduction / CRTT
établissement opérateur d'inscription : Université Lumière (Lyon ; 1969-....)
Jury : Président / Présidente : Tony McEnery
Examinateurs / Examinatrices : Vaclav Brezina, Céline Poudat
Rapporteurs / Rapporteuses : Andrea Pizarro Pedraza

Résumé

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Parmi les traits traditionnellement associés au genre d’une personne, la manière dont les individus utilisent le langage est un facteur tout aussi important que d’autres aspects, potentiellement plus évidents, tels que la manière de s’habiller par exemple. La littérature recense de nombreux traits linguistiques faisant partie de ces idées associées à un genre ou l’autre tels que la tournure interrogative (tag question) ou la déférence par exemple. De toutes les caractéristiques linguistiques genrées, celle qui a probablement été le plus débattue est celle concernant l’utilisation des jurons. Ceci est principalement dû à des idées qui ont longtemps été associées à l’utilisation de la vulgarité : celles d’un langage « impur », blasphématoire ou encore d’un langage tabou. A cause d’une interaction complexe entre pression et pouvoir social, la vulgarité a traditionnellement été associée à l’idée de masculinité avant tout. Utiliser des jurons est souvent considéré comme étant l’affirmation linguistique d’une forme de pouvoir social. Par conséquent, l’association intrinsèque de la vulgarité comme forme de pouvoir à un genre ou l’autre pourrait conduire à l’association d’autres caractéristiques sociales aux questions de masculinité ou de féminité, qu’elles soient fondées ou non. Certaines études ont démontré que, contrairement aux idées longtemps répandues, les femmes n’utilisent pas la vulgarité moins souvent que les hommes, pas plus qu’elles n’utilisent un registre linguistique fondamentalement différent. Certaines ont même prédit que l’utilisation de jurons dits « forts » (i.e. « strong swear words ») chez les femmes augmenterait dans certains contextes, et en particulier sur les réseaux sociaux (Thelwall, 2008) ; ceci s’appliquerait particulièrement aux jeunes générations de femmes. En d’autres termes, l’utilisation de certains jurons chez ces jeunes générations de femmes deviendrait à terme plus fréquente que celle des hommes du même âge. Cette hypothèse correspond à certains travaux qui suggèrent que la communication assistée par ordinateur participe à l’autonomisation des femmes. Il serait donc intéressant de vérifier ces observations et prédictions près de dix ans après qu’elles aient été formulées afin de les confirmer ou de les réfuter. Par conséquent, la question suivante se pose : les prévisions faites par Thelwall en 2008 se sont-elles réalisées près de dix ans plus tard, dans une société où les médias sociaux n’ont jamais eu autant d’importance dans notre vie quotidienne ? Le but de cette thèse est donc double : tout d’abord elle vise à offrir une meilleure compréhension de la manière dont les femmes et les hommes utilisent la vulgarité sur les réseaux sociaux. Le second objectif de ce travail est de démontrer le potentiel de ce type de médias en tant qu’objet d’étude sociolinguistique synchronique (et potentiellement diachronique) de grande échelle.Cette étude est basée sur un corpus composé d’un peu plus de dix-huit millions de tweets représentatifs de près de 739 000 utilisateurs. Le corpus a été constitué à partir de tweets provenant du Royaume Unis, émis par des utilisateurs masculins et féminins, et appartenant à différentes tranches d’âge. Une méthodologie et des outils d’analyse issus de la linguistique dite de corpus ont été utilisés pour mener à bien ce projet et tenter de répondre aux problématiques soulevées précédemment. Aussi, en raison du manque d’informations démographiques directement associées aux profils Twitter (e.g. le genre et l’âge des utilisateurs), il fût nécessaire de recourir à des techniques issues de la programmation informatique afin d’inférer le genre et l’âge de ces personnes. Cette thèse entend donc améliorer les connaissances que nous avons du lien qu’il existe entre le genre, l’âge, l’utilisation de la vulgarité et les réseaux sociaux.