Thèse soutenue

Hommes, milieux, brebis et laits à la croisée des fromages : l’ancrage territorial des ovins laitiers en Corse et en Pyrénées-Atlantiques depuis la fin du XXe siècle

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Auteur / Autrice : Morgane Millet
Direction : Thierry Linck
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Géographie physique, humaine, économique et régionale
Date : Soutenance le 12/07/2017
Etablissement(s) : Corte
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Environnement et sociéte (Corte ; 2000-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire de recherches sur le développement de l'élevage (Corte, Haute-Corse) - Systèmes d'Elevage Méditerranéens et Tropicaux - Laboratoire de Recherche sur le Développement de l'Elevage / SELMET-LRDE
Jury : Examinateurs / Examinatrices : Claire Delfosse, Pascale Maïzi, Julien Frayssignes, Jean-Marie Furt, Christine Margetic, Laurent Rieutort, François Casabianca
Rapporteurs / Rapporteuses : Claire Delfosse, Pascale Maïzi

Résumé

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Questionner l’ancrage territorial d’un produit ne se limite pas à ce qui en marque la spécificité, c’est également s’interroger sur les liens entre ancrage et développement, c’est-à-dire sur l’incidence que peut avoir la valorisation des produits de terroir sur les tissus économiques et sociaux locaux. Cette référence à la durabilité permet d’identifier les enjeux liés à la mise en oeuvre des démarches de qualification (choix de définition du produit, modalités de son ancrage territorial et de partage de la valeur ajoutée). Ils renvoient à la cohérence de la démarche et des choix qui la sous tendent en terme d’aménagement, de rapport au vivant et de viabilité dans des temporalités longues. Cette posture appelle une approche processuelle. Le cas des filières ovins-lait en Corse et en Pyrénées-Atlantiques (PA ; Pays Basque et Béarn) est révélatrice : ces deux bassins ont connu l’emprise de l’institution Roquefort pendant près d’un siècle ; son retrait (années 1980) a conduit à une récente et profonde recomposition de l’ancrage territorial des filières et des produits locaux. Nous reprenons donc le fil des trajectoires suivies dans chaque bassin. Une approche comparative nous permet d’identifier les éléments mobilisés dans la construction sociale de la qualité des produits. Nous montrons que la construction de la spécificité et de l’ancrage, son interaction avec la réputation du produit et des lieux de production, dégage une rente qui devient l’enjeu de conflits d’intérêts et de stratégies d’appropriation contradictoires. Ces dynamiques se déploient au sein de structures spécifiques (AOC Ossau-Iraty, AOC Brocciu, Interprofessions locales), qui ont vocation à constituer les cadres pertinents de concertation, de négociation et de réglementation à l’échelon régional. Ces instances tendent à être appropriées par les acteurs ayant un poids économique majeur qui se donnent ainsi la capacité de « dire » ce qu’est la qualité du produit, au nom de l’ensemble du système productif. La construction de la qualité repose alors davantage sur la provenance que sur l’origine, vise un accroissement de l’offre et privilégie la performance économique : les exploitations des plaines et des piémonts, jugées plus « ouvertes » au changement, sont favorisées. La légitimité de ces instances est contestée localement, comme en témoigne l’émergence de projets de qualification et d’ancrage territorial alternatifs. Ce clivage est à la fois technique et professionnel : il met à nu une opposition forte entre fermiers et laiteries, et entre syndicats agricoles. Les formes alternatives peuvent participer à réorienter la qualification des produits (Ossau-Iraty ; PA), ou ne pas donner lieu à l’émergence de projets pérennes, ce qui conforte les intérêts en place (Corse).