Thèse soutenue

Evaluation environnementale de territoires à travers l'analyse de filières : la comptabilité biophysique pour l'aide à la décision délibérative

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Jean-Yves Courtonne
Direction : Denis DupréPierre-Yves Longaretti
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de gestion
Date : Soutenance le 28/06/2016
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale sciences de gestion (Grenoble ; 1997-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'études et de recherches appliquées à la gestion (Grenoble)
Jury : Président / Présidente : Nicolas Buclet
Examinateurs / Examinatrices : Denis Dupré, Emmanuel Raufflet
Rapporteurs / Rapporteuses : Natacha Gondran, Gilles Billen

Résumé

FR  |  
EN

Les conséquences de nos modes de production et de consommation sur l’environnement mondial sont reconnues et analysées depuis plusieurs décennies : changement climatique, effondrement de la biodiversité, tensions sur de nombreuses ressources stratégiques etc.Notre travail s’inscrit dans un courant de pensée visant à développer d’autres indicateurs de richesse. Dans une perspective de durabilité forte, nous nous concentrons sur une comptabilité biophysique (non monétaire), apte à pointer les externalités environnementales. Si une part importante des recherches dans ce domaine a été dédiée aux échelons nationaux, nous nous intéressons ici aux échelles locales, et en particulier aux régions françaises. Après avoir étudié les caractéristiques d’outils existants mobilisés dans les domaines de l’économie écologique et de l’écologie industrielle, comme l’Empreinte Ecologique, l’Analyse de Flux de Matières (AFM), l’Analyse de Cycle de Vie ou l’Analyse Entrée-Sortie, nous nous focalisons sur les filières de production que nous analysons à partir des quantités de matières qu’elles mobilisent au cours des étapes de production, transformation, transport et consommation. La méthode développée, AFM Filière, permet de produire des schémas de flux cohérents au niveau national, dans chaque région, et quand les données le permettent, à des niveaux infra-régionaux. Ceux-ci sont basés sur un processus systématique de réconciliation des données disponibles. Nous évaluons la précision de ces données d’entrée, ce qui permet de fournir des intervalles de confiance sur les résultats, pouvant à leur tour pointer vers des manques de connaissance. En particulier, nous fournissons une évaluation détaillée de la précision de l’enquête permanente sur le transport routier de marchandises (TRM), une pièce maîtresse de l’AFM Filière. Nous montrons au passage que réaliser le bilan matières sur une période de plusieurs années permet non seulement de s’affranchir du problème des stocks, mais aussi de réduire significativement l’incertitude sur les échanges entre régions. Nous adaptons par la suite la méthode des chaînes de Markov absorbantes pour tracer les flux jusqu’à leur destination finale et allouer les pressions sur l’environnement produites tout au long de la filière. Les flux de matières peuvent également être couplés à des modèles économiques afin de prévoir leur évolution en réponse à certaines politiques. En collaboration avec le Laboratoire d’Economie Forestière (LEF), nous fournissons ainsi la première tentative de représentation des flux sur la filière forêt-bois française, et analysons l’impact de différentes politiques de réduction des exports de bois brut sur l’économie et sur les flux physiques. Enfin, nous montrons comment il serait possible d’articuler ces analyses de filières avec les méthodes d’analyse qualitative déployées dans le domaine de l’écologie territoriale, et en particulier, l’analyse des jeux d’acteurs dans la filière. Nous situons notre travail dans le cadre normatif de la démocratie délibérative. A ce titre, nous réfléchissons aux apports de la comptabilité biophysique aux processus de décisions publiques incluant diverses parties prenantes. Nous dressons un panorama des modes de décision, des étapes clé d’un processus d’aide à la décision, des méthodes multicritères mais également des différentes formes que peut prendre la participation des citoyens. Nous proposons finalement une méthode d’aide à la délibération fondée sur l’élicitation de la satisfaction et du regret éprouvé par chaque partie prenante face à un futur donné. Celle-ci vise à organiser la discussion sur le mode du consensus apparent, qui facilite par nature le respect des minorités. Enfin, en partant des principales critiques adressées à la quantification, nous proposons en conclusion une réflexion sur les conditions qui permettraient de mettre la comptabilité écologique au service de l’émancipation démocratique.