Thèse soutenue

Dynamique temporelle des communautés microbiennes eucaryotes en lien avec les forçages climatiques et anthropiques : approche paléolimnologique basée sur le séquençage massif d'ADN sédimentaire

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Auteur / Autrice : Éric Capo
Direction : Isabelle DomaizonFabien ArnaudDidier Debroas
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biodiversité écologie environnement
Date : Soutenance le 19/12/2016
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale sciences et ingénierie des systèmes, de l'environnement et des organisations (Chambéry ; 2007-2021)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre alpin de recherche sur les réseaux trophiques des écosystèmes limniques (Thonon-les-Bains, Haute-Savoie)
Jury : Président / Présidente : Jan Pawłowski
Examinateurs / Examinatrices : Pierre Sabatier, Thomas Pommier
Rapporteurs / Rapporteuses : Purificación López-García, Laure Guillou

Résumé

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L’eutrophisation et le réchauffement climatique sont reconnus comme des forçages majeurs du fonctionnement des lacs. Toutefois les connaissances concernant la réponse des communautés microbiennes eucaryotes à ces forçages sont encore très lacunaires, alors même que les microbes eucaryotes, porteurs d’une vaste diversité taxonomique et fonctionnelle, sont des acteurs clés des réseaux trophiques lacustres. La pertinence des approches paléolimnologiques pour comprendre les impacts de ces forçages sur les communautés lacustres n’est plus à démontrer, mais aujourd’hui l’intégration des outils moléculaires pour analyser l’ADN archivé dans les sédiments offre des opportunités nouvelles pour reconstituer la dynamique passée de la biodiversité lacustre. Dans ce cadre, en s’appuyant sur le couplage entre paléolimnologie et outils de séquençage massif appliqués à l’ADN sédimentaire, ces travaux ont pour but (i) d’apporter des connaissances concernant la préservation de l’ADN des microbes eucaryotes dans les sédiments lacustres (ii) d’appliquer l’approche de paléogénétique sur des carottes sédimentaires issues de 3 lacs pour révéler la dynamique à long terme (de la décennie au millénaire) des microbes eucaryotes en lien avec l’évolution des conditions climatiques et anthropiques. Les résultats acquis sur le lac du Bourget ont permis de mettre en évidence l’efficacité d’archivage de l’ADN planctonique dans les sédiments récents pour la plupart des groupes eucaryotes (notamment chrysophycées, chytrides, chlorophytes, cercozoaires, ciliés, dinophycées). A partir d’une collection de carottes (issues du lac suédois Nylandssjön), l’effet de la diagénèse s’opérant au cours des premières années d’enfouissement a été évalué, permettant de démontrer que si la richesse taxonomique n’est pas impactée, des variations peuvent être détectées dans la structure de la communauté au cours des 10 premières années d’archivage avec une stabilisation du signal au-delà de cette période. L’approche paléogénétique a, en parallèle, été déployée d’une part à l’échelle du siècle sur deux lacs de même typologie mais ayant subi des niveaux d’eutrophisation contrastés, et d’autre part à une échelle temporelle plus longue (2200 ans) pour deux lacs de typologie contrastée (lac du Bourget, France et Igaliku, Groenland). Les résultats acquis démontrent que des réarrangements des communautés s’opèrent de manière concomitante aux périodes climatiques (réchauffement médiéval, petit âge glaciaire, réchauffement récent), et que le réchauffement climatique au cours des 30 dernières années a plus particulièrement favorisé certains groupes, notamment la richesse et l’abondance des dinophycées (en condition non eutrophe ; lac d’Annecy et du Bourget). Toutefois l’effet de l’eutrophisation est identifié comme le facteur le plus structurant, notamment dans le lac du Bourget (cas d’eutrophisation marquée, ~120 µgP.L-1). La forte influence du niveau d’eutrophisation est détectée sur la communauté eucaryote totale et plus particulièrement sur des groupes spécifiques tels que les chlorophytes et les ciliés. Les réarrangements majeurs de la communauté sont par ailleurs marqués par la mobilisation de taxons rares dans l’assemblage microbien eucaryote suggérant le rôle de la biosphère rare dans la capacité tampon des écosystèmes. Ces travaux pluridisciplinaires comptent parmi les premières études paléogénétiques appliquées aux microbes eucaryotes lacustres, contribuant de manière inédite aux connaissances de leur dynamique temporelle à long terme. Ces études tendent à confirmer le potentiel de ces approches pour reconstituer une vaste diversité de communautés lacustres. Les perspectives qui se dessinent dans la continuité de ces travaux concernent à la fois des aspects méthodologiques autour de la calibration du signal ADN archivé et la nécessité de déployer cette approche pour des lacs (sélectionnés) de typologies et histoires écologiques variées.