Thèse soutenue

Expulsions des Allemands des Sudètes : expressions d'une identité atrophiée dans la littérature : "L'Heure étoilée du meurtrier" de Pavel Kohout, "Les Inachevés" de Reinhard Jirgl
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Auteur / Autrice : Jessica Moreno-Bachler
Direction : Stephan Martens
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Études germaniques
Date : Soutenance le 08/06/2015
Etablissement(s) : Bordeaux 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Montaigne-Humanités (Pessac, Gironde)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Europe, européanité, européanisation (Pessac, Gironde)
Jury : Président / Présidente : Nicole Pelletier
Examinateurs / Examinatrices : Stephan Martens, Reiner Marcowitz, Herta-Luise Ott, Bernard Banoun, Hélène Camarade
Rapporteurs / Rapporteuses : Reiner Marcowitz, Herta-Luise Ott

Résumé

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L’expulsion des Allemands des Sudètes reste aujourd’hui encore un sujet sensible des deux côtés de la frontière germano-tchèque. En témoignent les polémiques liées à l’ouverture du « Zentrum gegen Vertreibungen » à Berlin ou les déclarations de Milos Zeman affirmant que les expulsions n’avaient pas été une punition assez sévère pour les Allemands. Dès 1945, les trois millions d’Allemands vivant encore sur le territoire de la future République tchèque furent expulsés vers l’Allemagne, transitant par des camps de travail, forcés de laisser derrière eux leur maison, leur ferme ou encore leur entreprise. Comment alors se reconstruire dans un pays qui n’est pas le sien ? Nombre d’entre eux considèrent dans un premier temps que cette expulsion est provisoire et entretiennent l’espoir d’un retour. Toutefois, ils seront rares à retrouver leur ancienne patrie. Ces événements sont violents, car sous le mot « expulsion » se cache en réalité des termes tels que « viol, expropriation, exploitation, déracinement ». La génération des parents expulsés, tout entière concentrée sur une reconstruction matérielle, fermera les yeux sur les souffrances des héritiers du non-dit. Aujourd’hui, ce sont eux qui prennent la parole, dans des œuvres romanesques que nous analyserons dans le présent travail. Le roman de Pavel Kohout, L’Heure étoilée du meurtrier, est un roman qui a manqué sa réception. Son message hautement politique a été masqué par l’appellation « Thriller » qui lui a été attribué, censure du régime communiste tchèque oblige. Toutefois, les personnages qui évoluent dans le récit, même s’ils enquêtent sur une série de meurtres, font plus que cela. Ils donnent à voir à quel point les relations germano-tchèques ont été détruites par la politique nationale-socialiste et l’occupation. Ainsi la rencontre entre les deux protagonistes, l’un allemand, l’autre tchèque, soulève la question de l’après. Alors que les expulsions sauvages débutent, leur amitié se renforce, leur questionnement face à l’avenir ouvre la voie de la réconciliation. Les personnages des Inachevés sont quant à eux les victimes des expulsions annoncées dans le roman de Pavel Kohout. Les quatre femmes de la famille Rosenbach vivront ce traumatisme dans le déni, l’opposition ou le silence, jusqu’à le transmettre au dernier-né, projeté dans un passé qui n’est pas le sien. Cet homme brisé par une histoire qui lui est étrangère pose alors la question de la transmission. Que s’échangent les personnages du roman de Pavel Kohout, lorsque Buback l’allemand reconnaît sa culpabilité ? Quel rôle le silence joue-t-il dans la transmission d’un traumatisme, lorsque même les générations actuelles souffrent des blessures de leurs aînés ?