Thèse soutenue

Une identité problématique : cittadinanza, nazionalità et italianità parmi les Italo-descendants en Argentine et au Brésil

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Auteur / Autrice : Mélanie Fusaro
Direction : Jean-Charles Vegliante
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Études italiennes
Date : Soutenance le 13/12/2014
Etablissement(s) : Paris 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Europe latine et Amérique latine (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Les Cultures de l'Europe méditerranéenne occidentale (Paris)
Jury : Président / Présidente : Isabelle Felici
Examinateurs / Examinatrices : Jean-Charles Vegliante, Isabelle Felici, Hervé Le Corre, Gérard Vittori

Résumé

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Selon la législation italienne, est Italien le fils ou la fille d’un citoyen italien. Cette transmission de la cittadinanza par droit du sang remonte à l’aube de l’Unité italienne, dans les années 1860, et à un contexte d’émigration massive, en particulier vers l’Amérique Latine. En légiférant de la sorte, les parlementaires du tout jeune Royaume d’Italie souhaitaient maintenir un lien fort avec la population émigrée dans le monde entier, pour l’intégrer, sur le principe de la nazionalità, à la construction de la Nation italienne. Depuis, la loi n’a que très peu changé, tandis que l’Italie s’est transformée de pays d’émigration en pays d’immigration. Entre-temps, les émigrés italiens se sont intégrés à leurs pays d’accueil et leurs descendants, qui sont donc légalement aussi des citoyens italiens, sont encore considérés par les parlementaires italiens comme une véritable ressource pour l’Italie : ils joueraient ainsi le rôle d’ambassadeurs d’italianità, contribuant au prestige de l’Italie à travers la diffusion de la langue, de la culture, et des produits de consommation italiens. Mais est-ce bien le cas et la législation est-elle encore adaptée à la réalité contemporaine ? À partir d’un corpus inédit de données statistiques et d’entretiens enregistrés ou filmés avec des parlementaires italiens, des représentants d’institutions italiennes à l’étranger et des Italo-descendants lors d’une recherche de terrain réalisée en Italie, en Argentine et au Brésil, nous vérifions dans quelle mesure ces derniers constituent (ou non) une ressource pour l’Italie et maintiennent un lien avec le pays d’origine de leurs ancêtres. Pour cela, nous conjuguons méthode quantitative et méthode qualitative, et pour cette dernière, nous recourons à l’analyse de discours, traquant chez les Italo-descendants les indices d’italianità et la manière qu’ils ont de l’exprimer dans leur langage et leur gestuelle. Nous abordons différents thèmes (économiques, démographiques, linguistiques, culturels, civiques) qui nous permettent de montrer que ces Italo-descendants ne constituent pas des ambassadeurs d’italianità, mais des individus aux appartenances multiples et aux identités complexes, dont le lien avec l’Italie est, à quelques exceptions près, ténu. Plus qu’un élément fédérateur unissant les Italo-descendants à leurs prétendus compatriotes d’Italie, la cittadinanza est ainsi envisagée de manière tantôt pragmatique, comme un laisser-passer permettant de voyager librement ; tantôt de manière symbolique, comme un vecteur de distinction au sein des sociétés argentine et brésilienne. Loin de se confondre, la cittadinanza, la nazionalità et l’italianità tendent en réalité à se distinguer de plus en plus dans le nouveau contexte globalisé, et invitent à réfléchir à une autre manière de préserver, entretenir ou créer un lien entre les Italo-descendants et l'Italie.