Thèse soutenue

Mécanismes osmorégulateurs et adaptation évolutive des crevettes Palaemonidae aux milieux estuariens

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Auteur / Autrice : Nesrine Boudour
Direction : Viviane BouloCatherine NebelGuy Charmantier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Ecosystèmes et sciences agronomiques
Date : Soutenance le 05/12/2014
Etablissement(s) : Montpellier 2
Ecole(s) doctorale(s) : Systèmes Intégrés en Biologie, Agronomie, Géosciences, Hydrosciences, Environnement (Montpellier ; École Doctorale ; 2009-2015)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Ecosystèmes lagunaires (Montpellier)
Jury : Président / Présidente : Patrick Berrebi
Examinateurs / Examinatrices : Viviane Boulo, Catherine Nebel, Guy Charmantier, Patrick Berrebi, Anne-Sophie Martinez, Jean-Yves Toullec, Sylvie Tambutté, Gerrit Flik
Rapporteurs / Rapporteuses : Anne-Sophie Martinez, Jean-Yves Toullec

Résumé

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Les crevettes Palaemonidae sont issues d'un clade ancestral marin, qui a montré une tendance évolutive remarquable à s'adapter à des conditions non-marines, envahissant avec succès les milieux estuariens et limniques. Adulte, Macrobrachium amazonicum (A) est une espèce d'eau douce (ED) avec une stratégie d'exportation vers les estuaires des larves qui ont besoin d'eau salée pour se développer. Des populations se sont trouvées au cours du temps isolées en ED ; elles ont récemment été décrites comme une nouvelle espèce, M. pantanalense (P), qui a acquis au cours de son évolution la capacité d'effectuer tout son cycle en ED, grâce à l'acquisition de l'hyper-osmorégulation en ED dès l'éclosion, et en perdant l'hypo-osmorégulation en eau salée. Ces deux espèces représentent un bon modèle pour la reconstruction des transitions évolutives des crevettes de l'eau salée à l'ED. L'objectif de ce travail est de comprendre les différences liées à l'adaptation physiologique et moléculaire à l'ED et donc à l'osmorégulation entre les deux espèces au cours de l'ontogénèse. Pour cela nous avons étudié l'ontogenèse comparative des organes osmorégulateurs, en particulier de la cavité branchiale, et la localisation et expression de différents transporteurs ioniques. Au niveau structural, aux stades larvaires, P a un développement branchial plus précoce que A. La Na+/K+ ATPase (NKA) a été essentiellement immunolocalisée au niveau des branchies chez P et au niveau des branchiostégites chez A aux mêmes stades larvaires. Ceci suggère que la forte capacité d'hypo-osmorégulation durant l'ontogenèse de A est liée aux transports ioniques dans les branchiostegites, alors que les lamelles branchiales ne sont pas complètement développées. Sur le plan ultrastructural, les lamelles branchiales des deux espèces comportent deux types de cellules associées, les cellules septales et les cellules piliers qui toutes deux présentent des caractéristiques d'ionocytes. Une différentiation ultrastructurale a été observée au niveau des cellules piliers et de l'épithélium interne des branchiostégites suite à une acclimatation en ED. Ces cellules présentent des microvillosités apicales, profondes et nombreuses, ce qui semble être une adaptation aux faibles salinités permettant une absorption efficace d'ions. Les transporteurs ioniques impliqués dans l'osmorégulation ont été étudiés. La V-H+ ATPase (VHA) a été détectée au niveau des cellules piliers et de l'épithélium interne des branchiostégites. La NKA et l'échangeur Na+/H+ (NHE-3) ont été localisés au niveau des cellules septales. Des différences d'expressions géniques de la VHA, du NHE-3 et de la NKA ont été mesurées en comparant les 2 espèces à certains stades de développement. La distribution différentielle de ces transporteurs entre les cellules piliers et septales suggère que ces deux cellules pourraient fonctionner comme un complexe cellulaire pour absorber ou sécréter des ions. Chez P, la capacité de tous les stades à hyper-réguler en ED peut provenir du développement précoce des branchies fonctionnelles, et la perte de l'hypo-régulation peut être liée au manque de transports ioniques au niveau des branchiostégites. Enfin, les glandes excrétrices antennaires produisent de l'urine hypotonique chez les juvéniles et adultes des deux espèces en ED, ce qui diminue les pertes ioniques. Ces résultats illustrent des adaptations évolutives (perte et gain de fonctions) qui ont permis l'invasion des habitats d'ED.