Thèse soutenue

Les troubles de la familiarité dans la schizophrénie

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Auteur / Autrice : Aurély Ameller
Direction : Delphine Pins
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Neurosciences
Date : Soutenance le 28/01/2014
Etablissement(s) : Lille 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Biologie-Santé (Lille)

Résumé

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Des troubles de la familiarité ont été décrits dans de nombreuses pathologies psychiatriques et neurologiques et seraient à l’origine d’anomalies de la cognition sociale. Dans la schizophrénie, ces troubles peuvent se développer selon deux polarités : l’hyper- et l’hypofamiliarité. Dans l’hyperfamiliarité, les sujets atteints pensent que des proches prennent l’apparence d’inconnus pour les persécuter ; le syndrome le plus décrit est le syndrome de Frégoli. A l’opposé, dans l’hypofamiliarité, les sujets reconnaissent leurs proches d’après les traits de leurs visages, mais pensent que ce sont des imposteurs qui ont pris l’apparence de leurs proches. Le syndrome de Capgras est le plus décrit dans l’hypofamiliarité et le plus étudié des troubles de la familiarité. Dans la schizophrénie, ces troubles concernent principalement les proches, mais également le sujet lui-même qui peut voir chez des inconnus des doubles de lui-même, par exemple. Bien que fréquents et largement décrits dans la schizophrénie, ces troubles restent très peu étudiés. Ainsi, les mécanismes sous-tendant les troubles de la familiarité dans la schizophrénie sont encore bien mal connus.L’objectif de ce travail de thèse a été de mieux comprendre les mécanismes sous-jacents aux troubles de la familiarité dans la schizophrénie au moyen d’études comportementales, utilisant la conductance cutanée et d’une étude en imagerie fonctionnelle par résonance magnétique (IRMf).Dans un premier temps, nous avons cherché à développer une échelle clinique permettant le diagnostic des troubles de la familiarité. En effet, à notre connaissance, aucun outil n’est actuellement validé. Il est alors difficile de caractériser ces troubles et les données épidémiologiques sont manquantes. Cette échelle a été construite d’après la proposition d’items par des experts des troubles de la familiarité, puis par la sélection des items les plus pertinents par d’autres experts. Elle est actuellement en cours de validation. Elle explore 4 dimensions de la familiarité : le soi, les proches, les lieux et les objets et cote ces dimensions respectivement pour l’hypo- et l’hyperfamiliarité.Dans un second temps, nous avons cherché à tester l’hypothèse selon laquelle les troubles de la familiarité, dans la schizophrénie, résulteraient d’une anomalie de la réponse émotionnelle lors de la reconnaissance normale d’un visage connu. Pour cela, nous avons enregistré, dans 2 études, la réponse électrodermale (RED) engendrée par la présentation de visages de soi, familiers, célèbres et inconnus. En effet, la RED est utilisée comme le reflet de l’émotion inconsciente générée par la présentation d’un stimulus (ici un visage). Les principaux résultats de nos 2 études ont montrés que : alors que chez les sujets sains, l’amplitude de la RED était faible pour la condition « inconnu », elle augmentait pour la condition « célèbre » et était encore plus élevée pour les conditions « soi » et « familier », chez les patients schizophrènes, l’amplitude de la RED était faible dans toutes les conditions. Plus spécifiquement, les patients schizophrènes ayant des troubles de la familiarité avaient une RED avec une amplitude similaire dans les différentes conditions : soi, familier, célèbre et inconnu. Ces résultats suggèrent qu’une atteinte émotionnelle puisse être responsable des troubles de la familiarité dans la schizophrénie et que cette atteinte soit du même ordre pour la familiarité que pour le soi.Enfin, dans une étude en IRMf, nous avons pu mettre en évidence une anomalie de fonctionnement des circuits neuronaux du soi et des circuits de la familiarité dans la schizophrénie. Ces résultats suggèrent une demande cognitive plus importante chez les patients (implication de régions du traitement cognitif) pour résoudre l’ambigüité créée par la présentation de visages hautement familiers, nous posons l’hypothèse que le soi et le familier sont difficiles à distinguer chez les patients. [...]