Thèse soutenue

Evolution du système nerveux et du comportement chez le poisson cavernicole aveugle Astyanax mexicanus

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Auteur / Autrice : Yannick Elipot
Direction : Sylvie Rétaux
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Neurosciences
Date : Soutenance le 17/04/2013
Etablissement(s) : Paris 11
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Signalisations et réseaux intégratifs en biologie (Le Kremlin-Bicêtre, Val-de-Marne ; 2000-2015)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut de Neurobiologie Alfred Fessard (Gif-sur-Yvette) - Unité de Neurosciences Information et complexité (UNIC) - Unité de Neurosciences information et complexité
Jury : Président / Présidente : Pierre Capy
Examinateurs / Examinatrices : Sylvie Rétaux, Pierre Capy, Patricia Gaspar, Germán Sumbre, Laure Bally-Cuif, Xavier Cousin
Rapporteurs / Rapporteuses : Patricia Gaspar, Germán Sumbre

Résumé

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L’Astyanax mexicanus est un poisson téléostéen utilisé dans les études de microévolution. Au sein de la même espèce, il existe plusieurs populations. Des poissons de surface (SF), vivant en banc dans les rivières d’Amérique Centrale et plusieurs populations cavernicoles (CF), vivant dans l’obscurité des grottes mexicaines. La majorité des populations cavernicoles sont indépendantes et ont dérivé des populations de surface depuis environ un million d’années. Les CF sont aveugles et dépigmentés. D’un point de vue comportemental, les CF ont, entre autres, perdu l’agressivité qui est un caractère important des SF. Ce travail caractérise finement les différences comportementales entre poissons de surface et cavernicoles, et analyse les modifications des circuits neuronaux qui sont à l’origine de la perte du comportement agressif chez les poissons cavernicoles. Les tests d’agressivité montrent que deux SF s’attaquent dix fois plus que deux CF. La distribution temporelle des attaques diffère également entre les populations. En effet, la majorité des attaques entre CF ont lieu lors des premières minutes du test, alors que chez les SF la fréquence des attaques augmente au cours du temps. L’étude de l’agressivité de SF rendu aveugle ou dans le noir montre que la perte d’agressivité chez les CF n’est pas due au phénotype aveugle. De plus, l’agressivité des poissons hybrides suggère que le comportement agressif des SF est génétiquement codé. Après des expériences pharmacologiques utilisant des composés interférant avec le système sérotoninergique ou soumettant les SF et les CF à différents régimes alimentaires, nous faisons l’hypothèse selon laquelle la perte d’agressivité des CF est une adaptation à la vie cavernicole, ceux-ci recherchant en permanence de la nourriture. En revanche, l’agressivité des SF est étroitement reliée à la hiérarchie existant au sein du banc, la dominance étant elle-même liée en partie à la concentration de la sérotonine présente au niveau du raphé. La concentration de sérotonine est inversement corrélée à l’agressivité. D’un point de vue neuroanatomique, l’organisation du système sérotoninergique est similaire entre les populations. Cependant, l’un des noyaux hypothalamiques est plus large chez les CF et contient plus de neurones. Par ailleurs, l’agressivité et le taux de sérotonine sont connus pour être inversement corrélés chez les vertébrés. De fait, des traitements pharmacologiques augmentant le taux de sérotonine diminuent l’agressivité des SF et modifient leur profil d’agressivité, mimant celui des CF. Cependant, le système sérotoninergique n’est pas le seul à être modifié dans le système nerveux des CF. En réalité, les dosages HPLC montrent que l’ensemble des systèmes aminergiques est amplifié chez les CF, conduisant à l’apparition d’un phénotype « hyper-aminergique ». Les études neuro-anatomiques et enzymologiques des systèmes sérotoninergiques et catécholaminergiques montrent que des variations du nombre de neurones et de l’activité des enzymes de dégradation des neurotransmetteurs aminergiques convergent vers cette amplification et sont à l’origine de ce phénotype. Par ailleurs, et en parallèle, les méthodes de transgénèses stables ont été testées chez l’Astyanax. Cette étude montre que l’utilisation des méganucléases et des transposons sont utilisables chez notre poisson modèle et permettent l’établissement de lignées transgéniques. Cet outil permettra de tester à l’avenir l’importance et la fonction des gènes d’intérêt lors du développement du système nerveux, ainsi que lors de la mise en place des comportements.