Thèse soutenue

Pour une poétique du document : esthétique et politique de la photographie

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Auteur / Autrice : Géraldine Millo
Direction : François Soulages
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Esthétique
Date : Soutenance en 2013
Etablissement(s) : Paris 8
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Esthétique, sciences et technologie des arts (Saint-Denis, Seine-Saint-Denis)

Mots clés

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Résumé

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Envisager une poétique des documents amène à rencontrer les mêmes difficultés que celles qui auront mené Gaston Bachelard et Roland Barthes, à construire une phénoménologie subjective, l’un pour aborder les éléments naturels, l’autre la photographie. Engager la recherche pour une poétique du document, c’est se donner à la fois un programme d’étude et un but, c’est amener la recherche vers un engagement. Accoler les deux notions montre le paradoxe : ce que le document cherche à évacuer, c’est sa fonction poétique. Le poétique est la contrariété du document. Le document n’est ni vrai ni faux en soi : il est une structure d’objectivation. C’est en tant que dispositif qu’il interroge l’image contemporaine. Travailler la photographie documentaire à partir de la notion de document indique la voie d’un déplacement. Si la photographie documentaire ne trouve plus son centre de gravité dans le récit du monde, ses problématiques ne sont plus celles de la part de fiction et de vérité qu’elle met en œuvre. Installer le document au centre de la recherche permet de comprendre le retour critique d’une certaine photographie documentaire. C’est parce que cette pratique de l’image prend pour objet la dés-image qu’est le document, qu’elle façonne un espace de critique : critique des limites et des enjeux du document, critique de la raison, de l’esthétique et de l’art. Le poétique va être mis en jeu dans ce que nous appelons l’épuisement des documents. L’épuisement des documents renvoie d’un côté à l’épuisement des images-documents dans le langage qui les encadre, d’un autre côté au style documentaire lui-même. La photographie documentaire telle que nous l’avons comprise a été travaillée principalement à partir de trois artistes : Lewis Baltz, Allan Sekula, Philippe Bazin. L’espace que dessine le document est un espace de la neutralisation, de la distance et de l’objectivité : si nous travaillons pour une poétique du document, ne faut-il pas investir cet espace-là, l’investir poétiquement et politiquement ? Dans cet espace se joue nécessairement la question de la communauté : tout espace ouvert, non recroquevillé sur la propriété d’un sujet, est un espace pour et à plusieurs. La notion de document propose aussi une certaine compréhension de l’expérience. Il est l’expérience neutralisée : ne doit plus subsister dans le document d’expérience qui n’ait été comprise, reprise par l’analyse. Georges Bataille aura mené dans les années 1920 une première libération du document, en le rappelant à la dimension de l’expérience et en exigeant du savoir qui le prend, le reprend, d’assumer cette part-là. Le travail est donc aussi mené à partir des concepts qu’il a forgés : ceux de besogne, d’informe, de désœuvrement et de transgression.