Thèse soutenue

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Auteur / Autrice : Edoardo Malfatti
Direction : Thomas VoitAntonio Federico
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Neurologie
Date : Soutenance en 2013
Etablissement(s) : Paris 6 en cotutelle avec Università degli studi (Sienne, Italie)

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Les myopathies congénitales sont un groupe hétérogène de maladies musculaires héréditaires définies sur la base de lésions morphologiques caractéristiques observées dans la biopsie musculaire des patients atteints. Ces lésions histologiques peuvent être, en particulier, des agrégats protéiques, des ‘cores’ ou une augmentation du nombre de noyaux centralisés. Le phénotype clinique classique associe une hypotonie musculaire à début précoce et une faiblesse musculaire, associée parfois à d’autres signes cliniques comme par exemple une atteinte oculaire. Il n'existe aucun traitement spécifique pour ces maladies. Les myopathies congénitales avec agrégats protéiques sont un sous-groupe des myopathies congénitales caractérisées par la présence d’accumulations de protéines dans les fibres musculaires. L'analyse morphologique peut distinguer des agrégations non spécifiques des protéines et / ou des corps d’inclusions bien définis. Les mécanismes conduisant à l'agrégation protéique ne sont pas encore complètement élucidés. Une analyse morphologique fine et détaillée pourrait aider à éclaircir les événements responsables de ce phénomène. De nombreux ‘loci’ génétiques ou des mutations génétiques ont été identifiées dans plus de 20 formes de myopathies congénitales. Néanmoins, à l’heure actuelle une grande partie des patients atteints ne présente pas de mutations dans les gènes connus. Donc, plusieurs entités restent toujours à identifier. Pour remédier à cette lacune de connaissance, des nouvelles approches d’analyse génétique ont été élaborées. L'une des techniques la plus prometteuse est le séquençage d’exome ou séquençage à haut débit. Cette dernière consiste à l’analyse de séquençage multiple et ciblé de l'ensemble des séquences codantes du génome humain. Cet outil pourrait sûrement contribuer d’une façon déterminante à la découverte de nouveaux gènes responsables de ces maladies monogéniques rares. Mon travail porte sur l’analyse de patients atteints par trois différentes formes de myopathies congénitales avec des agrégats de protéines. Nous avons analysé à la fois des cohortes de patients avec un diagnostic moléculaire ainsi que des patients qui ne présentaient pas de mutations dans les gènes connus. Les trois pathologies étudiées sont : la myopathie à corps réducteurs ou ‘reducing body myopathy‘ (RBM), myopathie némaline ou ‘nemaline myopathy’ (NM) et, la myopathie avec structures cap ou ‘cap disease’(CD). Nous nous sommes concentrés sur trois axes principaux: 1 -. Analyse morphologique et étude des mécanismes physiopathologiques qui sous-tendent l'apparition des agrégats de protéines chez les patients atteints RBM et autre phénotype associé à des mutations dans le gène FHL1. 2 -. Caractérisation clinique et morphologique des familles présentant des formes néonatales de NM et CD sans caractérisation génétique moléculaire. 3 -. Validation fonctionnelle de l'expression protéique de mutations dans des nouveaux gènes identifiés par séquençage d’exome chez des patients avec myopathie congénitale génétiquement non identifiée. Dans la première partie de cette étude, j'ai analysé un groupe de dix-huit patients présentant une RBM ou d’autres phénotypes associés à des mutations dans le gène FHL1. Les mutations dans ce gène ont été associées à des phénotypes hétérogènes, y compris la ‘reducing body myopathies’ (RBM), le ‘X-linked scapuloperoneal syndrome’ (X-SPM), la ‘X-linked muscular postural atrophy’ (XMPMA), la ‘Emery-Dreifuss-muscular dystrophy’ (EDMD), et une forme de myocardiopathie isolée (HCM), ainsi que des formes de chevauchements. J'ai mené une analyse immunohistochimique, ultrastructurale et en immunogold comparative détaillée chez 14 patients RBM (groupe 1), 3 patients EDMD, et un patient avec HCM et hypertrophie musculaire (groupe 2). L'analyse des biopsies musculaires pour le groupe 1 a montré des ‘reducing bodies’ (RBs) associés à des corps cytoplasmiques comme caractéristique récurrente. Les RBs présentaient une franche immunoréactivité avec l’anticorps FHL1. Du matériel réactif pour la desmin, alphaB-cristalline et la myotiline a été observée autour des RBs. En microscopie électronique (EM), les RBs étaient composés de matériel tubulofilamenteux dense qui se propage progressivement entre les myofibrilles et autour des noyaux musculaires. En utilisant des techniques d’immunogold, nous avons démontré que la protéine FHL1 se trouve uniquement à l'intérieur de RBs. Les échantillons du groupe 2 ont montré uniquement des anomalies dystrophiques légères, sans RBs. Avec la EM nous avons observé seulement des anomalies myofibrillaires aspécifiques. L'analyse moléculaire a révélé des mutations faux-sens dans le 2ème domaine LIM FHL1 chez les patients du groupe 1. Chez les patients du groupe 2 nous avons trouvé des mutations INS / DEL ou faux-sens dans le 4ème domaine LIM FHL1. Grâce à cette étude, j'ai pu analyser et décrire en détails les caractéristiques morphologiques des patients RBM, ainsi que démontrer clairement la localisation de la protéine FHL1 dans les RBs. J’ai pu également illustrer les différences morphologiques majeures entre différentes myopathies liées au gène FHL1 (Malfatti et al. , JNEN 2013). La deuxième partie du projet a porté sur l’analyse morphologique détaillée chez plus de 100 patients présentant une myopathie congénitale. Nous avons identifié des cohortes homogènes de patients sans diagnostic moléculaire qui présentaient des myopathies congénitales d’apparition prénatale ou néonatale avec agrégats protéiques. L’analyse d’exome d'un premier groupe de cinq patients a permis l'identification de mutations autosomique récessive dans le gène RYR1 chez trois patients ; les deux derniers patients ont été trouvés mutés dans le gène de la nebuline (NEB) Cette étude a permis de démontrer qu'une analyse morphologique détaillée de patients présentant des formes néonatales sévères de myopathies congénitales oriente vers un diagnostic génétique précis. Elle a également confirmé que les myopathies congénitales présentent une large hétérogénéité génétique et phénotypique et que le séquençage d’exome est un outil de diagnostic rapide et efficace, surtout pour l’analyse des grands gènes (Bohm, Vasli, Malfatti et al. , PlosONE 2013). L'analyse morphologique visant à l'identification des cohortes homogènes pour l’étude d’exome a permis de mettre en évidence certains patients présentant un tableau morphologique particulier. Un de ces patients présentait une association particulière de bâtonnets et de structures ‘caps’ dans sa biopsie musculaire. Cette association histologique n'avait jamais été signalée auparavant. L’analyse d’exome a révélé une mutation AD du gène TPM3. Le gène de l’'a-tropomyosine (TM) lente, TPM3, code pour une protéine des filaments fins exprimé uniquement dans les fibres musculaires de type I. Des mutations dans le gène TPM3 ont été associées à trois tableaux histologiques différents : la myopathie nemaline (NM), la myopathie congénitale identifiée avec disproportion de type de fibres (CFTD) et, plus récemment, la ‘Cap disease’ (CD). Ces derniers ont été décrits que séparément auparavant. L'identification d'un patient présentant une association unique de ‘Cap’ et bâtonnets dans sa biopsie musculaire nous a permis d'élargir le spectre morphologique de patients mutés TPM3, et d’affirmer la proximité histologique de différentes myopathies liées à des mutations du gène TPM3 (Malfatti et al. , Neuromuscular Disorders 2013). La troisième partie de ce deuxième axe a consisté à effectuer le séquençage d’exome d’un groupe de quatorze patients avec différentes formes cliniques de myopathie némaline. Cette analyse a mené à l’identification de mutations autosomiques récessives dans le gène nébuline (NEB). Afin de mieux caractériser ce groupe de patients nous avons effectué une analyse morphologique détaillée du muscle chez ces patients. Nos objectifs étaient la recherche de corrélations clinico-morphologiques et la constitution de groupes homogènes au point de vue histologique. Quatre groupes ont été identifiés en fonction de la sévérité clinique et de l'âge à la biopsie musculaire. Le Groupe 1 (n = 4) comprend des NM graves /lethales et une biopsie musculaire effectuée durant les premiers jours de vie. Le Groupe 2 (n = 5) comprend NM sévères et une biopsie après un mois de vie. Le Groupe 3 (n = 3) comprend NM typiques et une biopsie faite dans l'enfance, et le groupe 4 (n = 2) comprend des formes légères de NM et une biopsie faite à l'âge adulte. Les biopsies ont été analysées au point de vue histoenzymologique, immunohistochimique et ultrastructurale. La distribution des bâtonnets, leurs caractéristiques ainsi que la répartition des types des fibres ont été étudiés. Tous les patients présentaient des mutations NEB compatibles avec un mode de transmission AR. Chez le patients du G1 nous avons identifié une prédominance de type 2, contrairement à ce qui avait été décrit chez les patients avec myopathies congénitales ; Les bâtonnets étaient présents dans 1/3 de fibres musculaires et avaient une forme plutôt carré. L’analyse ultrastructurale a révélé un pourcentage élevé de fibres avec importante désorganisation sarcomérique. Le G2 a montré une predominance type allant jusqu’à une uniformité de type 1. Les bâtonnets présentaient une forme et une répartition variable au milieu de la fibre. L’analyse en ultrtastructure a montré la présence de rares fibres avec désorganisation sarcomérique. En revanche, le G3 et G4 ont présenté une uniformité de type 1 associé à des groupes bien délimité de bâtonnets sous-sarcolemmaux ayant une forme préférentiellement allongée. Il n’y avait pas de désorganisation sarcomérique majeure. En conclusions: 1) Nous avons observé la persistance de prédominance de type 2 dans la biopsie musculaire des nouveau-nés présentant des formes létales liées à des mutations NEB. 2) Nous avons démontré une corrélation directe entre la désorganisation sarcomérique et la sévérité clinique. La présence de groupement des bâtonnets bien délimités chez les patient moins sévères suggère une réponse musculaire d’autoprotection contre la diffusion / propagation des bâtonnets à l’intérieur de la fibre musculaire chez ces derniers patients. (Malfatti et al. , en préparation). La troisième partie de l'étude concerne l’analyse précise des lésions morphologiques particulières présentes dans la biopsie musculaire d’une famille dont les résultats de séquençage d’Exome effectuée par la équipe du Dr Nigel Clarke / Pr Kathrin North de l’Université de Sidney ont mis en évidence des mutations dans un nouveau gène. Dans ce cadre, j'ai effectué une analyse clinique, morphologique, en immunofluorescence (IF) et en microscopie électronique d’une cohorte de nouveau-nés (N = 20) présentant un phénotype clinique ou morphologique similaire. De plus, nous avons effectué une analyse en immunofluorescence avec des anticorps dirigés contre la protéine codée par le nouveau gène. Cette étude a permis de démontrer une absence d’expression de cette protéine chez les patients mutés. En revanche, nous n’avons pas observé d’altération de l’expression protéique (expression absente ou réduction) chez les autres patients analysés. Les résultats de ces deux études représentent des données préliminaires et strictement confidentielles.