Thèse soutenue

Stratégie thérapeutique par saut d’exon pour les épidermolyses bulleuses dystrophiques

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Auteur / Autrice : Sandrine Turczynski
Direction : Alain Hovnanian
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Génétique
Date : Soutenance le 25/11/2013
Etablissement(s) : Paris 5
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Génétique, cellulaire, immunologie, infectiologie et développement (Paris ; ....-2013)
Jury : Président / Présidente : Patrick Aubourg
Examinateurs / Examinatrices : Alain Hovnanian, Patrick Aubourg, Christina Has, Luis Garcia, Denis Furling
Rapporteurs / Rapporteuses : Christina Has, Luis Garcia

Résumé

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Les Epidermolyses Bulleuses Dystrophiques (EBD) sont des génodermatoses rares et sévères transmises sur un mode autosomique récessif (EBDR) ou dominant (EBDD), dues à une perte de l’adhésion dermo-épidermique. Les patients atteints d’EBD souffrent de décollements bulleux cutanéo-muqueux qui menacent le pronostic fonctionnel et vital dans les formes les plus graves. Toutes les formes d’EBD sont dues à des mutations du gène COL7A1 codant pour le collagène VII qui est le constituant des fibres d’ancrage assurant l’adhésion de l’épiderme au derme. Il n’existe actuellement pas de thérapie satisfaisante des EBD. La première partie de ma thèse visait à démontrer la faisabilité d’une approche thérapeutique par saut d’exon des EBDR. Cette stratégie consiste à exciser l’exon porteur de la mutation durant le processus d’épissage, afin de restaurer l’expression d’une protéine fonctionnelle. Les exons 73 et 80 de COL7A1 sont particulièrement intéressants car ils sont le siège de mutations récurrentes et que leur excision préserve le cadre ouvert de lecture. Nous avons dans un premier temps démontré le caractère non indispensable des séquences codées par ces exons in vivo en utilisant un modèle de xénogreffe de peau humaine EBDR reconstruite, génétiquement modifiée à l’aide de vecteurs rétroviraux exprimant l'ADNc de COL7A1 délété des séquences des exons 73 ou 80. Puis, j’ai pu établir que la transfection d’oligoribonucléotides antisens (AONs) dirigés contre certaines séquences régulatrices de l’épissage permettait d’induire le saut en phase de ces exons dans des cellules primaires de patients EBDR, avec une efficacité atteignant 90% de saut d’exon. Les analyses par western blot et immunocytofluorescence après transfection ont permis de mettre en évidence une réexpression significative du collagène VII (jusqu’à 25%) dans les cellules de trois patients EBDR. Enfin, j’ai pu démontrer la réexpression du collagène VII in vivo, après injection de différentes doses d’AONs dans des peaux équivalentes générées avec des cellules de patients et greffées sur des souris immunodéficientes. Dans la seconde partie de ma thèse, j’ai étudié une famille EBD particulière, dont les deux enfants atteints présentaient une EBD beaucoup plus sévère que leur mère et leur grand père maternel, atteints d’une forme modérée d’EBDD. Le séquençage des 118 exons de COL7A1 et des régions d’épissage adjacentes a permis d’identifier une seule mutation dominante c.6698G>A (p.Gly2233Asp) dans l’exon 84, à l’état hétérozygote chez les quatre sujets. A partir de l’étude des transcrits paternels, j’ai pu identifier une nouvelle mutation c.2587+40G>A dans l’intron 19 de COL7A1, qui active un site donneur cryptique dans l’intron 19, entraînant sa rétention partielle et la formation d’un codon stop prématuré. La confirmation de la présence de cette seconde mutation, récessive, dans l’ADN des deux enfants a ainsi permis d’expliquer les différences phénotypiques observées, les deux enfants atteints étant hétérozygotes composites pour une mutation dominante et une mutation récessive de COL7A1. Cette mutation récessive constitue la mutation intronique la plus distante des sites consensus d’épissage de COL7A1 et souligne l’importance de l’étude des ARNm pour la recherche de mutations dans le cadre des EBD. Dans une dernière partie de ma thèse, j’ai débuté la caractérisation d’un modèle murin knock-in d’EBDR développé par notre laboratoire, qui mime certaines des caractéristiques phénotypiques des patients EBDR. Mon travail a permis de démontrer in vivo la faisabilité de l’approche par saut d’exons pour COL7A1. Cette première étape importante conduit à développer des études de preuve de principe et de toxicologie dans des modèles animaux, dans la perspective d’une transition vers la clinique. Il illustre également les variations pathologiques d’épissage pouvant faire l’objet d’approches thérapeutiques similaires.