Thèse soutenue

Les sanctuaires boisés de savanes de Bondoukuy (pays Bwa, Burkina Faso) : biodiversité végétale et capacité de régénération

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Auteur / Autrice : Lassina Sanou
Direction : Anne Fournier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Écologie et conservation de la biodiversité
Date : Soutenance en 2013
Etablissement(s) : Paris, Muséum national d'histoire naturelle
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la nature et de l'Homme - Évolution et écologie (Paris)
Jury : Président / Présidente : Bernard Roussel
Examinateurs / Examinatrices : Michel Arbonnier
Rapporteurs / Rapporteuses : Guillaume Decocq, Jeanne Millogo-Rasolodimby

Résumé

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Face à l’érosion de la biodiversité et à l’extinction des espèces végétales, les sanctuaires boisés sont souvent présentés dans la littérature comme des hauts lieux de conservation et des reliques de végétation vierge. Mais les croyances associées comportent-elles réellement des idées particulières de prudence, de respect ou de conservation de la nature ? Pour vérifier cette affirmation et répondre à cette question, les sanctuaires boisés du département de Bondoukuy (1100 km²) dans les savanes de l’ouest du Burkina Faso ont fait l’objet d’un recensement aussi exhaustif que possible. Ils ont été identifiés et leurs responsables rituels ont été questionnés sur leur rôle. Leur distribution spatiale a été relevée et intégrée à un SIG. Pour les investigations botaniques et écologiques, l’échantillonnage s’est fondé sur trois grandes unités physiographiques et sur des relevés sur 1600 m², considérés comme la superficie minimale pour les relevés phytosociologiques, les bosquets de surface inférieure ayant été entièrement inventoriés. Les sanctuaires boisés ont été comparés avec leurs environs immédiats (quelle que soit leur physionomie), ainsi qu’à des sites témoins choisis au hasard dans les mêmes unités physiographiques que les sanctuaires. La recherche des groupements floristiques a été faite par classification hiérarchique(méthode de Ward), Leurs espèces diagnostiques et différentielles ont été identifiées à l’aide de l’indice INDVAL. La diversité alpha et gamma des peuplements ligneux ainsi que la régénération de chaque groupement ont été étudiées. Un total de 219 sanctuaires, dont 191 avec un couvert ligneux (162 bosquets et 29 sites avec seulement des arbres isolés), a été répertorié. La majorité des sanctuaires boisés (80 % des cas) est située dans les villages et ou dans un rayon 500 m autour d’eux et leur surface est inférieure à 1 ha. Ces sites sacrés affirment l’identité des Bwaba, ils permettent la cohésion sociale autour de divers cultes, de bonnes récoltes, la procréation, la pluie en cas de sécheresse, la santé, la protection générale des villages, la réussite, la lutte contre l’adultère etc. De plus, certains ont autrefois servi à se protéger pour résister aux agresseurs car les Bwaba ont un passé guerrier. Neuf groupements floristiques de sanctuaires, et 7 groupements de sites témoins ont été isolés. Un ensemble de 4 groupements sur glacis se caractérise par Guiera senegalensis et Azadirachta indica, un autre de 2 groupements de bas de pente est caractérisés et dominé par Anogeissus leiocarpa et Diospyros mespiliformis, il s’apparente clairement aux forêts sèches soudaniennes. Certains sanctuaires boisés sont envahis par l’espèce exotique Azadirachta indica qui définit à elle seule deux groupements. Un seul des groupements, caractérisé par Detarium microcarpum et Burkea africana, a une affinité savanicole, les autres ont une physionomie plutôt forestière. Les sanctuaires boisés sont floristiquement liés à leurs environs immédiats mais ils maintiennent mieux leur flore ligneuse que ceux-ci car ils bénéficient d’une protection contre le feu et les coupes. Les sanctuaires boisés situés dans les milieux les plus humides renferment quelques espèces « en danger » et « quasi-menacées » selon l’UICN (1,1% et 2,1%). Ces sanctuaires boisés des milieux les plus humides apparaissent cependant floristiquement proches des sites témoins forestiers les plus anthropisés. La diversité a des sanctuaires boisés est plus faible que celle des témoins savanicoles, mais leur richesse d’ensemble ou diversité g est du même ordre, voire plus élevée pour les sanctuaires boisés forestiers. L’invasion par Azadirachta indica a un effet très négatif sur la richesse spécifique. La richesse a est d’autant plus élevée que la superficie du sanctuaire est grande. En ce qui concerne la régénération, dix sept espèces ligneuses contribuent de façon significative au maintien des peuplements des sanctuaires. Cependant, leur régénération est très faible dans les bosquets envahis par Azadirachta indica. Nous montrons que ces sites sacrés sont en majorité très proches des villages, de petite taille, localisés dans des milieux fortement anthropisés et fragmentés et que certains d’entre eux sont envahis par A. Indica ; ce qui n’est pas en accord avec l’idée reçue d’un effet de conservation important en termes de richesse spécifique. Cependant, comme dans le contexte actuel de dégradation des milieux les forêts galeries sont en train de disparaitre dans la zone d’étude, les sanctuaires boisés conservent un potentiel de semences qui pourrait servir dans les actions de reforestation au Burkina Faso.