Thèse de doctorat en Religions et systèmes de pensée
Sous la direction de Jean-Paul Willaime.
Soutenue en 2013
à Paris, EPHE , dans le cadre de École doctorale de l'École pratique des hautes études (Paris) .
Le président du jury était Bernadette Rigal-Cellard.
À partir d’une étude historique et sociologique de six mormonismes, cette recherche analyse le phénomène de la fissiparité mormone dans son contexte avant tout protestant et américain. Sont examinés ici : 1- le mormonisme majoritaire de l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, dont le siège est à Salt Lake City (Utah) ; 2- la Communauté du Christ, anciennement Église réorganisée de Jésus-Christ des saints des derniers jours ; 3- le mormonisme de l’Église du Christ (Temple Lot) ; 4- le mormonisme de l’Église de Jésus-Christ (bickertonite) ; 5- l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours (strangite) ; 6- enfin, le mormonisme de l’Église de Jésus-Christ (cutlerite). Ces six mormonismes sont nés de la crise de succession qui éclate à la mort de Joseph Smith (1805-1844), le fondateur du « mormonisme premier ». L’étude historique, nourrie de la consultation d’archives et de sources secondaires, montre les évolutions idéologiques et structurelles des mormonismes. Si le mormonisme premier de Joseph Smith résulte incontestablement de la fissiparité protestante américaine du XIXe siècle, il s’éloigne radicalement de l’orthodoxie protestante évangélique jusqu’en 1844. Les six mormonismes qui se développent après la mort de Joseph Smith se situent ensuite différemment face à son héritage. L’Église mormone de Salt Lake City se rapproche peu à peu du protestantisme évangélique, alors que la Communauté du Christ connaît une protestantisation libérale radicale, s’apparentant aujourd’hui à un protestantisme progressiste avec le mormonisme en option. L’Église de Jésus-Christ (bickertonite) et l’Église du Christ (Temple Lot) considèrent Joseph Smith comme un prophète déchu, alors que les mormonismes strangite et cutlerite s’efforcent de préserver sa mémoire. Si certains mormonismes tentent, après la Seconde Guerre mondiale, de s’étendre en dehors de leur terre promise américaine d’origine, leurs évolutions idéologiques dépendent toujours du contexte étatsunien. L’étude sociologique se fonde sur un questionnaire distribué dans une paroisse de chacun des six mormonismes ainsi que sur les observations faites lors de plusieurs séjours de recherche de 2009 à 2013. Les réponses recueillies auprès des fidèles sont mises en perspectives avec les enseignements des manuels officiels des institutions, des observations de terrain et des études sociologiques. En interrogeant plusieurs aspects des croyances, des pratiques, des discours éthiques et des positionnements politiques des mormons, notre enquête entend mettre en lumière l’héritage du protestantisme et du mormonisme premier différemment conservé par ces diverses dénominations mormones. Alors que cet héritage diffère selon les mormonismes, tous ont conservé une identité profondément américaine. Bien qu’elles se présentent parfois comme « mondiales », leurs positionnements idéologiques s’inscrivent dans les débats sociétaux étatsuniens.
Mormonisms, A Historical and Sociological Study of a distinctive American Religious Fissiparousness (1830-2013)
Beginning with a historical and sociological study of six Mormonisms, this research analyzes the phenomenon of Mormon fissiparousness within its primarily Protestant and American context. The study explores: 1- The Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, the majority Mormonism headquartered in Salt Lake City (Utah); 2- The Community of Christ, formerly the Reorganized Church of Jesus Christ of Latter Day Saints; 3- The Mormonism of the Church of Christ (Temple Lot); 4- The Mormonism of the Church of Jesus Christ (Bickertonite); 5- The Church of Jesus Christ of Latter Day Saints (Strangite); 6- and finally, the Mormonism of the Church of Jesus Christ (Cutlerite). These six Mormonisms were born out of the succession crisis which splintered the church at the death of Joseph Smith (1805-1844), founder of “early Mormonism. ” The historical research, fostered by the consultation of archives and other historical studies, presents the Mormonisms’ ideological and structural developments. If Joseph Smith’s first Mormonism was the indisputable result of 19th century American Protestant fissiparousness, it radically differed from evangelical Protestant orthodoxy until 1844. The six Mormonisms that developed after Joseph Smith’s death then positioned themselves in different ways within the legacy they had inherited. The Salt Lake City-based Mormon Church gradually moved towards evangelical Protestantism, while the Community of Christ experienced radical, liberal Protestantization, and is today a progressive Protestantism with Mormonism as an option. The Church of Jesus Christ (Bickertonite) and the Church of Christ (Temple Lot) see Joseph Smith as a fallen prophet, while the Strangite and Cutlerite Mormonisms endeavor to preserve his legacy. While some Mormonisms attempted to expand beyond their American promised land origins after the Second World War, their ideological development remained dependent upon the American context. The sociological study is based on a questionnaire distributed to one congregation in each of the six Mormonisms, as well as observations made during several research trips between 2009 and 2013. The responses collected from the members are compared with the teachings found in the institutions’ official manuals, field observations, and sociological studies to give them perspective. By questioning several aspects of Mormon bÉliefs, practices, ethical expression, and political views, the study intended to highlight the degree to which the legacy and heritage of Protestantism and first Mormonism has been retained differently by these diverse Mormon denominations. Even though this legacy and heritage differ among the different Mormonisms, they have all retained a deep-rooted Americain identity. Although they sometimes appear to be “globalized,” their ideological stances are ascribed to American societal debates.