Thèse de doctorat en Systématique et épistémologie
Sous la direction de Thierry Bourgoin.
Soutenue en 2012
à Paris, Muséum national d'histoire naturelle , dans le cadre de École doctorale Sciences de la nature et de l'Homme - Évolution et écologie (Paris) .
Le président du jury était Jean Gayon.
Le jury était composé de René Zaragüeta Bagils, Philippe Huneman.
Les rapporteurs étaient Quentin D. Wheeler, Marie-France Sagot.
Bien que l’analyse cladistique ait largement contribué à l’essor de la reconstruction phylogénétique contemporaine au cours du siècle précédent, l’interprétation des hypothèses cladistiques qu’elle génère en phylogénétique reste problématique. En effet, alors que la conception traditionnelle de l’évolution implique l’existence d’espèces ancestrales, l’analyse cladistique ne permet pas de les identifier. Nous proposons de traiter ce problème selon deux approches. D’une part, la nature à la fois relationnelle et classificatoire des hypothèses cladistiques implique de réexaminer le problème classique du lien entre la phylogénie et la classification. Dans cette optique, nous montrons que : (i) les hypothèses phylogénétiques sont fondamentalement des structures relationnelles impliquant un concept de parenté ; et (ii) pour des raisons mathématiques, elles sont aussi des structures classificatoires. D’autre part, le statut ambigu des noeuds des cladogrammes nécessite de clarifier la notion de hiérarchie en systématique. Nous montrons alors qu’en dépit de leur isomorphie, la hiérarchie cladistique et la généalogie arborescente des espèces sont incompatibles. Deux modèles phylogénétiques sont finalement esquissés : (a) le modèle standard, selon lequel phylogénie = généalogie d’espèces (car évolution = transformation d’espèces) ; et (b) le modèle cladistique, selon lequel phylogénie = généalogie de clades (car évolution = diversification de clades). Ainsi, non seulement (b) est nécessaire (et suffisant) pour interpréter les hypothèses cladistiques, mais de plus, (b) (a)
Although cladistic analysis played an important role in the emergence of modern phylogenetics in the last century, the phyletic interpretation of cladistic results remains problematic. Indeed, while the traditional view of evolution requires ancestral species, cladistic analysis is unable to identify them. We propose to treat this problem in two parts. On the first part, the fact that cladistic hypotheses express both relationships and groupings implies reexamining the classical issue of the phylogeny/classification link. We then show that: (i) phylogenetic hypotheses are fundamentally relational structures implying a concept of kinship; and (ii) they are also classificatory structures for mathematical reasons. On the second part, the ambiguous status of the nodes of cladograms is clarified in view of the concept of hierarchy in systematics. In spite of their isomorphism, cladistic hierarchies and tree-like genealogies of species are mutually incompatible. Two phylogenetic models are outlined: (a) the standard model, for which phylogeny = genealogy of species (because evolution = transformation of species); and (b) the cladistic model, for which phylogeny = genealogy of clades (because evolution = diversification of clades). Thus, not only (b) is necessary (and sufficient) for interpreting cladistic hypotheses, but also, (b) (a)