Thèse soutenue

La représentation de l'architecture dans l'oeuvre de Théophile Gautier

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Auteur / Autrice : Raoudha Allouche
Direction : Alain MontandonSlaheddine Chaouachi
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littérature française
Date : Soutenance le 18/06/2011
Etablissement(s) : Clermont-Ferrand 2 en cotutelle avec Université de la Manouba (Tunisie)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale des lettres, sciences humaines et sociales (Clermont-Ferrand)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Centre de Recherches sur les Littératures et la Sociopoétique (Clermont-Ferrand, Puy-de-Dôme, France)
Laboratoire : (CELIS) Centre de Recherches sur les Littératures et la Sociopoétique
Jury : Examinateurs / Examinatrices : Patrick Berthier, Afifa Marzouki

Résumé

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La représentation architecturale est pérenne dans l’oeuvre de Théophile Gautier. Afin de déterminer les enjeux de l’expérience architecturale et d’appréhender le texte gautiéresque dans la dynamique de son élaboration, une approche éclectique s’est imposée. Loin d’être une simple reproduction, la description architecturale néglige la représentation mimétique et se soumet au prisme ,de la subjectivité. Critique d’art imprégné de peintures et d’oeuvres d’art, esthète dilettante et éclectique, Gautier perçoit l’objet architectural à travers un ensemble de considérations esthétiques etartistiques. Il cherche à reconstituer le triumvirat du peintre, du sculpteur et de l’architecte et à, défendre la primauté de l’architecture. Dans sa relation de voyage, il rejette les architectures modernes auxquelles il reproche leur uniformité, et leur préfère le cachet singulier des constructions andalouses ou le caractère exotique des palais orientaux. Appréciant la ligne courbe et spiralique aux dépens de la ligne droite, Gautier défend le génie d’invention et cherche non pas l’utilité mais la beauté de la forme pure. Prônant une esthétique du caprice et de l’arabesque, il s’attaque au fléau de l’européanisation et n’hésite pas à embellir le réel, à l’« artialiser ». Cette sensibilité esthétique est encore plus perceptible dans son oeuvre poétique. Obélisques, château et cathédrale sont ciselés de manière à répondre à l’idéal de l’esthète. Ce faisant,reconstruction architecturale et construction textuelle sont menés de front faisant du poème une architecture verbale qui prend forme dans et par les mots. L'architecture prend part également dans l'organisation de l'espace de la narration. D’un récit à l’autre, l’édifice architectural change de statut sémiotique (ancrage spatial, opposant, adjuvant, embrayeur de l’action,…). Mais souvent, la représentation architecturale jette les assises de la construction romanesque et en détermine le processus évolutif. La reconstitution des architectures gréco-romaines ou de la grandeur égyptienne à travers la restauration archéologique de Pompéi et la reconstruction de Thèbes illustre parfaitement cette fièvre de construction qui anime Gautier. Le projet de reconstitution se double d’un processus de création langagière ; la re-construction, se faisant réinvention, subvertit les frontières traditionnelles entre histoire, archéologie et fantasmagorie. L’architecture fantastique, rattachée à une perception subjective met en doute toute représentation sclérosante de l’espace et « donne à voir » un espace-temps mouvant et multiple. Délire, ivresse, haschisch, miroir, tapisserie murale, eaux-fortes sont les ingrédients de l’alchimie fantastique. Mais l’hallucination architecturale ne se résorbe pas en aventure spatiale ; elle nous introduit dans le périple labyrinthique de la psyché et exorcise les fantasmes personnels. Conjurant les cauchemarsarchitecturaux pianésiens, Gautier architecte met en exécution son rêve d’architecture. Composant les richesses exotiques de l’Orient et le confort douillet de l’Occident, il ne peut dissocier bonheur et architecture et construit son Eldorado conformément à ses exigences esthétiques. Faute de réaliser son rêve architectural sur le mode du réel, Gautier se tourne vers l’Art et se love dans son microcosme. Charriant un ensemble de modèles (de l’Antiquité, de la Renaissance, du Romantisme allemand,…), il construit son monument et associe l’« archè » à la « tecture », l’idée à la forme. Au-delà de ses fonctions référentielle, socio-historique, métaphorique, symbolique ou esthétique, la représentation architecturale est un acte fondateur grâce auquel se dégagent l’unité et l’harmonie de l’oeuvre gautiéresque.