Thèse de doctorat en Géoscience marines
Sous la direction de Marc-André Gutscher.
Soutenue en 2011
à Brest .
En Méditerranée centrale, la lente convergence de l’Afrique vers l’Eurasie, ainsi que l’avancée du butoir calabrais vers le SE, en réponse au retrait de la lithosphère africaine en subduction sous la Calabre et le SE de la mer Tyrrhénienne ont conduit à la formation d’un vaste prisme d’accrétion, sous la mer ionienne : le prisme d’accrétion calabrais. A travers le traitement et l’interprétation de données acquises pendant la campagne de sismique multitrace Archimède (1997) et du profil PrisMed0l (PrisMed, 1993), ce travail fournit une analyse de la déformation de ce vaste relief sous-marin, et dans son avant-pays : la plaine abyssale ionienne. Les résultats de ce travail s’articulent autour de trois grands axes : Sous la plaine abyssale ionienne, un jeu de failles inverses d’échelle crustale, avec un pendage de 60-65° principalement vers NW a été identifié ; il s’oriente suivant une direction SW-NE. Ces failles sont interprétées comme d’anciennes failles normales héritées de la phase d’accrétion océanique du bassin ionien à la dorsale de l’ancien océan mésozoïque néo-téthysien. Comme l’atteste la présence de dépôts syntectoniques d’âge Tortonien et le plissement de la base des évaporites messiniennes sous la plaine abyssale ionienne, ce grain océanique a été réactivé dans un champ compressif du Tortonien au Messinien inférieur. Cette étude montre que 3 à 4 kilomètres de raccourcissement ont été accommodés sous la plaine abyssale ionienne, pendant une phase de réorganisation tectonique en Méditerranée centrale, précédant l’ouverture du domaine tyrrhénien. Sous le prisme d’accrétion calabrais, l’analyse des données de sismique réflexion multitrace, combinées avec les données bathymétriques haute résolution a permis d’identifier de grands ensembles morphologiques dans ce prisme. Ces domaines morphologiques se corrèlent en profondeur avec le style de déformation interne, observée dans le prisme calabrais. Cette étude robuste et détaillée permet d’affiner la connaissance de ce prisme, formé (a) d’un prisme pré-Messinien, sous lequel des processus de sous- plaquage sont suspectés; et (b) d’un prisme post-Messinien, qui s’est formé par l’accrétion frontale des sédiments évaporitiques messiniens et détritiques Plio-quaternaire, sur un décollement à la base des évaporites. Ce domaine se caractérise par de faibles pentes de surface et du décollement (< 1°). Le contact entre ces deux domaines juxtaposés est identifié le long d’un rétrochevauchement majeur du prisme, sous lequel le pendage du niveau de décollement augmente (> 3°). Après une réévaluation de l’épaisseur initiale des sédiments évaporitiques messiniens, déposés dans l’avant pays ionien, cette étude permet (le conclure que le taux de croissance du prisme post-Messinien depuis le dépôt des évaporites est tic l’ordre de 30 km/Ma. Outre les nombreuses similitudes morphologiques et structurales entre la ride méditerranéenne Ouest et le prisme calabrais, le taux de croissance du prisme calabrais est deux à trois fois supérieur à celui obtenu pour la ride méditerranéenne Ouest. Ceci suggère que la vitesse de croissance du prisme calabrais est l’une des plus rapides, à l’échelle des 5 derniers Ma. Le long des bordures latérales du prisme d’accrétion calabrais : a- Les données Archimède imagent l’interférence entre la déformation compressive dans le prisme calabrais et celle dans la ride méditerranéenne Ouest, au Nord de la plaine abyssale ionienne. Cette zone d’interférence est interprétée comme l’expression de la formation simultanée de ces deux prismes d’accrétion, pendant le retrait respectif des subductions calabraise et hellénique. B- A l’Est de l’escarpement de Malte, une faille verticale d’échelle crustale entaille le prisme calabrais post-Messinien et a conduit à la formation d’un bassin syntectonique d’âge Pléistocène. L’ensemble des données géologiques, géophysiques et géochimiques est cohérent avec la présence d’une déchirure lithosphériqne verticale, le long de la bordure SW du slab ionien. Dans ce contexte, la faille verticale sous la mer ionienne est interprétée comme l’expression de surface de la déchirure lithosphérique, initiée pendant le retrait du slab ionien. Cette élude apporte de nombreux résultats sur les structures présentes sous la mer ionienne. Ces interprétations sont cohérentes avec l’évolution du bassin méditerranéen depuis le Mésozoïque, et en accord avec la cinématique récente de la zone de subduction calabraise, qui suggère que cette subduction soit encore active.
Since the late Cretaceous, slow and oblique convergence between Africa and Europe has occurred in the Mediterranean region. The Western and Central Mediterranean domains were shaped by the southeastward retreat of the Tethyan slab, during the last 35-30 Ma. In the Tyrrhenian domain, back-arc extension occurred from 10 Ma to the recent past due to the rapid roll-back of the Ionian portion of the Tethyan subducting lithosphere, that lead to the formation of the Calabrian accretionary wedge. Here, we present the most relevant limes of the Archimede multi-channel seismic cruise (1997, R/V Le Nadir) together with the profile PrisMed01 (PrisMed cruise, 1993), crossing the Ionian Abyssal Plain and the Calabrian accretionary wedge. The results from the interpretation of this dataset can be subdivided into three key points: Beneath the Ionian Abyssal Plain, a large-scale set of SW-NE striking reverse faults, that are primarily NW vergent faults are identified. These faults are characterized by a spacing of 10 to 20 km and a dip ranging from 60 to 65°. Following very recent paleogeographic reconstructions, these N°55 striking features are interpreted as inverted normal faults, which formed initially during the NW-SE directed seafloor spreading of the Ionian basin after its late Triassic-early Jurassic rifting. We further show that the inherited oceanic normal faults were reactivated under compression as reverse faults. This reactivation lead to the formation of Tortonian syntectonic basins typically developed NW of the major faults and the folding of the base of the Messinian evaporites. We show that 3-4 km of total shortening occurs over a 80 km wide area beneath the Ionian Abyssal Plain, resulting in a bulk shortening of 3. 5-5 %. We propose a link between the Tortonian-early Messinian inversion of the fault pattern and an episode of plate tectonic reorganization, prior to the main phase of back-arc opening of the Tyrrhenian domain. Within the Calabrian accretionary wedge, the morphological domains identified correlate with the style of internal deformation observed at depth in the wedge. The architecture of the Calabrian accretionary complex is very similar to the Mediterranean Ridge. Both systems consist of: (a) an external low-taper post-Messinian wedge overlying a thick undeformed section of underthrust Mesozoic sediments, (b) an internal pre-Messinian wedge, where the décollement steps down and where the underthrust section is presumably underplated. Based on the velocity images obtained during the PSDM, we further show that the contact between these two juxtaposed domains is marked by a backthrust of the wedge. We adopt a similar evolution model for the Calabrian wedge that was proposed for the Mediterranean Ridge (Reston et al. , 2002a). An area balancing shows that since the Messinian, the Calabrian accretionary wedge has undergone extremely rapid outward growth at an average rate of 30 km/Ma, which makes it one of the fastest growing accretionary wedges in the world over the past 5 Ma. The boundaries of the Calabrjan accretionary wedge: c- To the east, the Calabrian wedge overlaps the Mediterranean Ridge. This region of interference is characterized by a strong deformation of the seafloor, which can be successfully modeled by two analog wedges,which grow simultaneously. D- To the west, a major N150°E trending crustal scale and vertical fault slices through the entire accretionary wedge, with a vertical offset decreasing from north to south. This fault cuts several kilometers, through the preevaporitic Messinian sediments and down the crust itself. Previously published Mojo depth is contours map, offshore Sicily and the recent GPS data, combined with the presence of strike slip movements NE onshore Sicily, allow us to interpret this 200 km long crustal-scale fault as the surface expression of a STEP fault. The presence of syntectonic Pleistocene sediments on top of this crustal-scale fault suggests lithospheric recent vertical movement of the STEP fault, in response the rollback of the Ionian slab and advance of Calabria towards SE. This study greatly bas allowed us to improve upon existing structural interpretations of the tectonic elements, present beneath the Ionian Sea. All these results are in good agreement with the accepted models for the evolution of this domain since the Mesozoic and furthermore suggest ongoing activity of the Calabrian subduction zone, as attested by the very recent GPS measurements in Calabria.