Thèse de doctorat en Littérature et civilisation française
Sous la direction de Jean-Marie Gleize.
Soutenue en 2009
à École normale supérieure-Lettres et sciences humaines (Lyon ; 2000-2009) .
Francis Ponge (1899-1988) rédigea entre 1946 et 1982 neuf textes sur Georges Braque (1882-1963). Prendre le parti de cet artiste aura été pour Ponge la possibilité d’affûter ses moyens d’expression et de questionner sa propre démarche d’écrivain, participant à nourrir et informer sa conception de la poésie comme sa pratique d’écriture. À la marge de toutes déterminations génériques, ces écrits permettent d’aborder la spécificité d’un discours sur l’art qui se caractérise par une absence de séparation entre l’artiste et son œuvre et par une attention particulière accordée au peintre plutôt qu’à la peinture et à la description des œuvres. Ponge interroge le rôle de l’artiste dans la société comme son inscription dans l’histoire. Braque est aussi pour lui un « maître de vie », porteur de valeurs relatives à la morale et à l’éthique que leurs deux œuvres partagent en bien des points. Avec les moyens propres au langage, Ponge procède, comme Braque en sa pratique artistique, par tâtonnements successifs, répétitions et variations, met à découvert le cheminement de l’œuvre au fur et à mesure de son élaboration, le processus de sa fabrication. Ainsi, cette étude ne se propose pas tant de chercher des correspondances entre les deux œuvres que de s’ouvrir aux lieux où elles convergent en confrontant les pratiques d’un peintre et d’un poète, sans qu’il soit question de l’une à l’autre d’un rapport d’influence ou de subordination. Il n’est pas tant question de pratiques réciproques que d’une réciprocité de pratiques quand il y a chez Ponge et chez Braque un même mouvement dans l’exercice d’une activité artistique et réflexive, une même relation qui lie leur pratique et leur réflexion.
Francis Ponge and Georges Braque : convergences and reciprocity of practices
Francis Ponge (1899-1988) wrote between 1946 and 1982 nine texts on Georges Braque (1882-1963). Standing up for this artist gave Ponge the opportunity to sharpen his means of expression and to question his own approach as a writer, participating feeding and informing his conception of poetry as his practice of writing. On the fringe of all generic determinations, these writings allow to deal with the specificity of a discourse on art characterised by a lack of separation between the artist and his work and by paying more attention to the painter than to the painting and the description of works. Ponge questions the function of the artist in society and its insertion in history. Braque is also for him a « maître de vie », the bearer of values relating to morality and ethics, that the two works share in many points. With his own language, Ponge proceeds, as Braque in his own artistic practice, by successive attempts, repetitions and variations. He shows the path of the work as it advances, the process of manufacture. So, this study suggests less to seek a correspondence between the two works than to open to the places where they converge by comparing the practices of a painter and a poet. From the one to the other, there aren’t questions of influence or subordination. It is not so much a question of mutual practice than a question of reciprocity in practices, when Ponge and Braque have, a same motion in the pursuit of artistic and reflective activity, a same relationship linking their practice and reflection.